Petites annonces : comment séduire les jeunes diplômés - La Semaine Vétérinaire n° 1719 du 13/05/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1719 du 13/05/2017

DOSSIER

Le recrutement du vétérinaire idéal est un véritable parcours du combattant pour un certain nombre de praticiens. La recherche du futur employé passe souvent par la publication d’une petite annonce. Mais pour viser juste, notamment dans le cas du jeune diplômé, encore faut-il bien comprendre ses exigences, afin que l’offre se démarque des autres et tape dans l’œil du candidat. Tout en s’assurant que l’annonce atteint bien le public visé !

La petite annonce aujourd’hui ? Trop courte, peu détaillée, imprécise. Quelquefois, le contenu ne reflète ni la structure ni le profil recherché. » Julie Fabre (A 13) n’est pas tendre dans sa description des offres d’emploi. Plus attractive et transparente pour les jeunes diplômés, la petite annonce ne pourrait-elle pas faciliter les embauches ? 55,2 % des vétérinaires1 éprouvent presque systématiquement des difficultés à recruter, surtout en clientèle mixte. Christelle Fournel, enseignante-chercheuse en science de gestion et de management vétérinaire à l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA), souligne également que le nombre d’étudiants nouvellement diplômés est bien inférieur au nombre de structures qui recrutent. « Une annonce plus moderne pourrait alors tirer son épingle du jeu. » Mais encore faut-il que le candidat ait accès à l’offre d’emploi. Comme le rappelle Sandrine Chabaud, responsable marque employeur à la direction du recrutement et de la mobilité chez CGI (entreprise de services numériques), « une fois que je sais à qui je m’adresse (cible) et quels sont les arguments (message) que je souhaite mettre en avant, je peux réfléchir à la manière la plus pertinente (canal) de présenter mon offre ». Finalement, le vétérinaire-recruteur doit apprendre, en tout point, à se mettre à la place du candidat.

Connaître sa cible

Le praticien est-il en mesure de connaître précisément les exigences des jeunes vétérinaires ? Plusieurs indices peuvent nous mettre sur la voie. Une étude Apec2 de 2016 éclaire sur les motivations des nouveaux actifs dans la recherche de leur premier emploi. Cette enquête, réalisée auprès de jeunes diplômés depuis deux ans (niveau bac + 5), montre que leurs attentes sont très fortes en matière d’encadrement et de formation. Conscients du fossé entre la théorie et la pratique, ils souhaitent bénéficier d’un accompagnement rassurant et bienveillant de la part de leur futur employeur, qui leur permettra de progresser et d’acquérir de nouvelles compétences. Ils estiment cette première expérience décisive pour leur futur professionnel, d’où leur volonté forte de formation. L’étude fait ressortir aussi qu’ils recherchent idéalement une entreprise leur permettant d’exprimer leur personnalité. D’ailleurs, c’est pour cette raison que le choix du premier emploi peut se porter sur une PME3, jugée plus respectueuse de l’individu. Enfin, bien qu’ils soient conscients de leur niveau débutant, ils expriment un fort besoin de reconnaissance (« financière et symbolique ») et également de perspectives d’évolution. Mais finalement, le tout premier choix reste plutôt lié aux opportunités rencontrées et à la nécessité de décrocher un travail.

