Pourquoi choisir l’externalisation - La Semaine Vétérinaire n° 1682 du 06/07/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1682 du 06/07/2016

DOSSIER

Auteur(s) : DOSSIER RÉALISÉ PAR FRANÇOISE SIGOT 

L’externalisation de certaines opérations est bénéfique pour l’entreprise vétérinaire, si elle est correctement évaluée et anticipée. Afin de limiter les risques, les conséquences de cette démarche doivent être maîtrisées. Le point.

De plus en plus de chefs d’entreprise confient certaines tâches à un ou plusieurs prestataires extérieurs, afin de se recentrer sur leur cœur de métier. L’externalisation n’a du bon que si elle est bien organisée en amont et suivie régulièrement. Alors que cette pratique a gagné les grosses structures depuis longtemps, elle fait progressivement son chemin dans les plus petites, notamment chez les professionnels libéraux. Désormais, la stratégie d’externaliser certaines fonctions n’est plus considérée comme l’apanage des grands. Ni forcément comme une perte de pouvoir. Aussi les sous-traitants s’adaptent-ils en proposant des solutions spécialement conçues pour les petites ou très petites entreprises et pour le secteur d’activité. Conséquence de cet engouement, les structures de taille modeste sont de plus en plus sollicitées. À en croire certains prestataires de services, tout pourrait être externalisé pour le plus grand bénéfice des donneurs d’ordres… En pratique, l’externalisation n’est positive que si elle est mise en place avec méthode et avec des garde-fous et que si elle apporte un réel gain à la structure. Ce type de démarche n’est pas sans risques.

Anticiper les risques de la sous-traitance

Le premier pas vers l’externalisation consiste à la préparer pour la réussir. S’interroger avec ses associés sur la valeur ajoutée d’un tel choix est la bonne méthode à suivre. Elle implique un changement d’organisation qui touchera l’ensemble des équipes. « La décision d’externaliser comporte une dimension technique mais aussi psychologique. Il n’est jamais facile de déléguer et encore moins de le faire auprès d’une personne extérieure », met en garde Rémy Meuleman, codirigeant du cabinet Five Conseil, spécialiste du conseil en organisation, accompagnant les dirigeants de très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME). Il s’agit d’un changement de culture qu’il conviendra d’appréhender pour le bon fonctionnement de la clinique ou du cabinet. « Le besoin de sous-traiter peut être éveillé par la difficulté que l’on a à recruter ou à trouver une personne fiable et compétente pour intégrer l’entreprise », ajoute le consultant. Toutefois, externaliser ne revient pas à perdre du pouvoir, mais simplement à l’exercer de façon différente. Une fois prêt pour se lancer dans cette démarche vient la phase de réflexion plus technique : quelles missions veut-on et peut-on externaliser ? « La porte d’entrée de l’externalisation est toujours l’activité la plus éloignée du cœur de métier », répond Rémy Meuleman. Difficile, dès lors, de ne pas considérer qu’au sein d’une clinique vétérinaire, nombre de tâches sont assez éloignées du cœur de métier…

Identifier les tâches à externaliser

« La bonne démarche est de se demander combien de fois par jour on a besoin de son comptable, de la personne qui entretient les locaux, de faire le point sur le contrôle de la radioprotection ou sur la gestion du parc informatique, mais aussi de l’encadrement de ses auxiliaires spécialisés vétérinaires (ASV). Sans oublier l’inverse : combien de fois par jour est-on sollicité par toutes ces personnes ? La réponse devient alors évidente », tranche Thierry Habran, docteur vétérinaire dirigeant fondateur de Vet Entreprise. L’entretien des locaux, la gestion de la radioprotection, la comptabilité et la paie figurent donc en tête de liste des tâches relativement faciles à externaliser. Pour autant, si un membre de l’équipe maîtrise particulièrement bien l’exercice d’un sujet “externalisable”, même très éloigné du cœur de métier vétérinaire, il sera peut-être plus pertinent de conserver cette activité en interne. Ce qui prime va être alors bassement matériel… Si le gain de temps, donc d’argent offert par la sous-traitance, est moindre que la gestion en interne, la question de l’externalisation ne se pose pas. Dans le cas contraire, mieux vaut consacrer plus de temps à ses clients et donc externaliser. Pour commencer, il est préférable de confier à un intervenant extérieur une tâche qui, si elle est mal prise en charge par celui-ci, ne sera pas de nature à mettre en péril l’entreprise. Beaucoup optent alors pour la radioprotection et s’en remettent à un sous-traitant pour l’ensemble des éléments réglementaires. « Pourquoi passer des heures à remplir des dossiers alors que, pour quelques centaines d’euros, il est aisé de trouver de bons prestataires », commente Thierry Habran.

