Bonnes pratiques de gestion des déchets de soins - La Semaine Vétérinaire n° 1724 du 17/06/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1724 du 17/06/2017

DÉCRYPTAGE

Auteur(s) : TANIT HALFON 

Le vétérinaire praticien est responsable de l’élimination des déchets qu’il produit, selon la réglementation en vigueur. Leur tri, dicté en fonction de leur dangerosité potentielle, conditionne la prise en charge par la filière de traitement appropriée. Les déchets radioactifs ne sont pas traités dans ce décryptage.

Plusieurs catégories de déchets

Les déchets d’activités de soins1 sont « issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif, dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire » (art. R.1335-1). On les différencie selon qu’ils sont dangereux ou non2, les déchets non dangereux étant assimilés aux ordures ménagères (DAOM). Les déchets dangereux incluent ceux d’activités de soins à risques infectieux (DASRI), à risques chimiques et/ou toxiques (DRCT), à risques radioactifs et les pièces anatomiques. Les DASRI présentent un risque infectieux pour l’être humain ou tout autre être vivant, « du fait qu’ils contiennent des microorganismes viables ou leurs toxines » pouvant être à l’origine de maladies (art. R.1335-1). Y sont inclus, même en l’absence de risque infectieux, les « matériels et matériaux piquants ou coupants, destinés à l’abandon, qu’ils aient été ou non en contact avec un produit biologique » et les « produits sanguins à usage thérapeutique, incomplètement utilisés ou arrivés à péremption ». Les DRCT sont dangereux car de nature à porter gravement atteinte à l’être humain et à l’environnement. Les pièces anatomiques sont des organes, des membres ou des fragments d’organes ou de membres, identifiables par un non-professionnel. Le tableau classe plusieurs déchets de soins par catégorie.

La filière de traitement dépend de la catégorie

Le vétérinaire est responsable d’évaluer la dangerosité d’un déchet, notamment son potentiel infectieux, et de l’orienter vers la bonne filière de traitement. Les DAOM sont éliminés via les ordures ménagères et soumis au tri sélectif lorsqu’il existe sur la commune. Les DASRI sont éliminés par la filière DASRI, par prétraitement par des appareils de désinfection (fréquent en France) ou incinération. Les pièces anatomiques sont éliminées par la filière d’équarrissage ou d’incinération animale. Les DRCT passent par une filière de traitement spécifique, avec incinération obligatoire. En effet, la désinfection n’élimine pas le risque chimique dans les eaux de traitement. Ainsi, il convient de bien séparer les DRCT des DASRI pour éviter la présence de résidus chimiques, nocifs pour l’environnement, dans les eaux souterraines. Les films radiographiques passent par une filière de valorisation (récupération des sels d’argent et des supports). Aucun déchet dangereux, y compris les médicaments, ne doit être jeté dans la poubelle d’ordures ménagères, et ce même si la commune concernée procède systématiquement à leur incinération.

Des emballages réglementés

Les collecteurs pour DASRI sont obligatoirement des dispositifs à usage unique de couleur jaune dominante, munis de fermetures temporaires (en cours d’utilisation) et définitives (avant leur enlèvement pour entreposage). Un trait indique la limite de remplissage, un pictogramme identifie le danger et un étiquetage renseigne l’identité du producteur de déchet. Des circulaires3 recommandent les bonnes pratiques d’usage des collecteurs, notamment de ne pas dépasser la limite de remplissage indiquée, ou de ne jamais forcer l’introduction des déchets. Ces collecteurs, homologués pour un poids et un volume maximums, possèdent aussi une date limite d’utilisation. La consistance des DASRI dicte le type de conditionnement. Le matériel blessant est jeté directement dans des conteneurs en plastique, quelle que soit leur taille (mini-collecteurs, boîtes, fûts et jerricans), à la différence des liquides nécessitant théoriquement un collecteur spécifique. De manière générale, il est recommandé d’utiliser des contenants plastiques étanches, en particulier pour réduire le risque d’écoulements biologiques liés à d’éventuels déchets mous. Les sacs en plastique ou en papier doublés intérieurement de plastique ou les caisses en carton avec sac intérieur sont disponibles pour les déchets solides ou mous. En pratique, l’usage de bacs étanches leur est souvent préféré, du fait des durées de stockage de déchets plutôt longues dans les établissements de soins vétérinaires. Le transvasement d’un bac à un autre est formellement interdit.

Un stockage dépendant de la quantité de déchets produits

La quantité de DASRI produits conditionne la durée de conservation avant collecte4. Pour une production inférieure ou égale à 5 kg par mois, la durée est de trois mois avant enlèvement, et ce à partir de la première utilisation du collecteur. Pour une production entre 5 et 15 kg par mois, elle ne doit pas excéder un mois, à l’exception des perforants pouvant être conservés trois mois. Les cas extrêmes des productions entre 15 kg par mois et 100 kg par semaine et celles de plus de 100 kg par semaine impliquent respectivement des durées maximales de 7 jours et de 72 heures. La congélation et le compactage des DASRI sont interdits. La zone de stockage doit être signalée et son accès limité. Les locaux de dépôt des collecteurs répondent à un cahier des charges précis suivant la quantité de déchets produits4. Par exemple, une production DASRI inférieure ou égale à 5 kg par mois ne nécessite par de zone spécifique de stockage. Pour une production supérieure à 15 kg par mois, un local dédié doit être aménagé. Les déchets anticancéreux doivent être entreposés dans un local fermé à clé.

