Filière laitière : des solutions pour réduire l’empreinte carbone - La Semaine Vétérinaire n° 1709 du 02/03/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1709 du 02/03/2017

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : SERGE TROUILLET 

La Ferme laitière bas carbone est un projet interprofessionnel de l’ensemble de lafilière laitière française. En réponse à une exigence sociétale, l’ambition environnementale de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans la production se double d’une ambition économique. De manière complémentaire.

En 2013, l’Institut de l’élevage, en partenariat avec le Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (Cniel), France Conseil Élevage et les chambres d’agriculture, lance le projet pilote Life Carbon Dairy, qui vise à réduire les émissions de GES de 3 900 éleveurs laitiers. Le projet est alors déployé sur six régions représentant 65 % du lait français, avec une surreprésentation de l’Ouest et une grande diversité des systèmes d’exploitation agricoles. Ce programme, qui bénéficie d’un financement de l’Union européenne et du Casdar1, permet de développer et de consolider l’outil de diagnostic environnemental Cap’2ER®2.

Cette réduction des émissions de GES répond à une prise de conscience des dangers du réchauffement climatique pour notre planète. À l’horizon 2100, la température moyenne à la surface de la Terre risque, sans action particulière, d’avoir augmenté de près de 5 °C en 200 ans ! Cela correspond à la différence entre le pic de la dernière période glaciaire, il y a 20 000 ans, et aujourd’hui, même si cette différence était plus marquée dans le Nord, entre 10 et 15 °C, et quasiment nulle sous les tropiques. Une telle évolution dépasse les capacités d’adaptation des écosystèmes. Elle doit être contenue. La production de lait, comme toute activité humaine, doit intégrer cette nécessité dans son exercice.

EC réduite de 20 % entre 1990 et 2010

La COP 21 a permis de conclure un accord, en décembre 2015, à Paris, engageant 195 États à réduire leurs émissions de GES. L’ambition est que leurs contributions permettent de stabiliser le réchauffement climatique en dessous de 2 °C par rapport à la température de l’ère préindustrielle. La réglementation de ces émissions de GES est déjà une réalité au niveau européen et en France. Pour ce qui est de l’agriculture, dans l’inventaire national, elle pèse 19 % de ces émissions (transport : 27 % ; industrie : 21 % ; énergie : 18 % ; bâtiment 12 % ; déchets : 3 %), avec peu de dioxyde de carbone (CO2 : 3 %), mais bien davantage de méthane (CH4 : 68 %) et de protoxyde d’azote (N2O : 87 %). L’élevage laitier, quant à lui, représente 6,2 % des émissions nationales de GES.

L’objectif de ce projet est d’anticiper les futures réglementations et demandes sociétales, de connaître la situation chiffrée des élevages et d’identifier les leviers d’action potentiels, d’engager toute la filière dans une démarche de progrès et de communiquer sur ses résultats et ses contributions positives. Entre 1990 et 2010, la production laitière française a réduit son empreinte carbone (EC) de 20 %, soit 1 % par an. La productivité par vache a augmenté et la consommation d’intrants et de carburant a diminué. L’objectif du projet Life Carbon Dairy est désormais de réduire cette empreinte carbone du lait de 2 % par an, soit 20 % de moins en 2025 par rapport à 2015.

Des leviers d’action pour tous les systèmes

Les diagnostics réalisés auprès des 3 900 élevages de l’échantillon sont très révélateurs. Il en ressort d’abord que la ferme moyenne nourrit 1 840 personnes, stocke 61 tonnes de CO2 par an et entretient 90 hectares de biodiversité. Son empreinte carbone nette est de 0,93 kg équivalent CO2/litre de lait, le poste méthane entérique pesant 51 % des émissions de GES totales, la gestion des effluents 18 %, et le reste, lié à l’alimentation, 31 %. Ces émissions ne diffèrent pas, quels que soient les systèmes de plaine (herbager, herbe-maïs, maïs), le système herbager stockant davantage de carbone (figure 1). Les systèmes de montagne (herbager, maïs) émettent un peu plus de GES (figure 2), mais les prairies permanentes permettent de stocker davantage de carbone.

Surtout, les émissions de GES des élevages bas carbone (les 10 % des élevages de l’échantillon présentant les émissions de GES les plus faibles, figure 3) sont liées à une bonne maîtrise de l’alimentation, à un raisonnement de l’élevage des génisses (âge au vêlage, nombre de génisses sevrées strictement nécessaire au renouvellement du troupeau), à une optimisation de la fertilisation et à une limitation de la consommation de carburant. Leur empreinte carbone nette est de 0,80 kg équivalent CO2 par litre de lait, ce qui correspond déjà à l’objectif 2020. Ces élevages sont aussi les plus économes et se trouvent dans tous les systèmes existants, ce qui permet d’identifier des leviers d’action adaptés à chacun d’eux.

Un lait France bas carbone

À l’issue de cette expérimentation régionale réussie, le Cniel a décidé de promouvoir le déploiement de Life Carbon Dairy, dès la fin de 2015, à tous les élevages laitiers, avec les mêmes partenaires : c’est la démarche Ferme laitière bas carbone. Le projet s’appuie toujours sur l’utilisation de l’outil Cap’2ER, mais cette fois sur l’ensemble du territoire national et sur dix ans.

Ses objectifs prolongent ceux du projet pilote : fédérer les énergies de tous les acteurs de la filière ; encourager les éleveurs dans leur démarche de progrès ; améliorer la durabilité des systèmes de production ; réduire de 20 % les émissions de GES de la filière lait en dix ans pour vendre un lait France bas carbone, à la suite des engagements de la filière pendant la COP 21 ; élaborer la stratégie de la filière face au changement climatique et communiquer3 sur les bénéfices de l’élevage.

En 2016, 500 diagnostics ont été réalisés, 500 autres le seront en 2017. L’objectif est d’impliquer progressivement les 60 000 élevages laitiers français pour éviter l’émission de 2 millions de tonnes de CO2 en dix ans.

1 Compte d’affectation spéciale développement agricole et rural.

2 Calcul automatisé des performances environnementales en élevage de ruminants.

3 ferme-laitiere-bas-carbone.fr.

LE DIAGNOSTIC ENVIRONNEMENTAL EN ÉLEVAGE LAITIER

Il consiste en une visite individuelle chez l’éleveur par un conseiller formé à Cap’2ER®. Cet outil permet d’estimer les émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’élevage, mais aussi sa contribution positive à la biodiversité, sa capacité nourricière (nombre de personnes nourries par l’élevage) et son stockage de carbone. Il recueille, par exemple, des données sur le troupeau (taille, taux de renouvellement, âge au vêlage, volume de lait par vache), le logement des vaches (gestion des effluents, temps passé au pâturage), la ration des vaches, la surface de l’atelier laitier (prairies, maïs, luzerne), la consommation d’énergie, les données agroécologiques (présence de haies).
À la suite de ce diagnostic, l’éleveur se voit remettre un rendu personnalisé avec : une situation de la performance économique et environnementale de l’exploitation par rapport à des références nationales pour le même type de système ; une identification des leviers techniques qui expliquent cette performance (quantité de concentrés, azote minéral, consommation de fioul, taux de réforme) ; un plan d’action pour améliorer les performances de l’élevage.

Catherine Brocas Institut de l’élevage. Article rédigé d’après une présentation faite lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Ferrand, le 6 octobre 2016.

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