Liens laboratoires/vétérinaires : attention à la sanction ! - La Semaine Vétérinaire n° 1703 du 19/01/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1703 du 19/01/2017

LOI D’AVENIR

ACTU

ÉVÉNEMENT

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO-MORADEL 

Un vétérinaire peut être sanctionné s’il perçoit d’un laboratoire un avantage en nature ou en espèces dans le cadre de son exercice professionnel.

Interdiction d’avantages, déclaration des liens d’intérêts, publication des conventions… Afin de lutter contre les conflits d’intérêts, certaines dispositions de la loi “anti-cadeaux”1 initialement pensées pour la santé humaine ont été étendues au secteur vétérinaire par la loi d’avenir du 13 octobre 2014. Dernière application en date, le décret2 du 20 décembre dernier sur la transmission pour avis des conventions de recherche et d’hospitalité (repas, hébergement, transports) au Conseil national de l’Ordre des vétérinaires (CNOV). Ce texte prévoit qu’à partir du 1er juillet prochain, les laboratoires devront transmettre à l’Ordre les contrats d’études conclus avec des vétérinaires et les invitations à des manifestations professionnelles ou scientifiques. L’Ordre pourra rendre un avis favorable ou défavorable.

Des détails et des conventions

Si un laboratoire souhaite collaborer avec un vétérinaire ou un étudiant en médecine vétérinaire dans le cadre d’activités de recherche et d’évaluation scientifique ou encore organiser un événement à caractère professionnel ou scientifique, il devra en amont transmettre à l’Ordre national des vétérinaires les projets de ces conventions. Le dossier de demande d’avis devra notamment indiquer, en plus de la raison sociale et de l’adresse du siège social de l’entreprise, des informations relatives au vétérinaire concerné par la convention. Il précise « le montant et les modalités de calcul de la rémunération des vétérinaires ou de l’indemnité des étudiants vétérinaires et, le cas échéant, la nature de tous les autres avantages susceptibles de leur être procurés ». Mais il donne aussi la liste nominative des vétérinaires, indiquant leur numéro d’inscription à l’Ordre, ou la liste nominative des étudiants, précisant l’année de leur cursus et l’établissement d’enseignement dont ils relèvent. Cette obligation concerne également les pharmaciens dont l’Ordre national devra être sollicité.

Un avis non contraignant ?

Après réception du dossier, l’Ordre devra rendre son avis dans un délai de deux mois. Passé ce délai, son silence vaudra avis favorable. Une procédure simplifiée est prévue pour les demandes fréquentes, ce qui permettra au laboratoire de transmettre une seule demande. À noter que l’avis de l’Ordre n’a rien de contraignant, le laboratoire est cependant tenu d’informer le vétérinaire en cas de décision défavorable. L’obligation pèse donc davantage sur le laboratoire, mais le vétérinaire devra également faire preuve de vigilance. Ce dernier s’expose en effet à des sanctions en cas d’avantage perçu. L’article L.5442-12 du Code de la santé publique punit d’une amende de 4 500 €3 le fait, pour un vétérinaire, de percevoir d’un laboratoire des avantages en nature ou en espèces. Cette somme est doublée en cas de récidive. Et une amende de 37 500 € est prévue pour le laboratoire qui proposerait ou procurerait des avantages à un membre de la profession vétérinaire.

« Une charge de travail en plus »

Du côté des laboratoires, « cette obligation constitue une charge de travail en plus et un coup porté à la compétitivité de la France dans le domaine de la recherche sur le médicament vétérinaire », explique Arnaud Deleu, du Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV). Il ajoute qu’il « faudra prévoir des tâches administratives supplémentaires. En effet, bien que l’avis du Conseil de l’Ordre ne soit pas contraignant, ce dernier devra répondre dans un délai de deux mois, puis il faudra informer le vétérinaire de l’avis rendu. La recherche étant déjà un lieu d’incertitudes, cette obligation n’arrange pas la situation ».

« Nous avons un écosystème qui favorise la recherche (écoles vétérinaires, instituts de recherche), un maillage vétérinaire remarquable, des centres de recherche privés en France, mais à côté de cela, des contraintes supplémentaires qui sont une copie de ce qui se fait en humaine et qui ne tiennent pas compte des spécificités de notre secteur », souligne Arnaud Deleu. Les entreprises et le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires se sont préparés à la mise en œuvre de ce décret. Concernant les conventions d’hospitalité, le SIMV poursuit sa collaboration avec le CNOV « afin de pérenniser la formation continue et les systèmes d’informations à la profession vétérinaire ».

