Brexit , oui, mais après ? - La Semaine Vétérinaire n° 1683 du 12/07/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1683 du 12/07/2016

DÉCRYPTAGE

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO 

Qu’est-ce que le Brexit ? Quelles seraient ses conséquences pour la profession vétérinaire ? Décryptage.

En décidant de sortir de l’Union européenne (UE), le Royaume-Uni a provoqué l’étonnement de certains de ses voisins européens. Plusieurs domaines impactés par cette décision concernent, de près ou de loin, la profession vétérinaire. De la réglementation autour du médicament vétérinaire à la formation, en passant par le bien-être animal, plusieurs scénarios restent possibles. Si le Brexit venait à se concrétiser, la profession vétérinaire ainsi que l’industrie pharmaceutique pourraient être impactées par les conséquences de ce retrait. Il semblerait toutefois que pour pérenniser ses relations commerciales avec le vieux continent, le Royaume-Uni n’ait d’autre choix que de se mettre en conformité avec la législation européenne. Des accords bilatéraux pourraient être négociés en ce sens. Mais quelles seraient les conséquences exactes du Brexit ?

Une idée pas si nouvelle

La sortie de l’UE est une option prévue par l’article 50 du traité sur l’Union européenne (TUE), qui dispose que « tout État membre peut décider de se retirer de l’Union ». L’idée du Brexit (contraction de British et Exit) n’est pas une surprise. En 2013 déjà, un référendum avait été annoncé par le Premier ministre britannique, David Cameron, sur le départ volontaire du Royaume-Uni de l’Union. Ce référendum a été lancé le 23 juin 2016 et les citoyens britanniques ont majoritairement opté pour le retrait.

Une sortie pas si rapide

Maintenant que le Brexit a été décidé, il convient de garder à l’esprit qu’il n’aura pas lieu immédiatement. En effet, l’article 50 du TUE prévoit que « l’État membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen. À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec cet État un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union ». Le même article 50 du TUE prévoit que « les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai ». Ce qui signifie que le Brexit devraitintervenir dans un minimum de deux ans. Il est cependant déjà possible de se pencher sur ses conséquences en pratique.

Le médicament vétérinaire

La législation européenne régit la vie du médicament vétérinaire, de sa conception à sa mise sur le marché au sein de l’Union. Le débat autour du projet européen sur les médicaments vétérinaires rappelle le rôle central des autorités européennes sur ce sujet. La British Veterinary Association (BVA) souligne d’ailleurs que le Brexit pourrait avoir des conséquences dommageables, car un régime spécifique serait nécessaire pour les médicaments vétérinaires fabriqués et commercialisés en Grande-Bretagne, avec, entre autres, une autorité de régulation dédiée au marché britannique. Cela supposerait la nécessité d’une autorisation de mise sur le marché spécifique, de même que des conditions particulières d’importation et de distribution de ces médicaments. De plus, il est possible de s’interroger sur les conséquences d’une telle décision sur l’approvisionnement et la disponibilité de ces produits, surtout en cas de retour des contrôles douaniers. Pour poursuivre ses échanges commerciaux avec l’Union européenne, il ne fait aucun doute que le Royaume-Uni serait amené à s’aligner sur les normes européennes. Mais quid des délais de mise en œuvre de ces dispositions et des spécificités éventuelles du droit national britannique ? L’industrie pharmaceutique, au travers de sa fédération européenne, l’European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations (EFPIA), alerte sur les conséquences du Brexit, en pointant un risque d’allonger les délais d’accès aux médicaments. Par ailleurs, l’influence de la Grande-Bretagne déclinerait en cas de déménagement du siège de l’Agence européenne des médicaments (EMA), actuellement situé à Londres.

Un nouveau siège pour l’EMA

Le mystère reste entier quant à l’avenir de l’EMA, dont le siège devrait être déménagé à la suite du Brexit. Le discours de l’agence se veut plutôt rassurant sur ce point. Elle rappelle en effet que son sort dépend des futures relations entre la Grande-Bretagne et l’UE et se refuse à toute spéculation. Pourtant, les candidatures ne cessent d’affluer des États membres. Après les fédérations des industries pharmaceutiques italienne, danoise et suédoise, c’est au tour de la France de se manifester, à travers les ambitions révélées de Lyon et de Strasbourg.

Antibiorésistance et pandémies

Une autre conséquence du Brexit concerne la lutte transfrontalière contre l’antibiorésistance et les pandémies, qui serait mise à mal. En effet, la législation européenne fixe les exigences minimales en matière de sécurité alimentaire, de santé et de bien-être des animaux. Les dispositions de la nouvelle loi de santé animale, récemment publiée, pourraient ainsi ne pas s’appliquer au Royaume-Uni. Ses mesures de prévention et de contrôle ne s’appliqueraient pas automatiquement. Leur mise en place exigerait en effet que les pouvoirs publics britanniques se mettent en conformité avec le droit européen, au travers d’accords signés avec l’UE, avec le risque que leurs délais d’application soient longs. Le constat est le même concernant la mise en œuvre des décisions européennes relatives à la lutte contre l’antibiorésistance. Rien n’indique cependant que les autorités britanniques compétentes prévoient des dispositions spécifiques.

La qualification professionnelle

En cas de Brexit, les étudiants français et britanniques désireux d’étudier respectivement dans des universités britanniques ou françaises pourraient être pénalisés. La législation européenne permettant la mobilité étudiante pourrait en effet être remise en cause. Première conséquence, les financements européens accordés aux universités britanniques pourraient être supprimés, privant de nombreux étudiants de soutiens importants via des programmes européens tels qu’Erasmus. Par ailleurs, la mobilité des jeunesFrançais pourrait être limitée puisqu’il serait nécessaire d’obtenir un visa et un permis de séjour pour résider au Royaume-Uni. Pour autant, le Brexit n’empêcherait pas l’accès des étudiants européens (dont français) aux universités britanniques, en dépit de démarches administratives probablement plus fastidieuses pour s’y inscrire. Une solution reste envisageable avec la signature d’accords spécifiques avec l’Union, comme c’est le cas avec la Norvège ou encore la Suisse, afin de pérenniser la mobilité étudiante.

La reconnaissance des diplômes

La fin de la reconnaissance automatique des diplômes délivrés au sein d’un autre État membre constitue une autre conséquence de ce retrait. En effet, la législation européenne prévoit actuellement la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, des diplômes, des certificats et autres titres vétérinaires obtenus au sein de l’un des États membres. Cette mesure permet à un vétérinaire français ou britannique de s’établir et d’exercer dans un autre État membre de l’UE. Au niveau européen, une directive permet aussi une harmonisation du contenu de la formation des vétérinaires et contient, entre autres, la liste des diplômes vétérinaires délivrés au sein de chaque pays membre. La sortie du Royaume-Uni pourrait compliquer l’établissement de vétérinaires français dans ce pays. Des accords bilatéraux seraient alors probablement signés entre le Royaume-Uni et la France pour maintenir un régime privilégié pour les étudiants français.

Lire aussi page 9 de ce numéro.

Le mystère reste entier quant à l’avenir de l’EMA, dont le siège devrait être déménagé à la suite du Brexit.
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