Les attentes des jeunes vétérinaires

Et les jeunes vétérinaires ? Claire Niel (L 15) colle parfaitement à cette description. « Mon objectif, en tant que jeune diplômée, est de progresser. Je recherche donc les structures qui me semblent les plus propices à la formation. Cela se traduit, pour moi, par des cliniques avec au moins deux vétérinaires ouverts à l’échange. Un équipement minimal m’est indispensable. Par exemple, je ne pourrais pas me passer d’appareil pour anesthésie gazeuse ou d’un appareil échographique, ayant été habituée à m’en servir durant ma formation initiale. Une bonne ambiance de travail m’est aussi capitale, car elle donne d’autant plus envie de s’investir et donc de progresser. Je pourrais d’ailleurs quitter un poste s’il s’avère que l’ambiance n’est finalement pas au beau fixe, ou si les promesses à l’embauche ne sont pas respectées. La rémunération, en revanche, n’est pour l’instant pas ma priorité. Cependant, pour mon tout premier poste, j’ai accepté de remplacer un été un vétérinaire exerçant seul. » Avis plus nuancé pour Julie Fabre : « En sortant de l’école, il est certain que l’on souhaite développer ses compétences et en acquérir de nouvelles. Néanmoins, et pour ma part, ma priorité était aussi de travailler tout court. J’ai donc accepté des remplacements dans des structures où je me retrouvais la seule vétérinaire. J’estime que c’est une bonne école pour apprendre l’autonomie. Par la suite et avec l’expérience, j’ai pu davantage cibler les cliniques où plusieurs vétérinaires travaillent ensemble, avec un plateau technique minimum (analyseurs d’hématologie et de biochimie, échographe), le tout dans une bonne ambiance. »

Soigner son annonce et son entreprise

Les critères de lecture des candidats peuvent différer (et quelquefois de loin) de ceux du praticien. Julie, par exemple, est assez critique vis-à-vis de la petite annonce. Mais cela ne l’a pas empêchée d’appeler, quel que soit (ou presque) son contenu : « J’avais envie de trouver du travail. Mais une annonce mieux rédigée, mieux ciblée, aurait facilité ma recherche d’emploi. » Par contre, Claire s’avère plus catégorique : « J’attends de la petite annonce qu’elle soit précise, mais surtout qu’elle contienne certains points essentiels : localisation géographique exacte, nombre et rôles des vétérinaires, formations éventuellement suivies par les praticiens, équipement, temps de travail et profil recherché. Ajouter qu’il y a une bonne ambiance peut suffire à faire la différence, si tous les autres critères ne sont pas présents ! » L’idéal, selon Claire, serait d’y faire figurer le lien du site internet de la structure, avec lequel le candidat pourrait retrouver toutes les informations manquantes… mais aussi mieux s’y projeter. Ne nous dirigerions-nous donc pas vers cette annonce à rallonge déjà utilisée par le monde de l’entreprise ? Sandrine Chabaud nuance :« Ce n’est pas la longueur qui fait la force d’une annonce, c’est le choix des mots. Il faut donner une projection au candidat en lui parlant de son futur rôle, adapter le message à sa cible et éviter le copier-coller. » En effet, selon une étude de 20034, une sophistication à outrance pourrait empêcher la petite annonce d’assumer sa fonction première, qui est de transmettre des informations facilement décryptables à la lecture et donc de jouer un rôle de filtrage parmi les candidats. Elle solliciterait, selon les chercheurs, des « compétences interprétatives » de la part des lecteurs qui n’arrivent plus à se positionner correctement face à l’offre d’emploi. Sandrine Chabaud ajoute que l’annonce ne doit pas tout dire : « Il convient de susciter l’intérêt du candidat pour lui donner envie de postuler. » Au-delà du fond et de la forme, le vétérinaire doit s’attacher à ce que son annonce soit le meilleur reflet possible de sa structure. De plus, et comme le souligne Pierre Mathevet, vétérinaire et président de la société de consulting Tirsev, « l’annonce doit être attractive, tout comme son entreprise ». Le jeune pourra faire des concessions, si l’entreprise est dynamique et le tire vers le haut !

