La réticence dolosive - La Semaine Vétérinaire n° 1698 du 30/11/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1698 du 30/11/2016

JURISPRUDENCE

ÉCO GESTION

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY 

Le jugement rendu par le tribunal d’instance de Mantes-la-Jolie (Yvelines), le 22 juillet 2016, concernant la vente de chats malades et la condamnation de l’éleveur professionnel pour réticence dolosive, est critiquable. Explications.

Un éleveur professionnel de chats de race maine coon, M. V, a vendu à Mme A six chats en l’espace de neuf mois. Deux premiers chatons ont ainsi été cédés en octobre 2014, deux autres en février 2015 et les deux derniers en juillet 2015. Chacun sera vendu au prix de 1 500 €. Mme A, cependant, ne s’acquittera que de la somme de 7 000 €.

Quatre des six chatons meurent entre octobre 2015 et février 2016. Un seul est autopsié et déclaré mort de la péritonite infectieuse féline. Mme A est persuadée que ces animaux étaient malades lors de la vente et que l’éleveur était parfaitement au courant de ce fait. Elle ne souhaite donc pas accepter d’arrangement autre que celui du remboursement intégral du prix de vente des quatre chatons.

Les arguments judiciaires

Mme A attaque principalement sur le fondement du dol. Selon elle, le vendeur savait qu’il cédait des chats porteurs du coronavirus et qui allaient forcément mourir de la péritonite infectieuse féline. Elle demande donc, sur ce fondement, l’annulation des six ventes, ce qui revient à restituer les deux chats encore vivants. Subsidiairement, elle argumente sur la garantie de conformité.

De son côté, M. V affirme que, n’ayant pas fait tester les chatons avant leur vente, il ne saurait avoir caché une information qu’il ignorait. Par ailleurs, Mme A renverse la charge de la preuve : c’est à elle de prouver que les chatons auraient été porteurs lors de la vente. Non seulement elle n’apporte aucune preuve en ce sens, mais les chats sont par ailleurs morts plusieurs mois après leur cession et la cause de la mort n’a été identifiée que pour l’un d’eux. À ce titre, il estime que sa garantie ne peut être engagée.

Le jugement rendu

Le tribunal d’instance de Mantes-la-Jolie (Yvelines) ne va pas répondre à l’argumentation du Code de la consommation. Il va cependant faire figurer dans son jugement le fait que rien ne démontre dans cette affaire que les chatons étaient porteurs du virus lors de leur cession. Un bon point pour M. V.

Le tribunal considère ensuite la question du dol. Surprise de taille cependant : il ne va pas juger que M. V a délibérément caché la maladie des chatons. Non, certes. Mais M. V va être condamné au motif que « le fait pour un éleveur professionnel de ne pas avoir informé l’acquéreur non professionnel des maladies fréquentes pouvant affecter les animaux vendus peut constituer une réticence dolosive 1 ». Partant de là, l’addition très salée tombe : le remboursement des quatre chats pour 4 600 € (savants calculs du magistrat correspondant au non-règlement intégral du prix de vente) et le paiement d’un préjudice moral à hauteur de 2 500 €.

Un jugement critiquable

Cette jurisprudence revient à dire que chaque éleveur doit détailler à l’acquéreur les maladies dont un chat est susceptible de souffrir. Faute de quoi et s’il arrive le moindre problème à l’animal par la suite, le vendeur en sera tenu pour responsable. De quoi faire bondir. L’éleveur doit-il à présent donner des conseils dans un domaine réservé au vétérinaire ? C’est aberrant. Certes, le vendeur professionnel doit bien délivrer un document d’information. Mais, en aucun cas, celui-ci ne peut empiéter sur le domaine vétérinaire. En outre, chacun des chatons vendus par M. V avait été cédé avec un carnet de santé qui énumérait les maladies fréquentes chez le chat.

La jurisprudence

Rappelons ensuite qu’ici les chats ont été cédés en trois fois. Il est donc plus que probable que Mme A avait déjà consulté un vétérinaire et qu’elle ne pouvait qu’être informée. Enfin, celui qui manque à son obligation d’information ne peut être condamné à réparer l’entier préjudice subi, mais seulement un pourcentage de celui-ci : telle est la jurisprudence.

En l’espèce, l’éleveur a relevé appel de la décision. On attend avec impatience la position de la cour, car si une telle jurisprudence devait perdurer, elle ferait grand mal à l’élevage félin français.

1 Silence gardé volontairement pour dissimuler au contractant un fait.

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