L’ostéopathie décryptée - La Semaine Vétérinaire n° 1718 du 06/05/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1718 du 06/05/2017

RÉGLEMENTATION

ACTU

ÉVÉNEMENT

L’ostéopathie animalière vient d’être clarifiée par deux décrets et un arrêté ( lire pages 48 et 49 de ce numéro ) . Notre confrère Pascal Fanuel, membre du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires, a contribué à l’aboutissement du dossier et nous en explique les apports. En parallèle, notre consœur Séverine Bernier, de l’ European Veterinary Society for Osteopathy , livre son éclairage sur la situation belge.

ENTRETIEN AVEC  PASCAL FANUEL 

« LES PREMIÈRES ÉPREUVES D’APTITUDE AURONT LIEU EN FIN D’ANNÉE »

Les contenus des textes qui définissent les conditions d’exercice des personnes réalisant des actes d’ostéopathie animale sont-ils conformes à vos attentes ?
Nous ne pouvons qu’être satisfaits de la publication de ces deux décrets et de l’arrêté au Journal officiel (JO), que nous attendions depuis 2011.
La question actuelle n’est plus de savoir si des personnes non vétérinaires peuvent effectuer des actes d’ostéopathie, mais de vérifier leur aptitude à le faire dans les conditions légales et déontologiques.
Rappelons que l’ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 a, dans son article 3, modifié l’article L.243-3 du Code rural et de la pêche maritime, en y ajoutant l’alinéa 12 qui autorise des personnes non vétérinaires à réaliser des actes d’ostéopathie animale dès lors qu’elles justifient de compétences précisées par décret et évaluées par le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires (CNOV), qu’elles sont inscrites sur une liste tenue par l’Ordre et qu’elles s’engagent, sous le contrôle de celui-ci, à respecter des règles de déontologie définies par décret en Conseil d’État.
Depuis l’ordonnance de 2011, l’Ordre avait pris pour principe de ne pas agir en exercice illégal, dans l’attente des textes d’application, qui viennent de paraître.
Ces textes complètent et réglementent le dispositif autorisant des personnes non vétérinaires à réaliser des actes d’ostéopathie animale. Ils concourent à vérifier leur aptitude à réaliser ces actes, à les enregistrer sur une liste d’aptitude tenue à jour par l’Ordre, comme pour les vétérinaires, et à s’assurer de leur connaissance d’un socle minimum en matière de déontologie. Sont particulièrement ciblées les exigences en matière de formations initiale et continue, les limites de leur exercice, les conditions d’orientation du cas clinique vers un vétérinaire, la nécessaire information scientifique, loyale et claire du client, ainsi que le recueil de son consentement éclairé.
Cela permettra de s’assurer que ces personnes non vétérinaires, qui peuvent intervenir en première intention comme la loi les y autorise, ne font pas courir de risque à l’animal soigné et le réfèrent à un vétérinaire si le cas sort du domaine de leurs compétences, le tout dans le but de veiller à la qualité du service rendu à la santé animale et au détenteur ou au propriétaire de l’animal.

Les règles de déontologie applicables aux personnes réalisant des actes d’ostéopathie animale sont précisées, de même que les modalités de leur inscription sur une liste tenue par l’Ordre. Comment vont s’effectuer ces démarches sur le terrain ?
Le CNOV va lancer une communication proactive vers les écoles formatrices et les associations représentatives connues en expliquant les modalités de contrôle des compétences et l’inscription sur les listes.
La liste d’aptitude de ces personnes sera tenue par le CNOV, celles des personnes en exercice le seront par les conseils régionaux (CROV). Ces derniers, avec leur excellente connaissance du terrain, seront en mesure de rappeler à la loi les personnes qui auraient oublié de s’inscrire spontanément, au risque de se trouver en situation d’exercice illégal.

Les personnes qui réalisent actuellement des actes d’ostéopathie animale doivent passer une épreuve d’aptitude organisée par l’Ordre. Quand seront organisées ces premières épreuves ? À combien estimez-vous le nombre de candidatures ?
La première série d’épreuves sera organisée d’ici à la fin de l’année 2017. Il est difficile d’évaluer le nombre de personnes qui vont y participer, les organisations les représentant étant diverses et variées, les obligations d’enregistrement n’existant pas actuellement et les motivations de chacun n’étant pas connues.

Les mesures de ces décrets et arrêté sont applicables dès le lendemain de la parution au JO. Concrètement, y aura-t-il un délai de tolérance ? Un service juridique dédié sera-t-il mis en place ?
Nous avons déjà établi un délai de tolérance depuis juillet 2011, faute de textes. Il est probable qu’il y aura un délai de tolérance le temps d’organiser les épreuves d’aptitude, jusqu’à l’évaluation de l’ensemble des candidats, et nous nous organiserons en conséquence pour mettre en place la gestion administrative de ces personnes. Passé ces épreuves, il ne sera plus toléré d’exercice sans enregistrement. Les personnes en exercice illégal seront poursuivies, ainsi que celles qui couvriraient l’exercice illégal.

