Cytologie : les clés pour un prélèvement réussi - La Semaine Vétérinaire n° 1694 du 02/11/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1694 du 02/11/2016

SYNTHÈSE

PRATIQUE CANINE

Formation

La cytologie a de nombreux avantages. Elle nécessite peu de matériel. C’est une technique peu invasive, bien supportée par l’animal, qui n’exige pas de procédure lourde. C’est, par conséquent, un geste à la fois relativement facile à mettre en œuvre, peu risqué lorsqu’il est effectué dans de bonnes conditions, et peu coûteux. La fixation se fait à l’air après simple étalement. Il s’agit donc aussi d’une technique permettant d’obtenir une réponse rapide : immédiate si l’observation est faite au cabinet, en 24 à 72 heures pour un prélèvement envoyé, selon les laboratoires. Ces qualités en font un excellent outil d’investigation de première ligne, qui reste pourtant largement sous-utilisé. Le principal frein au recours à la cytologie est la crainte du prélèvement non diagnostique. Il existe deux causes principales à une telle réponse. Le prélèvement peut être riche et de bonne qualité mais non conclusif (environ 10 % des prélèvements reçus), par exemple lorsqu’une inflammation et des atypies coexistent. Dans d’autres cas, le matériel fourni est en quantité ou de qualité insuffisantes (de 5 à 25 % des prélèvements reçus, selon l’opérateur du prélèvement). Les principaux obstacles à un prélèvement diagnostique sont ainsi : l’absence de cellules d’intérêt, des cellules endommagées, un prélèvement trop épais, la présence de contaminant qui recouvre les cellules.

Quel type de prélèvement choisir ?

Plusieurs types de prélèvements sont utilisés en cytologie : ponction à l’aiguille fine, calque et raclage. De manière générale, la ponction à l’aiguille fine doit être privilégiée, car elle permet de s’affranchir de l’inflammation superficielle et donc d’avoir une image cytologique plus représentative de la lésion d’origine. Raclages et calques conservent leur intérêt pour identifier la présence d’agents infectieux, qu’ils soient la cause primaire ou, ce qui s’observe le plus souvent, un agent compliquant de la lésion. Ils peuvent également avoir une utilité dans le diagnostic des lésions érosives, de faible épaisseur (certains cas de suspicion de carcinome à cellules squameuses, lymphomes cutanés, par exemple), même si les résultats sont souvent décevants. Les calques de biopsie permettent, quant à eux, de disposer d’un premier diagnostic rapide dans l’attente des résultats de l’anatomopathologie.

Dans le présent article, le terme “ponction”, et non “aspiration”, est utilisé à dessein. En effet, dans la plupart des cas, il est préférable de carotter plutôt que d’aspirer. Outre le fait que l’aspiration augmente le risque de saignement, elle peut aussi endommager les cellules fragiles. Le carottage sera notamment privilégié pour la ponction des parenchymes fragiles, tels que les nœuds lymphatiques de diamètre suffisant (supérieur à 1 cm), la rate, le foie, le rein, le pancréas, les poumons, ainsi que pour les masses molles. L’aspiration trouve son intérêt, d’une part, dans la ponction des masses ou des organes de faible diamètre (inférieur à 1 cm) ou situés dans une région critique (à proximité d’une artère, par exemple), au sein de laquelle le mouvement de va-et-vient est difficile, voire impossible, ou représente un risque ; d’autre part et surtout, dans la ponction des masses fibreuses ou crissantes, ainsi que des tissus mésenchymateux (muscles, os), car les cellules y sont souvent piégées au sein d’une matrice (cartilage, ostéoïde, collagène, ou encore minéralisation dans certaines tumeurs) et se détachent difficilement. Lorsque les cellules sont particulièrement peu labiles, il peut même être intéressant de combiner carottage et aspiration.

Éviter une trop lourde contamination sanguine

Un peu de sang se retrouve sur la plupart des lames de cytologie, mais il importe d’essayer de le contenir dans des limites raisonnables. Le sang dilue les cellules d’intérêt sur la lame. Lors d’une ponction à l’aiguille fine, il lave les cellules d’intérêt hors de l’aiguille (vers le barillet), aboutissant à leur absence sur la lame.

Contrairement aux idées reçues, c’est la longueur du biseau et non le diamètre de l’aiguille qui augmente les chances d’obtenir un matériel diagnostique. Il convient donc de privilégier les biseaux longs et les faibles diamètres d’aiguille, car la capillarité est inversement proportionnelle au diamètre. Par ailleurs, une aiguille de gros diamètre augmente le risque de saignement. Une aiguille 23 G (bleue) est recommandée dans la plupart des cas, voire une aiguille 25 G (orange) pour les organes superficiels et chez le chat.