La transparence en ligne

Concernant la publication, sur un site internet dédié, des conventions (objets et montants) signées entre laboratoires et vétérinaires, également prévue dans la loi d’avenir, le décret d’application n’a pas encore été publié. Celui-ci devrait cependant reprendre les dispositions déjà existantes en santé humaine et ne concernerait que les contrats et les avantages inférieurs à 10 €.

1 bit.ly/2iIMoK6.

2 bit.ly/2jjYp7k.

3 bit.ly/2jFymaH.

ENTRETIEN AVEC  JACQUES GUÉRIN 

« LE DISPOSITIF NE SERA PAS AUSSI LOURD QU’EN MÉDECINE HUMAINE »

Pourriez-vous nous présenter dans les grandes lignes le contenu de ce décret ?
Ce décret découle de la loi d’avenir, qui prévoit un principe général d’interdiction pour les vétérinaires praticiens (et les étudiants) de recevoir des avantages en nature ou en espèces des laboratoires et pour les laboratoires de proposer ou de procurer ces avantages. La pression est mise sur les deux acteurs puisqu’il est prévu des sanctions significatives. Toutefois, le texte législatif prévoyait deux exceptions. Cette interdiction générale ne s’applique ni aux conventions de recherche ou d’évaluation scientifique ni aux conventions d’hospitalité. Ce décret d’application vient encadrer ces deux exceptions et définit notamment les informations à transmettre.
Nous avons travaillé en amont avec le Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV) afin de mettre en place une procédure simplifiée et dématérialisée. Le site internet de l’Ordre permettra aux laboratoires de déposer leurs demandes d’avis en ligne. Le Conseil national de l’Ordre (CNOV) dispose d’un délai de deux mois pour instruire la demande d’avis et contrôler la conformité des conventions à la loi. Passé ce délai, son silence vaudra acceptation. Nous dimensionnons le dispositif sur la base d’environ 1 000 conventions par an.

Quels sont les critères d’évaluation des demandes soumises à l’Ordre ?
Les points essentiels de contrôle s’attacheront d’abord à vérifier que le dossier transmis est complet, que l’objet de la convention respecte l’esprit de la loi, ou encore s’agissant des conventions de recherche, qu’un résumé du protocole de recherche et un cahier des observations, conforme aux règles de bonnes pratiques de laboratoire, sont fournis. Mais aussi que les vétérinaires concernés sont bien inscrits au tableau de l’Ordre et les étudiants en cours de formation dans l’une des écoles vétérinaires françaises.
L’Ordre considère que la valeur essentielle de ce processus conduisant à ce qu’il donne un avis motivé repose sur la confiance entre les parties ; la confiance n’excluant pas, bien entendu, le contrôle. Si les uns et les autres respectent leurs engagements respectifs, le dispositif ne sera pas aussi lourd qu’en médecine humaine. La voie essentielle doit être la procédure simplifiée.
Concernant le caractère « raisonnable » et « limité » des conventions d’hospitalité, nous comptons appliquer le référentiel de montants déjà mis en œuvre par le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. À titre d’exemple, les frais d’hébergement par nuitée ne devront pas dépasser 200 € et seront dans la limite de 300 € pour les manifestations à caractère international.
Enfin, il faut rappeler que l’Ordre est facilitateur, qui plus est neutre, dans cette affaire, et ne s’intéresse en aucune manière à la relation commerciale entre le vétérinaire et les laboratoires pharmaceutiques. Nous rendons un avis qui n’est pas contraignant et nous informons l’entreprise demanderesse, qui a le devoir de répercuter l’avis aux vétérinaires concernés avant la mise en œuvre de la convention. Notre rôle s’arrête là ! La charge de travail est supportée par le demandeur de la convention et par l’Ordre des vétérinaires. Nous avons accepté ce rôle afin de simplifier le travail des praticiens, qui ne seront pas impactés par une charge administrative supplémentaire.
Propos recueillis par M. I.-M.
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