Choisir le bon canal

La version papier est probablement appropriée pour les vétérinaires en exercice depuis plusieurs années. À la différence des jeunes qui n’ont pas forcément accès aux journaux professionnels. « À ma sortie d’école, je n’étais abonnée à aucune revue professionnelle. Les petites annonces m’étaient uniquement accessibles sur le Web », indique Claire. Même constat pour Julie. Pierre Mathevet est d’ailleurs assez catégorique sur la question : « À mon sens, le format papier ne présente aucun intérêt pour les jeunes, le numérique est à privilégier. » Claire et Julie, outre le recours aux sites spécialisés professionnels, consultent également les réseaux sociaux dans leur recherche d’emploi, mais seul Facebook est cité par les deux interrogées. D’ailleurs, un rapport de l’Insee5 de 2013 révèle que 30 % des personnes en quête de travail ont recours à un réseau social, quel que soit le sexe. Ce pourcentage est d’autant plus élevé que la personne est jeune et diplômée. 35 % des 20-24 ans cherchant un emploi l’ont fait savoir via les réseaux sociaux, contre 29 % pour les 35-44 ans et moins de 25 % pour les plus de 50 ans. Chez les plus diplômés (licence ou niveau supérieur), ce pourcentage monte à 45 %. Le réseau social professionnel (LinkedIn, par exemple) se développe – 14 % des actifs âgés de 20 à 39 ans y sont inscrits –, mais il concerne plutôt les cadres d’entreprises (37 %), peu les professions libérales (17 %), et plus particulièrement les hommes. Outre la bonne visibilité de l’annonce, le numérique offre l’avantage de moins limiter le contenu de son message. Le praticien pourra ainsi mettre en avant plusieurs atouts de sa structure, sans laisser de côté les principaux points de repère des jeunes actifs. De plus, ce nouveau média assure une diffusion plus étendue de son offre d’emploi, car elle est publiée parallèlement sur plusieurs sites internet. Enfin, le numérique simplifie et favorise les démarches proactives du recruteur, comme celles du postulant. Par exemple, les deux peuvent avoir accès à des CVthèques, et le deuxième peut envoyer plus facilement une candidature spontanée par e-mail.

La petite annonce est-elle suffisante ?

Bien qu’aucune étude ne soit, à ce jour, disponible pour évaluer les méthodes d’embauche utilisées par les praticiens, l’usage est de multiplier les canaux de recrutement pour trouver le profil idéal. D’ailleurs, selon Sandrine Chabaud, aujourd’hui, n’avoir recours qu’à un seul canal ne suffit pas. En effet, la petite annonce ne répond qu’à une logique de “post and pray” (poster et prier). « Il faut être proactif dans ses recherches de candidats, aller les chercher sur les CVthèques, les réseaux sociaux, lors d’événements, de salons de recrutement, créer des relations de proximité avec les écoles, etc. L’annonce d’emploi seule n’est pas suffisante. » Plusieurs études vont dans ce sens. Une enquête Apec6 de 2006 a interrogé 850 entreprises (au moins 10 salariés) de différents secteurs (industrie 32 %, commerce 14 %, services 48 %, dont santé). Elle montre que les recruteurs exploitent le plus souvent différents canaux de recherche de candidats. Les moyens les plus fréquemment utilisés sont d’abord les candidatures spontanées (69 %), ensuite les offres d’emploi (66 %). Les CVthèques arrivent en troisième position (24 %), suivies du réseau personnel ou professionnel (17 %), puis des autres méthodes (15 % pour les forums, les salons, etc.). Ces résultats sont valables, quels que soient le domaine d’activité et la taille de l’entreprise (moins de 100 ou plus de 100 salariés). Il en ressort que 85 % des candidats retenus ont été repérés par les méthodes facilement accessibles aux postulants (candidatures spontanées, offres d’emploi, CVthèques, forums, salons).

Une démarche efficace ?

