« Prendre conscience d’une responsabilité collective » - La Semaine Vétérinaire n° 1681 du 29/06/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1681 du 29/06/2016

ANTIBIORÉSISTANCE

ACTU

Auteur(s) : MICHAELLA IGOHO 

Un sondage Eurobaromètre récemment publié par la Commission européenne et un rapport sur la communication autour de l’antibiorésistance démontrent que cette problématique reste encore méconnue du grand public.

La lutte contre l’antibiorésistance est l’affaire de tous. C’est ce qui ressort des différentes initiatives prises aux niveaux européen et national, car la sensibilisation de l’ensemble des parties prenantes est indispensable à la réussite de ces actions. Si le sujet semble de plus en plus maîtrisé par les professionnels du monde médical et du monde animal, l’antibiorésistance apparaît encore peu connue du grand public en tant qu’enjeu de santé publique, de même que les contraintes propres aux acteurs de la santé animale.

Un public peu averti

Le 16 juin, la Commission européenne a publié un sondage Eurobaromètre1 sur l’usage et la connaissance des antibiotiques, qui témoigne notamment des lacunes du grand public sur le thème de l’antibiorésistance. L’enquête a été réalisée du 9 au 18 avril auprès d’environ 27 000 Européens. Une bonne partie des personnes sondées admet avoir recours aux antibiotiques tout en ignorant que ceux-ci ne tuent pas les virus. Certains patients les perçoivent encore comme des remèdes miracles et efficaces contre tout type d’infections. Les Français du panel (plus de 1 045) font tout de même figure de bons élèves, bien que 41 % d’entre eux (29 % n’ont pas donné la bonne réponse et 12 % ne la connaissent pas) ignorent que les antibiotiques ne sont pas destinés à lutter contre les virus. Autre point intéressant, ce sondage met en évidence le manque d’information et de sensibilisation concernant l’usage de ces médicaments et les enjeux liés. Toutefois, la France ne s’en sort pas si mal, avec au moins 50 % des répondants qui confirment avoir été informés que les antibiotiques ne sont pas automatiques. Les campagnes lancées en 2002 ont produit leurs effets, car une large majorité des Français interrogés admet connaître ce principe. La télévision reste le premier canal d’information, bien avant les professionnels de santé tels que les médecins.

Les problématiques en santé animale pas assez connues

Ce sondage souligne aussi la volonté des Français d’en savoir plus sur les liens qui existent entre la santé humaine, la santé animale et l’environnement. Cette préocupation arrive en troisième position des sujets pour lesquels ils souhaiteraient davantage d’information.

Au regard des résultats de l’enquête, une sensibilisation qui intégrerait les problématiques spécifiques du monde animal semble judicieuse. En effet, sur la question de savoir s’il est nécessaire de traiter ou non les animaux d’élevage avec des antibiotiques, les avis sont plutôt mitigés : près de 45 % des Français y sont favorables, tandis que plus de 40 % considèrent que ce traitement n’est pas le plus approprié. Ces chiffres peuvent révéler que les problématiques de l’antibiorésistance en santé animale ne sont pas assez connues. Près de 50 % des personnes interrogées dans l’Hexagone ignorent, par exemple, que la réglementation européenne interdit l’utilisation des antibiotiques pour la croissance des animaux d’élevage. Ces résultats attestent que la communication autour de la lutte contre l’antibiorésistance doit se faire selon l’approche One Health (“une seule santé”), comme l’ont d’ailleurs récemment précisé les ministres européens chargés de la santé et de l’agriculture2.

La force du concept “une seule santé”

L’Organisation mondiale de la santé (OMS), la Commission européenne, ainsi que le Conseil européen misent sur une communication axée sur le concept “une seule santé” pour sensibiliser le grand public. De même, la Fédération vétérinaire européenne (FVE) recommande et milite pour que ce sujet bénéficie d’une coordination internationale3. Cette dernière souligne, par ailleurs, le rôle actif du vétérinaire, dont les efforts ont permis dans certains pays, en France notamment, de réduire considérablement le recours aux antibiotiques sans affecter le bien-être des animaux. La FVE préconise, entre autres, de promouvoir une utilisation responsable des antibiotiques et une réduction des quantités utilisées en santé humaine, mais aussi animale. Elle estime, en effet, que ces leviers sont essentiels pour le maintien de l’efficacité de ces médicaments et la lutte contre les infections bactériennes chez les animaux et les humains.

Une communication à adapter

Au niveau national, cette implication de la profession vétérinaire a d’ailleurs été saluée par Jean-Yves Madec, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), le 23 juin, lors de la présentation d’un rapport sur la communication autour de l’antibiorésistance par le groupe de travail Intervisions.Ce document, intitulé Une communication responsable pour une mobilisation citoyenne contre l’antibiorésistance, a été remis à Benoît Vallet, directeur général de la Santé, et à Christian Brun-Buisson, délégué ministériel à l’antibiorésistance. Il met en exergue que les différentes campagnes nationales de sensibilisation, axées sur l’usage des antibiotiques, ciblaient quasi exclusivement la médecine humaine. Le groupe de travail ajoute qu’une communication autour de l’antibiorésistance ne peut ni ne doit être traitée uniquement dans la relation patient-médecin. Nouveauté intéressante et pas des moindres, les rédacteurs du rapport, Jocelyne Arquembourg et Antoine Andremont, recommandent alors d’unifier la problématique de l’antibiorésistance. Dans cet objectif, ils invitent les pouvoirs publics à développer une approche reposant sur « la prise de conscience d’une responsabilité collective qui concerne à la fois les usages en santé humaine, en santé animale et dans l’environnement ».

Diffuser et vulgariser les connaissances

Parmi les propositions figurent la nécessité de vulgariser le discours autour de l’antibiorésistance, qu’il s’agisse de la médecine destinée aux humains ou de celle pour les animaux. En effet, bien que le rapport cible davantage la santé des hommes, les acteurs du monde animal ne sont pas en reste. La campagne coordonnée les intègre et il est notamment proposé de recueillir les témoignages positifs sur les bons usages permettant de ne pas recourir systématiquement aux antibiotiques, notamment en thérapie animale ou encore dans l’alimentation des animaux d’élevage. Les éleveurs pourraient également être la cible de messages d’information et de communication sur l’antibiorésistance. À noter que, sur ce terrain, le ministère de l’Agriculture a déjà lancé une campagne à leur attention dans le cadre de la mise en place du plan ÉcoAntibio. Le rapport ne précise d’ailleurs pas comment coordonner ses propositions avec les mesures mises en œuvre, jusqu’ici, par la profession et par les autorités compétentes. Autre recommandation concernant les messages à privilégier, la nécessité que les explications données portent la dimension “une seule santé” et pointent aussi les risques de transmission animale.

1 bit.ly/2950r8k.

2 bit.ly/29c1X7U.

3 bit.ly/237LfdQ.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr