L’antibiogramme en questions-réponses - La Semaine Vétérinaire n° 1680 du 22/06/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1680 du 22/06/2016

DÉCRYPTAGE

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Auteur(s) : STÉPHANIE BEURLET 

La réalisation d’un antibiogramme répond à des critères cliniques, mais aussi, depuis le 1 er avril 2016, réglementaires. Au même titre que d’autres examens complémentaires, celui-ci nécessite des clés pour l’interpréter de façon optimale.

Quand réaliser un antibiogramme ?

L’antibiogramme est généralement indiqué en cas de suspicion d’infection bactérienne. Dans un grand nombre de cas, cependant, une antibiothérapie probabiliste, qui repose sur des arguments cliniques et sur les connaissances épidémiologiques bactériennes, est instaurée.

La réalisation d’un antibiogramme est :

- préconisée en cas de suspicion d’infection bactérienne sévère ou récidivante ;

- préconisée en cas de suspicion d’infection postopératoire ou nosocomiale (péritonite, plaie, implant) ;

- obligatoire dans toutes les situations si le praticien veut utiliser un antibiotique critique (céphalosporines de 3e et 4e générations et fluoroquinolones) visé par l’arrêté du 1er avril 2016. Le vétérinaire pourra néanmoins le prescrire avant d’avoir les résultats dans les situations d’infections aiguës pour lesquelles il existe des arguments cliniques, biologiques et épidémiologiques qui justifient ce choix. Il est nécessaire toutefois de réévaluer la prescription au bout de quatre jours au regard de l’évolution clinique et des résultats complémentaires disponibles.

Quand réaliser un ECBU ?

Pour une cystite simple non récidivante, non compliquée (sans cause sous-jacente ou prédisposante), le traitement peut être probabiliste. Dans tous les autres cas (pyélonéphrite, prostatite, cystite compliquée ou récidivante), l’examen cytobactériologique des urines (ECBU) doit être réalisé. La bactériologie de contrôle après l’arrêt du traitement n’est pas recommandée dans les cas de cystite simple, en revanche, elle l’est en cas de pyélonéphrite (cinq à sept jours après l’arrêt du traitement).

La bactériologie en cas d’otite externe est-elle utile ?

L’intérêt est limité si le traitement est un topique, car la concentration obtenue est très supérieure à celle testée pour les antibiogrammes standards. Il est néanmoins intéressant de connaître l’identification de la bactérie, dans la mesure où certains antibiotiques contenus dans les topiques auriculaires peuvent être inactifs sur certains germes : staphylocoques et Proteus mirabilis résistants naturellement à la polymyxine B, Pseudomonas aeruginosa naturellement résistant au florfénicol. La gentamicine possède un large spectre qui couvre bien l’ensemble des pathogènes impliqués dans les otites. L’utilisation des topiques contenant des quinolones est soumise à l’arrêté du 1er avril 2016 sur les antibiotiques d’importance critique, et la documentation par un antibiogramme prouvant qu’elle est la seule alternative thérapeutique est obligatoire. Lors d’otite rebelle ou récidivante, l’antibiogramme peut être intéressant pour adapter au mieux le traitement. Il est cependant indispensable, dans ce cas, de s’attacher à rechercher la cause sous-jacente de la récidive ou de la persistance des infections : allergie, corps étranger, défaut d’hygiène ou humidité des oreilles, hypertrophie des conduits, etc.

Une culture positive est-elle toujours le signe d’une infection ?

Un résultat bactériologique doit toujours être corrélé à la présence de symptômes ou de signes biologiques évocateurs d’une infection bactérienne : fièvre, inflammation neutrophilique, signes de sepsis, signes locaux d’inflammation (rougeur, chaleur, douleur) ou d’infections (suppuration, fistule, écoulement). En effet, dans certains cas, le clinicien peut se trouver face à une colonisation bactérienne ou à une contamination des prélèvements. L’abstention thérapeutique doit alors être privilégiée. Néanmoins, des situations particulières (animal immunodéprimé/ porteur de prothèses) justifient parfois un traitement.

