Un appel à la création d’un secrétariat d’État à la condition animale

Le 18 octobre dernier, 23 scientifiques et intellectuels ont appelé à la création d’un secrétariat d’État à la condition animale¹. Soutenu notamment par Boris Cyrulnik (neurologue, psychiatre, éthologue), Matthieu Ricard (biologiste, moine bouddhiste) et Élisabeth de Fontenay (philosophe), déjà cosignataires en 2013 d’un manifeste pour un changement du statut juridique de l’animal, cet appel s’accompagne d’une pétition en ligne² adressée au Premier ministre, Manuel Valls. Ce projet a pour but, selon ses auteurs, d’initier de réelles modifications dans les rapports que l’homme entretient avec les animaux. « Chaque jour, de nouveaux travaux scientifiques montrent que les animaux sont sensibles et dotés de compétences. Ces nouveaux éclairages mettent en lumière un décalage flagrant entre des faits incontestables, le respect qui leur est dû et les décisions politiques et économiques qui bafouent leur bien-être. (…) Leur sort reste à la merci des souffrances utiles, des dérogations et des normes admissibles. La satisfaction des enjeux culturels et économiques continue de primer sur les intérêts des animaux », expliquent les signataires dans ce manifeste.

Le bien-être animal au sein de nos actions quotidiennes

Un tel secrétariat composé « d’experts multidisciplinaires et légitimes, spécialistes de la question » veillerait à ce que « le bien-être et les intérêts des animaux, comme les évolutions scientifiques en leur faveur, soient pris en compte au quotidien dans nos décisions politiques, économique s, juridiques, éducatives ». Les mesures concrètes envisagées par les auteurs de l’appel sont le développement d’alternatives à l’expérimentation et l’exploitation animales, le renforcement des contrôles pour lutter contre la maltraitance et des sanctions lors d’actes de cruauté, une refonte de la place accordée à l’animal dans l’éducation, la formation de policiers et de magistrats au bien-être animal ainsi que la mise en place de médiateurs veillant à faire appliquer les lois et, enfin, l’enseignement du droit animalier dans les universités.

La France en retard

La pétition a d’ores et déjà reçu plus de 15 000 signatures. Comment les politiques accueilleront-ils cette initiative ? Pour la journaliste Karine Lou Matignon, cosignataire de l’appel et directrice de l’ouvrage collectif Révolutions animales ³ édité au même moment, « les politiques ricanent moins que par le passé (…), la France réalise que cette problématique s’est imposée dans le monde entier et que nombre de pays avancent plus vite qu’elle ». La Belgique, qui dispose depuis juillet 2014 de trois ministres du bien-être animal (un pour chaque région), indépendants du ministère de l’Agriculture pour éviter les conflits d’intérêts, peut en effet être citée en exemple. De même, il existe 14 partis pour les animaux dans le monde, dont 11 en Europe parmi lesquels deux, aux Pays-Bas et en Allemagne, ont gagné un siège au Parlement européen en 2014.

Comme l’expliquait le politologue Melvin Josse lors du colloque « Animal politique » organisé à l’initiative de notre consœur et députée Geneviève Gaillard le 2 juin dernier à l’Assemblée nationale, le mouvement pour la protection animale bénéficie actuellement d’une forte dynamique. Ce colloque, qui a effectué un état des lieux de la condition animale, avait notamment pour objectif de rédiger, en commun avec 27 organisations nationales de protection animale, un manifeste qui devrait être présenté avant la fin de l’année afin de peser fortement sur les élections présidentielles et législatives de 2017. Espérons que ces initiatives permettront des améliorations significatives en matière de droit animal, nécessaires au vu de l’actualité récente.
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¹ bit.ly/2doeJ2k.

² bit.ly/2exWc8y.

³ www.revolutionsanimales-lelivre.com. Lire aussi page 64 de ce numéro.