Ne pas confier les missions à valeur ajoutée

Au-delà de la facture, l’externalisation suppose de s’interroger sur la valeur ajoutée des membres de l’équipe. Sans cela, nul doute que l’opération sera financièrement plus intéressante. Mais, même si les offres se bousculent pour proposer des services de prise de rendez-vous, est-il pertinent d’externaliser cette fonction ? Il convient donc d’évaluer l’intérêt du changement, notamment pour les professions libérales : « Les prestataires maîtriseront certainement très bien les règles de l’accueil téléphonique, mais ils n’auront pas forcément la culture du métier de vétérinaire, ni la connaissance du client. En sous-traitant cette tâche, le vétérinaire prend donc le risque que le service rendu au client soit un peu moins qualitatif », observe Rémy Meuleman. Or, tous les experts sont formels, mieux vaut éviter de voir un client insatisfait, surtout en période de crise. Le cœur du métier et l’ensemble de ce qui participe à apporter de la valeur ajoutée à ce dernier sont toujours mieux maîtrisés en interne. Il est toutefois possible de s’adapter. « Durant les gardes, les prises de rendez-vous peuvent être faites par un intervenant extérieur. Le client est en mesure de l’accepter et le vétérinaire peut ainsi se focaliser sur son métier et répondre aux urgences, et non pas au téléphone », précise Thierry Habran. Plutôt que de déléguer au mieux-disant, il semble opportun de négocier avec son prestataire un accueil téléphonique confié à une personne qui saura être suffisamment réactive pour gérer l’urgence, mais aussi prendre de la distance pour bien analyser les situations.

Savoir rédiger le contrat d’externalisation

De plus, le prestataire devra être à la hauteur de la mission. Le bouche-à-oreille est alors un bon allié pour dénicher la perle rare. Malgré tout, il est préférable de garder un œil sur ce qu’il fait et, par conséquent, de s’organiser en amont. Un contrat précis et écrit est donc nécessaire. « Externaliser, cela signifie qu’il faut quand même passer un peu de temps à vérifier ! », prévient Rémy Meuleman. Tout d’abord, il est essentiel de rédiger un cahier des charges. Ce document va lister tout ce que l’on attend de son prestataire et donc servir de base à la rédaction d’un contrat de prestations de services où il sera noté noir sur blanc la nature des tâches prises en charge par le sous-traitant, les moyens qu’il va mettre en œuvre pour les réaliser, les échéances à respecter et les modalités de contrôle. « Certains dirigeants ont l’impression, lors de cette étape, qu’externaliser sera plus chronophage que de conserver la tâche en interne. Il est bien évident que l’on n’aurait pas besoin de consacrer du temps à rédiger un cahier des charges si l’on n’externalisait pas, mais c’est précisément ce cadrage qui permet ensuite de gagner du temps pour se consacrer pleinement à son cœur de métier », fait observer le dirigeant de Five Conseil. Ce cadrage est surtout indispensable pour établir les responsabilités de chacun et, le cas échéant, pour pouvoir les rappeler à qui de droit. « En pratique, un bon sous-traitant devance cette étape et adresse à son prospect une proposition écrite sur mesure à partir des éléments que lui communique son donneur d’ordres. Cela permet donc, avant même de choisir, de se faire une bonne idée de la qualité et du sérieux de son futur prestataire », souligne Rémy Meuleman.

Réduire les risques de contentieux

Cette étape est également l’occasion d’engager la négociation sur des bases claires, pour définir ensemble le contrat de prestations. En plus de détailler les missions incombant au sous-traitant, ce contrat fixe les tarifs, y compris si ce dernier est amené à évoluer. Par exemple, il convient donc de prévoir avec son comptable le coût de la feuille de paie supplémentaire. « Plus les modalités du contrat sont précises, plus l’on diminue le risque de litige », fait valoir le spécialiste de l’organisation. Ces précautions ne sont toutefois pas suffisantes pour laisser son prestataire agir sans aucun contrôle. « Notre comptable nous fait un reporting d’activité tous les mois », explique Thierry Habran, lequel a justement choisi de ne sous-traiter qu’une partie de ses opérations de gestion pour conserver la maîtrise de son activité. « Nous maintenons en interne le suivi de notre activité afin d’en garder une vision précise. » Chaque facture arrive donc directement à la clinique où elle est visée et enregistrée avant d’être numérisée et ainsi partagée avec le comptable. Une organisation simple à mettre en place. La plupart des éditeurs de logiciels de gestion proposent aujourd’hui des outils de partage d’informations à distance.

