La formation vétérinaire : une adaptation permanente à des contraintes multiples - La Semaine Vétérinaire n° 1700 du 13/12/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1700 du 13/12/2016

ACTU

L es vétérinaires, souvent très attachés à leur école d’origine, s’imaginent souvent qu’elle est restée telle qu’ils l’ont connue. Les écoles sont pourtant en perpétuelle évolution, dynamique qui s’est fortement accentuée ces 15 dernières années. L’explication est simple : les contraintes se sont multipliées, ne laissant aux écoles pas d’autre choix que de s’adapter.

La pression financière

La disette budgétaire actuelle conduit l’État à se désengager progressivement. Ainsi, malgré un soutien fort du ministère de l’Agriculture sur le volet investissement immobilier, la dotation publique versée aux écoles et la masse salariale des fonctionnaires ne représentent que 60 % de leur budget annuel de fonctionnement. Les écoles ont intégré au quotidien la comptabilité analytique des coûts pour chacune de leurs activités et diversifient leurs recettes. Qu’elle soit pertinente ou non, la pression que ce changement de paradigme a mise sur les services, et notamment sur les CHUV1, reste forte, d’autant plus que les plafonds d’emploi qu’on leur impose ne permettent pas nécessairement d’adapter le staff en conséquence.

L’effet stimulant de l’accréditation internationale

La deuxième contrainte majeure a été l’évaluation européenne de la formation vétérinaire, conséquence des directives liées à la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Les écoles, à juste titre fières de la qualité de la formation vétérinaire française, ont pourtant eu la désagréable surprise de se voir “secouées” après leur évaluation. Pour faire simple, c’est surtout la vétusté de leurs infrastructures cliniques qui a été mise en cause, conséquence d’une longue carence en investissements immobiliers d’entretien ou de rénovation. Les quatre écoles sont désormais tirées d’affaire, mais la pilule a parfois été amère. L’exigence d’un standard minimal de qualité dans tous les aspects de la formation vétérinaire, qu’on appelle désormais les Day-One Competences, les a par ailleurs obligées à gommer leurs lacunes éventuelles.

Le mille-feuille administratif

Le statut des écoles vétérinaires est longtemps resté immuable. Soudainement, dans les dix dernières années, le décor est devenu beaucoup plus complexe. En 2010, deux des quatre écoles, après leur fusion avec une école d’ingénieur, ont changé de statut juridique. D’établissement public à caractère administratif (EPA), elles sont devenues à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP). L’organisation interne des écoles n’est donc plus uniforme. Dans le même temps, la création des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (Pres), devenus en 2013 les communautés d’universités et d’établissements (ComUE), puis celle de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France (IAVFF-Agreenium) ont inséré nos écoles dans un tissu universitaire complexe et peu lisible. Le rapport coûts-bénéfices de cette insertion dans le mille-feuille n’est pas toujours optimal mais a conduit les écoles vétérinaires à une nécessaire ouverture.

L’évolution des besoins du marché

Les attentes des employeurs ont évolué : les confrères acceptaient facilement, il y a encore 20 ans, l’idée de compléter la formation de leurs futurs collaborateurs par une forme de compagnonnage, qui tend à disparaître. On exige ainsi des écoles qu’elles forment des vétérinaires directement opérationnels, dans tous les secteurs d’activité et malgré une augmentation exponentielle des connaissances et des techniques que les étudiants sont amenés à maîtriser. Des compétences nouvelles ont été ajoutées, par exemple en NAC2 et animaux exotiques, en gestion et management, en communication et relation client, etc. Encore une fois, les écoles tentent de relever le défi et de résoudre cette forme de quadrature du cercle, dans un contexte où il est impensable de rallonger davantage la durée des études, qui sont les plus longues au sein de l’Europe vétérinaire.

Le développement de la recherche

Longtemps largement absentes du paysage scientifique français, les écoles vétérinaires se sont fortement remises en question et s’insèrent aujourd’hui dans le concert de la recherche. Les équipes de recherche se sont structurées, les unités mixtes se sont diversifiées, en intégrant très vite l’approche santé globale (One Health) qui prévaut aujourd’hui, en amenant les enseignants-chercheurs à mieux organiser leurs différentes activités, et les CHUV à intégrer de nouveaux métiers (assistants et praticiens hospitaliers) pour libérer du temps pour la recherche, tout en maintenant la qualité des soins et de la formation des étudiants.

L’impact de la génération Y

Last but not least, les étudiants eux-mêmes ont amené les écoles à revisiter leur modèle pédagogique. Quel que soit le crédit qu’on apporte à la théorie des générations X et Y, il est certain que les étudiant(e)s d’aujourd’hui ont changé. Le numérique et les réseaux sociaux font partie de leur quotidien, leurs exigences ne sont plus les mêmes, non plus que leurs aspirations. Nos enseignants s’y sont préparés et, là encore, se sont adaptés. Il faut saluer le courage et l’abnégation dont ils font massivement preuve, tant il est plus facile de camper sur un modèle ancestral de cours magistral dans un amphi aux trois-quarts désert.

Seules les plus prégnantes des contraintes qui s’appliquent aux quatre écoles sont exposées ici. Il y en a d’autres, comme la nécessité d’une formation tout au long de la vie, l’augmentation très lourde du cadre réglementaire, l’insécurité et l’impact des attentats terroristes, etc. Le point commun reste la volonté permanente et la capacité des écoles à s’y adapter, portées par l’excellence et la passion que la profession vétérinaire a toujours sécrétées.

1 Centre hospitalier universitaire vétérinaire.

2 Nouveaux animaux de compagnie.

MARC GOGNY (A 79)

dirige l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA) depuis 2012. Il réalise sa carrière d’enseignant-chercheur à l’École nationale vétérinaire de Nantes (ENVN). Ses recherches portent sur la physiopathologie vasculaire, l’inflammation et la douleur. Passionné aussi par les sciences de l’éducation, il prône une approche pédagogique centrée sur l’étudiant et l’apprentissage. Européen convaincu, il devient, en 1999, diplomate de l’European College of Veterinary Pharmacology and Toxicology.
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