Une responsabilité de la production à l’élimination

Le producteur reste responsable de la bonne élimination des déchets produits, même lorsque cette activité est déléguée à un tiers (art. L.541-2 du Code de l’environnement et art. R.1335-2 du Code de la santé publique). Il doit donc s’assurer du respect de la réglementation à toutes les étapes de gestion des déchets (transport, stockage, élimination). En particulier, il doit fournir la preuve du traitement des déchets produits par la filière appropriée. Pour ce faire, le producteur peut apporter lui-même ses déchets sur un site d’élimination, si leur poids est inférieur à 15 kg. Ce site devra lui fournir des documents prouvant leur élimination. Il peut aussi faire appel à un prestataire extérieur qui s’engage à respecter la réglementation et avec lequel il établit un contrat ou une convention. Lors de la collecte des déchets, un bordereau de suivi (formulaire Cerfa), à conserver pendant trois ans, est établi, quelle que soit la quantité de déchets produits. Une copie du bordereau signée par l’exploitant de l’installation de traitement et mentionnant la date et le lieu de l’élimination doit être retournée au producteur dans un délai de un mois. Mais un allégement réglementaire permet d’être exempté de cette paperasse pour les producteurs de déchets de moins de 5 kg par mois. Dans ce cas, le prestataire peut simplement envoyer des récapitulatifs de l’ensemble des opérations effectuées. En cas de refus de fournir les documents de traçabilité aux services de l’État, le vétérinaire encoure 75 000 € d’amende et deux ans d’emprisonnement5.

1 bit.ly/2sWnJEm.

2 bit.ly/2sid0XS.

3 bit.ly/2qYIXAF, bit.ly/2r8Hfw3.

4 bit.ly/2rEtzfF.

5 bit.ly/2p2v6vK.

Autres sources :

- Anne Peschler, chef de produit Cyclavet (la Compagnie des vétérinaires).

- bit.ly/2r4f2vf.

- bit.ly/2sWt6U0.

GESTION DES MÉDICAMENTS

- Les médicaments non utilisés (MNU) ou périmés (y compris les flacons vides ou entamés) sont retournés au fournisseur ou passent par une collecte sécurisée aboutissant à leur incinération.

- Les anticancéreux concentrés, qui comprennent notamment les médicaments avant préparation, les restes de médicaments, les périmés et les filtres des systèmes de ventilation des hottes et des isolateurs, doivent être stockés dans des collecteurs rigides agréés et identifiés (déchets cytotoxiques). Ils ne sont soumis à aucune durée légale de conservation. La filière de traitement implique une incinération à 1 000 à 1 200 °C.

- Les déchets souillés d’anticancéreux (matériels pour administration tels que poches et tubulures, compresses, gants, litières, etc.) peuvent être éliminés par incinération (conclusions de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie ou Ademe1). En pratique, ils sont généralement stockés avec les anticancéreux.

> En théorie, les MNU et les déchets souillés d’anticancéreux pourraient passer par la filière DASRI2 incinération. Cependant, l’absence de mention relative au processus de traitement sur les bacs DASRI et leur coût d’élimination limitent cette voie.
> Les collectes peuvent être assurées par le prestataire en charge des DASRI.

1 bit.ly/2r8Je3c.
2 Déchets d’activités de soins à risques infectieux.

LA RÉGLEMENTATION

La gestion des déchets suit un cadre législatif précis, défini par le Code de la santé publique (CSP) et le Code de l’environnement (CE). Le vétérinaire, en tant que professionnel producteur de déchets, a l’obligation de les éliminer (art. R.1335-2 du CSP). Pour ce faire, il est possible de confier cette tâche, via convention écrite, à une autre personne (art. R.1335-3), qui se chargera alors de les collecter et de les transporter dans le respect des obligations réglementaires. Afin d’éviter tout risque d’erreur ou toute dérive, un système de traçabilité est rendu obligatoire pour suivre les différentes étapes des opérations d’élimination (art. R.1335-4). Le praticien devra également s’assurer d’une conservation adéquate des déchets, en les séparant des autres dès leur production (art. R.1335-5). Leurs modalités de conservation et d’entreposage sont également soumises aux dispositions réglementaires (art. R.1335-6 et 7, arrêtés du 7 septembre 1999, arrêté du 24 novembre 2003 modifié), instaurant des collecteurs conformes aux normes en vigueur, ainsi que des conditions et des durées de stockage particulières. La gestion générale des déchets, quelle que soit leur nature, est détaillée dans le livre V du CE (art. L.541-1 à 8, art. R.541-42 à 48).
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