L’apport des technologies d’aujourd’hui en élevage de petits ruminants - La Semaine Vétérinaire n° 1701 du 06/01/2017
La Semaine Vétérinaire n° 1701 du 06/01/2017

CONFÉRENCE

PRATIQUE MIXTE

Formation

Auteur(s) : SERGE TROUILLET 

L’élevage des petits ruminants est en pleine mutation. Les effectifs évoluent. L’élevage ovin, par exemple, induit une gestion intermédiaire entre celle que l’on peut concevoir en élevage bovin et la conduite en bande telle qu’elle est pratiquée en atelier de volaille. Pour augmenter sa technicité, l’éleveur doit connaître en temps réel le parcours de chacun de ses animaux. Seul l’élevage de précision, s’appuyant sur les technologies d’aujourd’hui, peut lui apporter des sources de progrès à cet égard.

Précisément, si les capteurs, les automates d’élevage, l’imagerie, sont aujourd’hui largement utilisés dans les élevages bovin et hors-sol (volaille, porc), qu’en est-il dans les élevages ovin et caprin ? Existe-t-il des solutions adaptées à la taille des troupeaux des élevages de petits ruminants et économiquement supportables ? Si oui, en quoi ces nouvelles technologies peuvent-elles être une aide à la surveillance et à la gestion du troupeau, aux contrôles de performances ?

Dans le contexte précis de ces élevages, des initiatives émergent du terrain, parfois en coconstruction avec des organismes professionnels ou des instituts de recherche. « L’enjeu est que des solutions soient applicables et transférables sur le terrain, et fassent l’objet d’une appropriation collective », indique Jean-Marc Gautier, de l’Institut de l’élevage.

La boucle électronique : le couteau suisse de l’éleveur

Dans le développement des technologies en élevage ovin, une évolution notable a été rendue possible grâce à une obligation réglementaire, celle de la boucle électronique. Elle a en effet été imposée pour identifier tous les animaux. Il en a résulté la lecture immédiate d’une information propre à faciliter l’automatisation d’un certain nombre de tâches : le suivi des mouvements des animaux, les démarches qualité, la gestion de troupeau (tri des agnelles, recherche des meilleures brebis, de celles à réformer, etc.). En gagnant du temps et en limitant les risques d’erreurs.

Pour les contrôles de performances, par exemple, nous sommes ainsi passés de 60 brebis pesées à l’heure à près de 500, avec moins de main-d’œuvre. Par ailleurs, la pesée est associée à des opérations de tri, avec des systèmes de contention fixes aménagés pour la lecture électronique, la pesée et le tri automatique, ou mobiles, pour le tri manuel des agneaux nouveau-nés, par exemple. Avec un lecteur portable dans une main et un smartphone équipé d’un logiciel de troupeau relié au lecteur de boucle électronique dans l’autre, l’éleveur aura bien besoin d’un outil tout-en-un. « Tous ces nouveaux outils représentent un investissement et nécessitent un accompagnement pour faire les bons choix, notamment pour l’implantation du lecteur fixe permettant la meilleure circulation des animaux dans l’exploitation », observe Laurent Solas, conseiller ovin à la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire.

L’autopesée : un champ encore à explorer

Dans la Meuse, un éleveur possédant un troupeau de 300 brebis, Daniel Dellenbach, figure parmi les expérimentateurs de terrain. Fort du constat selon lequel la main-d’œuvre constitue à ses yeux le principal obstacle au développement d’un élevage ovin, « car c’est chronophage d’élever des moutons si l’on n’a pas les équipements qui conviennent », il invente, teste, développe des outils qui lui permettent de gagner du temps. Dans un premier temps, il met au point un nourrisseur automatique, adapté à tout type de troupeau.