Le germe identifié est-il toujours responsable des lésions ?

Il convient de vérifier si la bactérie identifiée est bien compatible avec la suspicion clinique. La peau, les oreilles, les muqueuses respiratoires hautes sont riches en flore commensale. Il importe donc d’interpréter avec précaution l’isolement de germes commensaux peu pathogènes issus de ce type de prélèvement (staphylocoques coagulase négative, corynébactéries, entérocoques).

Quel est l’impact du prélèvement sur le résultat d’un lavage broncho-alvéolaire ?

Lors de la réalisation d’un lavage broncho-alvéolaire, une contamination du prélèvement par les germes ubiquitaires éventuellement présents sur le matériel ou les germes commensaux de l’oropharynx peut survenir. Il convient donc de tenir compte, pour l’interprétation :


• des conditions préanalytiques du prélèvement : éviter l’intubation orotrachéale préalable au prélèvement et utiliser des techniques protégées et du matériel à usage unique ;


• des conditions analytiques :

- vérifier que l’examen cytologique est bien en faveur d’une inflammation d’origine bactérienne ;

- s’assurer que la culture quantitative est bien en faveur d’une infection bactérienne et non d’une colonisation, particulièrement en l’absence de signes d’inflammation neutrophilique. Le seuil est de 103 à 104/ml de lavage, selon les auteurs, mais il est fortement dépendant de la technique de prélèvement. Il est nécessaire de pratiquer des méthodes de prélèvement (même technique et même opérateur si possible) et de cultures bactériologiques standardisées (même laboratoire). Il n’existe cependant pas de recommandations consensuelles vétérinaires à ce jour.

Et lors de bactériologie des urines ?

Le prélèvement d’urines peut être contaminé. Sont donc à prendre en compte, pour l’interprétation :


• la présence d’une leucocyturie au culot urinaire ;


• la numération semi-quantitative standardisée, qui détermine les seuils d’interprétation en fonction de la méthode de prélèvement :

- miction spontanée : 105/104 colonies/ml ;

- cathétérisme urétral : 104/103 colonies/ml ;

- cystocentèse : 103/102 colonies/ml.

Quel antibiotique choisir ?

Le choix de l’antibiotique découle :


• de la sensibilité du germe à l’antibiotique : il importe de privilégier un antibiotique rendu “sensible”, pour lequel on s’attend in vivo à une sensibilité du germe à l’antibiotique ;


• de l’activité bactéricide ou bactériostatique de l’antibiotique : en cas d’infections graves ou sévères, un antibiotique bactéricide doit être privilégié ;


• des éventuelles synergies entre deux antibiotiques, en particulier en cas d’infections graves ;


• de la diffusion optimale de l’antibiotique au site de l’infection (pharmacodynamie), qui dépend :

- des formes galéniques disponibles : éventuelle résorption orale de l’antibiotique si celui-ci doit être donné par voie orale, topique, injectable ;

- de la diffusion tissulaire de l’antibiotique : certains antibiotiques ne vont pas être présents à des concentrations suffisantes dans des sites comme la prostate, l’œil, l’os ;

- de l’activité intracellulaire de l’antibiotique en cas de localisation intracellulaire des germes ;

- de l’excrétion de l’antibiotique, notamment pour cibler des germes urinaires ou biliaires ;

- de l’organisation éventuelle des bactéries comme les staphylocoques en biofilm (notamment sur l’os ou les implants chirurgicaux) ;

- des conséquences de l’antibiothérapie sur l’écosystème bactérien : les antibiotiques critiques générateurs de résistance sont interdits s’il existe une alternative thérapeutique documentée par les résultats de l’antibiogramme.

les antibiotiques critiques sont interdits lors d’alternative documentée par les résultats de l’antibiogramme.
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