La responsabilité du donneur d’ordres

Même si un contrat permet de bien encadrer la pratique de l’externalisation, les pièges existent. Le donneur d’ordres reste responsable des conséquences d’un acte réalisé par son prestataire. Autrement dit, si ce dernier multiplie les erreurs sur une fiche de paie, le salarié se retournera contre son employeur et non pas contre le prestataire. Même si, à son tour, le donneur d’ordres est en droit de demander des comptes à son sous-traitant. Ce genre de litige est souvent très long et très coûteux. Pour les éviter, un contrat précis est une première arme. Un suivi régulier en est une autre. « Lorsque l’on sait que son travail sera vérifié, on a toujours t endance à s’appliquer davantage », lâche Rémy Meuleman. Même quand on sous-traite pour s’affranchir d’une mission que l’on maîtrise mal, il ne faut surtout pas laisser penser que son prestataire a carte blanche. Il ne s’agit pas de scruter à la lettre l’ensemble des taux d’une fiche de paie, mais déjà de demander, en amont de la signature d’un contrat d’externalisation, quelques explications sur la façon dont il va prendre en charge la mission confiée, et les moyens qu’il va y consacrer. « Les réponses du style “Vous ne pouvez pas comprendre” ou les argumentaires fondés sur une kyrielle de termes de jargon ne laissent rien présager de bon. Un prestataire compétent est capable de se mettre au niveau de son client », tranche le dirigeant de Five Conseil.

Les clauses du contrat à prévoir

Ce dernier recommande aussi de « privilégier des sous-traitants de taille équivalente à celle de votre structure ». Ainsi, les petites cliniques vétérinaires auront davantage d’écoute de la part de prestataires de la même importance. « Avoir une taille comparable permet de mieux se comprendre, et donc d’être plus performant », est convaincu Rémy Meuleman. Enfin, avant de signer un contrat, il convient d’être vigilant sur certaines clauses. « Ceux prévoyant une tacite reconduction ou une clause obligeant le donneur d’ordres à dénoncer un contrat plusieurs mois avant son terme sous peine de pénalités de retard, de surcroît, sont à fuir », estime Rémy Meuleman. Comme tout engagement, un contrat d’externalisation doit être souple et s’adapter à la vie de l’entreprise. Le dirigeant qui externalise doit aussi pouvoir rapidement changer de prestataire ou reprendre la main en interne sur une opération, s’il ne souhaite plus la confier à un tiers ou si cette solution s’avère plus rentable. Par conséquent, mieux vaut faire un point régulièrement pour vérifier si l’externalisation est toujours la solution la plus pertinente pour la structure.

DÉMATÉRIALISATION : LE CHOIX DU PRESTATAIRE EST ESSENTIEL

Souvent confondues, l’externalisation et la dématérialisation ont pourtant peu de chose en commun. La première vise à confier l’exercice d’une mission à un tiers extérieur à l’entreprise, quand la seconde consiste à remplacer les supports d’information classiques, autrement dit le papier, par le format numérique. Cette dernière est un service encore méconnu par certaines entreprises. Que faut-il numériser et pourquoi ? Avec qui le faire ? « Avant d’opter pour la dématérialisation, il importe de se demander quelle est la criticité de l’information que l’on souhaite dématérialiser. S’il s’agit d’un document dont on a besoin fréquemment, s’il doit avoir une valeur juridique, s’il doit être partagé par plusieurs membres de l’équipe. En fonction de l’objectif, on pourra choisir ou pas de dématérialiser et, surtout, de le faire avec des outils adaptés », estime Olivier Demilly, fondateur d’Odialis, cabinet conseil en dématérialisation. Car scanner une facture ou un ordre d’achat ne signifie pas dématérialiser, puisque la dématérialisation vise à en finir totalement avec le papier. Quels sont ses avantages ? S’affranchir d’envoyer par voie postale ses factures ou tout autre document important d’échange de données peut aider à accélérer les processus commerciaux et à diminuer les coûts. Par ailleurs, la dématérialisation assure une meilleure traçabilité des courriers et des documents et elle optimise la réactivité des équipes. Ce qui met aussi fin aux problématiques liées à l’archivage et au stockage des données papier. Enfin, la dématérialisation réduit l’empreinte carbone des sociétés puisqu’elle efface des opérations de transport. « On ne dématérialise pas pour dématérialiser », prévient Olivier Demilly. L’entreprise doit donc y trouver un bénéfice supérieur à celui du papier et, avant tout, s’assurer que les données externalisées seront bien archivées et resteront confidentielles. Aussi, le choix du prestataire est primordial.

Externaliser ne revient pas à perdre du pouvoir, mais simplement à l’exercer de façon différente.
Comme tout engagement, un contrat d’externalisation doit être souple et s’adapter à la vie de l’entreprise.
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