Pascal Fanuel Membre du Conseil national de l’Ordre des vétérinaires.

Propos recueillis par Marine Neveux

ENTRETIEN AVEC  SÉVERINE BERNIER 1 

« IL EST À REGRETTER UNE INTERVENTION EN PREMIÈRE LIGNE »

En France, les ostéopathes animaliers devront désormais répondre à une déontologie et témoigner de compétences et d’un savoir-faire dédiés. Cette mesure vous paraît-elle aller dans le bon sens ?
La France a fait le choix de permettre à des non-vétérinaires de réaliser certains actes vétérinaires, dont l’ostéopathie, sous certaines conditions. Ce choix, semble-t-il, a surtout été dicté par la problématique sociale qu’en cas d’interdiction d’exercer des centaines d’ostéopathes animaliers se seraient retrouvés sans source de revenus du jour au lendemain… Il a donc fallu organiser cette pratique afin de garantir autant que faire se peut le respect du bien-être et de la santé des animaux. C’est ce que les récents décrets ont tenté de faire. Loin de critiquer les confrères qui se sont investis dans ce périlleux exercice, il faut déplorer, toutefois, un manque de transparence quant aux formations de ces personnes non vétérinaires. On ne parle pas du contenu des cours ni même de la qualité du formateur et encore moins du nombre d’heures représentées par les années d’études requises par le décret… Il est aussi à regretter une intervention en première ligne, alors que ces personnes n’ont pas les connaissances nécessaires pour établir un diagnostic d’exclusion préalable au traitement ostéopathique. Est-ce que l’examen pratique permettra de déterminer si elles sont compétentes pour distinguer un cas relevant de l’ostéopathie d’un autre présentant une contre-indication ? Il ne s’agit pas là de pousser à la faute, mais bien d’évaluer si leur intervention risque de nuire à l’animal (perte de chance de recevoir le traitement approprié à temps, voire manipulation dolosive) ou à la santé publique (zoonose, maladies à déclaration obligatoire).

Existe-t-il de telles mesures en Belgique ?
La pratique de l’ostéopathie sur les animaux en Belgique est reconnue comme un acte vétérinaire. La loi belge réserve l’art de l’examen, du diagnostic et du traitement des animaux aux médecins vétérinaires. L’Ordre vétérinaire a d’ailleurs rédigé, en 2016, un communiqué de presse sur l’exercice de la médecine vétérinaire pour rappeler ces préceptes2.
Il n’est en aucun cas question de permettre la pratique d’un acte technique sans avoir les compétences nécessaires pour diagnostiquer le trouble et poser l’acte thérapeutique. Peut-on imaginer consulter un spécialiste en orthopédie qui ne connaisse pas l’anatomie du corps entier, la physiologie, la sémiologie générale, les pathologies non orthopédiques ?
Un geste technique est en soi aisé à acquérir, mais pour garantir qu’il soit pratiqué dans de bonnes conditions, il doit être précédé d’une réflexion intellectuelle s’appuyant sur un bagage scientifique conséquent qui permettra de déterminer les causes des troubles que présente l’animal et la meilleure stratégie thérapeutique pour le soulager. C’est l’essence même de la médecine vétérinaire.
Actuellement, l’Ordre vétérinaire et l’Union professionnelle vétérinaire (UPV) ont entamé un procès en cessation d’activité à l’encontre d’une ostéopathe animalière pour pratique illégale de la médecine vétérinaire.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontés concernant l’ostéopathie en Belgique ?
Comme en France, la pratique de l’ostéopathie a séduit également des personnes ne disposant pas des compétences de base pour établir un diagnostic vétérinaire. Outre l’illégalité de ces “thérapeutes”, cela entraîne une mauvaise image de cette pratique médicale auprès de certains confrères, à cause de diagnostics erronés, voire farfelus.

Quelles ont été les avancées positives de ces dernières années en Belgique ?
Motivée par l’élan insufflé par l’European Veterinary Society for Osteopathy(EVSO) de fédérer la médecine vétérinaire ostéopathique, l’UPV a créé le groupe de travail alternaVet, rassemblant les vétérinaires pratiquant les médecines complémentaires vétérinaires (ostéopathie, acupuncture, physiothérapie, pharmacopée complémentaire), reconnaissant par là ces disciplines comme faisant partie intégrante de l’art vétérinaire.
Ces dernières années, la profession et les autorités ont pris également conscience des dérives des personnes s’arrogeant de compétences en soins animaliers (dentiste équin, comportementaliste, ostéopathe, physiothérapeute, etc.) sans les bases de compétences vétérinaires. Cela a débouché sur une campagne de sensibilisation du public sur l’illégalité de ces thérapeutes et les dangers pour le bien-être et la santé animale de recourir à leurs services3.



1Membre de l’European Veterinary Society for Osteopathy (EVSO), de la section équine de l’Union professionnelle vétérinaire (UPV) et présidente du groupe de travail alternaVet.
2 bit.ly/2pHbE7D.
3 bit.ly/2qE4TAq.
Propos recueillis par M. N.
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