Une deuxième enquête7 (rapport Offre d’emploi et recrutement, Ofer) de 2005 confirme également que le recruteur multiplie les outils d’embauche. En moyenne, tous secteurs confondus, il en utilisera trois, davantage dans les grands établissements et pour les cadres. Mais le rapport révèle aussi qu’il choisira préférentiellement la candidature spontanée s’il n’emploie qu’un seul canal. Ce moyen a d’ailleurs abouti au plus grand nombre de recrutements – contrats à durée indéterminée (CDI) 20 %, contrats à durée déterminée (CDD) 30 % – par rapport aux autres canaux. La petite annonce, globalement moins utilisée, s’avère aussi moins efficace ! Toutes catégories socioprofessionnelles confondues, elle permet d’approcher le candidat retenu pour 4 % des recrutements pour un CDD et 8 % pour un CDI, si elle est publiée dans la presse écrite, et pour 2 % et 5 % par le biais d’Internet. Néanmoins, pour la seule catégorie des cadres, c’est la petite annonce virtuelle qui s’avère la plus efficace : employée dans 56 % des processus de recrutement en CDI, elle aboutit dans 17 % des cas, contre 8 % pour la candidature spontanée (pas de données chiffrées significatives pour les CDD). Chez les vétérinaires, Pierre Mathevet a un avis assez tranché sur l’efficacité de la petite annonce : « La petite annonce, bien qu’elle constitue le canal de recrutement le plus fréquemment utilisé par le vétérinaire praticien, ne me semble pas être le modèle le plus adapté actuellement. Ce sont les stages qui s’avèrent les plus efficaces en matière d’embauche. Tous les vété rinaires n’ayant malheureusement pas les moyens (ou l’envie) de les développer, l’offre d’emploi reste donc incontournable. » Christelle Fournel va plus loin : « À mon sens, le plus important n’est pas de révolutionner la petite annonce vétérinaire, mais de réfléchir aux moyens qu’il faudra mettre en œuvre pour garder un salarié. »

1 Hors-série économie n° 18 de La Semaine Vétérinaire n° 1691 du 14/10/2016.

2 Association pour l’emploi des cadres : bit.ly/2qEZFok.

3 Petite et moyenne entreprise.

4 Marchal E., Torny D. « Des petites aux grandes annonces : le marché des offres d’emploi depuis 1960 ». Travail et Emploi n° 95, juillet 2003.

5 Institut national de la statistique et des études économiques : bit.ly/2oXzLji.

6 bit.ly/2p8hUSy.

7 bit.ly/2qyjZYX.

L’AVIS DE  GÉRALD LIMOUZY 

CONSEILS DE RÉDACTION D’UNE OFFRE D’EMPLOI

Une annonce bien rédigée augmente ses chances d’attirer les candidats les plus en adéquation avec le poste proposé… et donc d’embaucher ! Le schéma rédactionnel reste le même quel que soit le contrat proposé (remplacement courte ou longue durée, contrat à durée indéterminée). Le recruteur doit s’astreindre à adopter un style percutant, avec des phrases courtes et précises. Il convient d’abord d’indiquer l’intitulé du poste, ainsi que le type de contrat proposé. Cette “introduction” pourra être complétée par un descriptif succinct de l’entreprise, dont l’objectif sera de mettre en avant ses valeurs et son positionnement dans le secteur professionnel, mais aussi ses stratégies de développement pour le futur. Ce “plus” permet de valoriser les aspects positifs de l’entreprise et peut ainsi aider à améliorer son attractivité. Il est important de préciser au minimum la localisation géographique de l’entreprise (arrondissement pour les grandes villes) et la taille de la structure (organigramme). Il ne faut pas hésiter à y associer le lien du site internet de l’établissement. La description proprement dite du poste de l’annonce ne devra laisser de côté aucune information utile au candidat. Cela inclut le temps de travail, la rémunération, la date de prise de poste, la description de celui-ci, le profil recherché, voire les évolutions de carrière. S’attarder sur l’environnement de travail (ambiance, attrait de la région) est apprécié. Décrire le poste revient à détailler précisément les missions dont le futur embauché devra s’acquitter. Décrire le profil revient à préciser les compétences recherchées, les formations ou diplômes complémentaires souhaités, l’expérience demandée ainsi que les qualités humaines. Attention toutefois à ne pas surestimer la durée de l’expérience au risque de décourager d’éventuels candidats. Enfin, la modalité de réponse (téléphone, e-mail) devra être indiquée.
Le recruteur doit aussi veiller à ne pas inclure de mentions discriminatoires (article L.5321-2 du Code du travail) sous peine de sanctions pénales et/ou indemnitaires. Des exceptions légales sont possibles (article L.1133-1 du Code du travail). Une allégation fausse ou susceptible d’induire en erreur, l’absence de date et du nom de l’employeur sont aussi passibles de sanctions.

Sources : Apec, Pôle Emploi, Juritravail, interviewés.

Gérald Limouzy Expert en recrutement chez Axio RH Santé, cabinet de recrutement spécialisé dans les structures vétérinaires.

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