Ensuite, pour la pesée de ses agneaux – une corvée, chaque semaine, avec beaucoup de main-d’œuvre –, il imagine un système de balance en accès libre aux animaux. Avec un appât, en l’occurrence une pierre de sel, les agneaux passent continuellement à la pesée sans intervention humaine et sans stress pour eux. Grâce à la lecture de la boucle électronique posée sur les animaux, sont enregistrées toutes les données de ceux qui montent sur cette balance. L’ordinateur fait ensuite son office.

L’appareil, encore au stade de prototype, laisse présager des applications prometteuses. La connaissance du poids et de la croissance, après le sevrage, permettra d’optimiser la gestion de l’allotement. Il sera possible de tester des aliments et de suivre la croissance des agneaux au jour le jour. Avec une entrée et trois sorties, pilotées électroniquement, l’appareil distribuera les animaux en lots ciblés selon les sorties. « C’est de la mise en façon directement sur l’exploitation, avec plusieurs objectifs : alléger son travail, réduire la main-d’œuvre et optimiser sa technicité », soutient Daniel Dellenbach.

Le GPS, à l’heure du sur-mesure

La géolocalisation s’entend sur des surfaces vastes, souvent non clôturées. Elle offre également un intérêt lorsque ces surfaces, même clôturées, sont boisées ou sans grande visibilité. Elle permet de déterminer la localisation des animaux et leur consommation de ressources, la surveillance de l’animal isolé, bloqué, attaqué ou qui se met en danger (par une forme de clôture virtuelle), ainsi qu’une meilleure compréhension du comportement de l’animal.

C’est ainsi que Rachel Devèze, éleveuse des Hautes-Corbières, dans l’Aude, utilise un GPS sur son troupeau caprin. Si son premier appareil, qui lui envoyait des SMS, lui apparaissait révolutionnaire, celui dont elle dispose aujourd’hui lui fournit une aide des plus précieuses. En ne cherchant plus ses bêtes, elle gagne deux heures par jour et, surtout, elle a adapté la conduite de ses animaux grâce à ce GPS. En sachant par où ses 50 chèvres passent et où elles mangent grâce à une carte satellite, elle a pu optimiser l’utilisation de ses surfaces pastorales.

« Ce type d’expérimentation réussie nous conduit à travailler avec des spécialistes qui souhaitent développer du matériel spécifique à l’élevage, des dispositifs qui ne soient pas détournés d’autres utilisations et qui prennent en compte les caractéristiques d’autonomie, de robustesse et de coût adaptées à ce type d’élevage », explique Pierre-Guillaume Grisot, de l’Institut de l’élevage. Le mouvement est en marche.

ET DEMAIN ?

Les technologies aujourd’hui utilisées dans les élevages bovin et hors sol sont-elles adaptables aux élevages des petits ruminants ? Les aspects techniques doivent recouvrir les aspects économiques. Si l’on considère qu’un boîtier de GPS coûte 150 €, avec un abonnement de 50 € par an, ce qui suffit pour un lot de 50 chèvres, que faudra-t-il pour un troupeau de 500 moutons ? La valeur et la marge par animal sont déterminantes pour savoir quel coût peut être affecté à ce type d’équipement. Le déploiement de ces technologies GPS, le passage à l’énergie solaire pour renforcer leur autonomie, la miniaturisation des systèmes en cours, l’adaptation des systèmes d’attache à la taille et au collier de l’animal, les études sur des appareils sur mesure, ouvrent la voie à l’essor de l’élevage de précision pour les petits ruminants. Celui-ci pourra également s’inspirer de ce qui existe déjà par ailleurs : toutes sortes de capteurs, de bolus, d’analyses d’images, qu’il conviendra d’adapter aux spécificités des petits ruminants. Et pourquoi pas l’utilisation des drones pour observer ce qui se passe sur les parcelles ? Cela est déjà testé en Nouvelle-Zélande, avec des plans de vol automatisés, mais à une échelle bien plus grande…

Jean-Marc Gautier Institut de l’élevage de Castanet-Tolosan (Haute-Garonne). Article rédigé d’après une présentation faite lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), le 6 octobre 2016.

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