La vache et l’apprenti sorcier

Autrefois promue avec passion, l’industrialisation des productions animales n’est plus considérée d’un aussi bon œil et l’on aurait sans doute tort de minimiser l’expansion de cette vague de réprobation sociétale dont les médias se font volontiers le relais. À l’instar d’Animal Machine ¹ de Bernard Bloch, diffusé l’été 2015 sur France 5, le documentaire de Jean-Christophe Ribot, pour Arte, revient – pour l’interroger – sur la formidable envolée biotechnologique de l’élevage bovin dans la seconde moitié du xx^e siècle. Son principal mérite est de le faire de manière enlevée, parfois cocasse, sans ouvertement condamner. Les faits parlentd’eux-mêmes ; ils témoignent de la singulière hégémonie de la zootechnie dans sa course effrénée à la productivité des animaux. De cette mainmise depuis six décennies sur les productions, la reproduction et la génétique des bovins domestiques, Jocko-Besné est un exemple parmi d’autres. Pendant 16 ans – sans avoir sailli la moindre femelle –, cette star des taureaux, de race prim’holstein, a massivement distribué ses gènes dans plus de 60 pays, générant à lui seul un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros… ainsi que 400 000 vaches ! Cette arrogance démiurgique a également inventé en Argentine Rosita, une vache transgénique clonée pour produire du lait… humain. Si toute cette aventure technoscientifique est familière aux vétérinaires, la distance avec laquelle le film la récapitule ne peut qu’inciter la profession à méditer le fait d’y avoir quelque peu participé.
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^{1 La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 1/4/2016, page 50.}

Et L’homme créa la vache de Jean-Christophe Ribot, France, 2016, 55 min, le 19 novembre à 22 h 35 et le 29 novembre à 10 h 50 sur Arte.