Le geste du carottage a son importance. Une fois la peau passée, le geste doit être franc pour éviter aux cellules d’intérêt de glisser à l’extérieur du biseau. Entre quatre et six allers-retours dans une même direction donnent généralement de bons résultats. Le changement de direction au cours du prélèvement augmente le risque de saignement, plus que les chances d’accroître le nombre de cellules d’intérêt. En revanche, il peut être intéressant de faire plusieurs prélèvements séparés (deux ou trois) dans différentes directions. Même sans aspiration, brancher une seringue sur l’aiguille offre un triple avantage : le piston décollé de 1 ml permettra d’expulser le matériel sur la lame sans attendre la fin du prélèvement, il sera possible d’aspirer un éventuel liquide inattendu et, point non négligeable, la seringue stabilise le geste. Une seringue de 5 ml est adaptée dans la plupart des cas, notamment si une aspiration s’avère nécessaire. Les seringues plus grosses sont moins maniables. Si un volume important de liquide est attendu, il est recommandé d’utiliser un robinet à trois voies et une extension, afin de permettre une vidange complète.

Lorsque l’aspiration est choisie, il est préconisé d’exercer une aspiration modérée, répétée pendant un laps de temps court. En pratique, il convient de décoller le barillet de 2 à 3 ml au maximum, pendant 1 à 2 secondes au maximum, en répétant le geste quatre ou cinq fois. Si du sang monte dans le barillet, le prélèvement est raté, aiguille et seringue doivent être jetées et le prélèvement renouvelé.

Lors des calques de biopsie, un élément clé est de bien éponger sur du papier absorbant le sang présent sur la tranche de matériel qui va être imprimé sur la lame. Lorsque la tranche est correctement épongée, elle colle d’elle-même à la lame quand on la dépose. Il suffit alors d’imprimer une pression ferme avec un très léger mouvement horaire-anti-horaire au fragment pour déposer des cellules d’intérêt sur la lame.

Obtenir des cellules d’intérêt

La particularité des masses crissantes ou fibreuses et des tissus mésenchymateux a déjà été évoquée plus haut. Aspiration et carottage, utilisés conjointement, sont généralement nécessaires.

Les masses tumorales de fort diamètre ont souvent un cœur nécrotique par défaut d’irrigation sanguine. Par conséquent, il convient de privilégier une ponction tangentielle de ces masses pour maximiser les chances d’obtenir des cellules identifiables.

Certaines masses sont cavitaires. Leur contenu, souvent liquidien, peut apporter des informations. Pour autant, le liquide cavitaire ne contient pas toujours des cellules d’intérêt. Il est donc avisé, dans la mesure du possible, de toujours effectuer une ponction de l’épaisseur de la masse, en identifiant bien les lames “épaisseur” et les lames “contenu”.

Un autre obstacle au prélèvement diagnostique est la présence de gras. Il peut être difficile de prélever certaines masses à cause du gras qui les entoure et qui empêche leur localisation précise. Or, il est impossible de distinguer avec certitude un lipome d’une aspiration accidentelle de graisse à la cytologie. D’où l’importance de l’anamnèse. Si les lames sont destinées à être envoyées, il est judicieux de préciser le phénomène suspecté et si l’animal est gras, ceci afin d’éviter un diagnostic de lipome, par exemple, sur un mastocytome enfoui dans la graisse.

POINTS FORTS

Eve Ramery Spécialiste en pathologie clinique, cytologiste pour Vetcyt.

Les éléments clés d’un prélèvement de qualité sont les suivants :
- ponction à l’aiguille fine, si possible ;
- aiguille 23 G à biseau long ;
- carottage pour les organes internes, les masses molles, les ganglions ;
- mouvement de va-et-vient de manière franche, répétée (environ cinq fois) dans une même direction (entrée lente dans la peau mais rapide dans l’organe) ;
- seringue pour stabiliser le geste ;
- carottage et aspiration concomitants
pour les tissus mésenchymateux et les masses de consistance fibreuse ou crissante ;
- aspiration tangentielle des masses de grand diamètre ;
- ponction du cœur et de l’épaisseur des masses cavitaires.

Cathy Layssol Lamour Praticienne hospitalière à l’ENV de Toulouse.

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