Nutrition des ruminants : fourrages et flore, fibres et panse - La Semaine Vétérinaire n° 1679 du 14/06/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1679 du 14/06/2016

CONFÉRENCES

PRATIQUE MIXTE

Auteur(s) : STÉPHANIE PADIOLLEAU  

Le thème principal des journées des groupements techniques vétérinaires, du 18 au 20 mai à Nantes (Loire-Atlantique) donnait des clés pour que les praticiens retrouvent les bases physiologiques de l’alimentation des ruminants et les liens entre alimentation et troubles de santé, mais aussi les éléments fondamentaux des aliments utilisés dans les rations (récolte et conservation des fourrages, qualité nutritive attendue), ainsi que des outils pratiques utilisables dans le diagnostic.

Alimentation de la vache laitière

Le raisonnement diagnostique s’applique de la même manière en alimentaire qu’en médical : c’est un bon moyen, pour un praticien, de gagner en assurance dans l’abord des troubles d’origine alimentaire. Il va s’agir de recueillir les signes (état des bouses, production laitière, hypocalcémie, taux protéique et butyreux du lait, etc.) et ensuite de remonter la chaîne d’hypothèses pouvant expliquer ces signes. Nourrir un ruminant, c’est d’abord nourrir sa panse : la flore représente 2,5 kg de matière sèche dans un volume ruminal de 150 à 200 l chez un bovin adulte. Nourrir un ruminant, c’est aussi connaître sa capacité d’ingestion et de digestion. La capacité d’ingestion volontaire d’une vache laitière varie de 1,5 kg de matière sèche par kilo de poids vif en fin de gestation à 4 kg au pic d’ingestion (8 à 12 semaines après le vêlage). La quantité ingérée est régulée par l’encombrement de la ration,la vitesse de vidange des pré-estomacs(elle-même dépendant de la composition de la ration) et la couverture des besoins en énergie.

Source : conférence de Christophe Rousseau.

Évaluer la qualité nutritive des aliments

Déterminer la valeur d’une ration demande un minimum de connaissances sur la production des fourrages, leur qualité nutritive attendue et les moyens de déterminer de manière simple la valeur réelle. L’utilisation des tables de valeurs nutritives types proposées par l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) est complexe (multiples entrées impliquant de bien connaître les fourrages) et ces tables proposent des moyennes, alors que les valeurs réelles sont beaucoup plus variables. La qualité de la conservation des ensilages peut s’apprécier en étudiant le silo (coupe, odeur, présence de moisissures, etc.). Il convient également d’évaluer la taille des fibres (qualité de la coupe). Un ensilage de maïs est idéalement récolté avec une teneur en matière sèche de 33 à 35 % pour des vaches laitières et de 35 à 38 % pour l’engraissement. À moins de 28 % (ensilage très humide au toucher), la valeur nutritive de l’ensilage est minorée (pertes par écoulement de jus), il est plus encombrant car moins tassé au moment de la récolte, et moins consommé. Au-delà de 38 %, l’ensilage est très fibreux, difficile à tasser, avec un amidon plus difficile à valoriser par l’animal.

Des outils pratiques et faciles à utiliser dans les élevages donnent des éléments intéressants : le tamisage (à l’aide du Penn State particle separator, ou tamis séparateur de particules) informe sur la composition physique ; la mesure du pH des ensilages et de la température des aliments, sur la qualité de conservation, les fermentations, etc. La représentativité de l’échantillon de fourrage analysé est importante : il est préférable de prélever en plusieurs endroits et à l’intérieur des silos et des bottes. Des analyses chimiques peuvent aussi être effectuées (spectrométrie dans le proche infrarouge, qui renseigne sur la composition chimique en éléments organiques).

Source : conférences d’Hervé Guedon, de Christophe Rousseau et de Francis Enjalbert.

Eau de boisson

Aucune exigence réglementaire n’existe concernant la qualité de l’eau d’abreuvement. Les bovins n’aiment pas les eaux très dures. Une eau chargée en fer perd de sa saveur, ce qui peut se traduire par une diminution de la consommation et donc de la production. Les nitrates ne passant pas dans le lait, ils ne présentent aucun danger pour la production.

Source : conférence de Mélanie Rioult.

Marqueurs et indicateurs chez la vache


Apprécier l’efficacité digestive

Plusieurs marqueurs peuvent être utilisés afin d’évaluer l’efficacité digestive. Le test Redox, ou test au bleu de méthylène, consiste à mélanger 20 ml de jus de rumen avec 1 ml de bleu de méthylène dilué à 0,03 %. Le mélange, bleu, doit retrouver la couleur initiale du jus de rumen en moins de 6 mn, voire moins selon le stade de production : de 1 mn 30 à 3 mn pour les laitières en lactation (flore amylolytique favorisant la synthèse d’acides gras essentiels) et de 3 à 5 mn pour les taries et les allaitantes (flore mixte). À moins de 1 mn 30, la flore est trop rapide, représentant un risque d’acidose chronique ; à plus de 10 mn, cela indique une maldigestion. L’analyse des bouses se fait grâce à une passoire ou à l’aide d’un outil plus onéreux, le Digest Test Cargill®. Dans le premier cas, 100 ml de bouse fraîche sont prélevés et rincés sous l’eau dans une passoire. S’il reste moins de cinq grains de maïs et aucune fibre de plus de 5 mm, la digestion ruminale est bonne. Des grains de maïs entiers sont la conséquence d’un mauvais réglage de l’ensileuse. Le Digest Test (même principe, mais avec trois tamis) est adapté à l’analyse dans un troupeau (2 à 3 l de mélange). Il convient, dans les deux cas, de prévoir 25 à 30 mn par lot d’animaux.

Source : conférences d’Émilie Knapp et de Christophe Rousseau.


Marqueurs nutritionnels

Le praticien dispose de plusieurs indicateurs qui sont soit observés et enregistrés (note d’état corporel, résultats de reproduction), soit dosés, comme les acides gras non estérifiés (AGNE), les corps cétoniques, la progestérone, etc. Chacun comporte un seuil qui constitue un signe d’appel pour le praticien : la note d’état corporel montre si la ration est adaptée au stade de l’animal, une chute du taux butyreux oriente notamment vers une acidose subaiguë, etc.

Source : conférence de Marc Ennuyer.

Préparer l’avenir ruminant du veau


Avant le sevrage

La prise de colostrum est une étape importante qui influe sur les premiers mois de vie (transfert d’immunité passive). La production laitière de l’adulte est corrélée au gain moyen quotidien (GMQ) constaté avant le sevrage. L’objectif est de doubler le poids du veau pendant les 8 premières semaines (GMQ de 800 à 1 000 g/j). Un accès constant à de l’eau propre est nécessaire. Il peut s’avérer nécessaire d’expliquer aux éleveurs que l’augmentation de la consommation d’eau n’est pas la cause de diarrhée, mais la conséquence de la déshydratation. De petites quantités de concentrés distribuées dès la fin de la première semaine de vie stimulent la curiosité des veaux vers l’aliment solide, permettent la croissance de l’épithélium ruminal et stimulent les papilles, en apportant l’azote nécessaire à la flore ruminale. Un apport en fourrage de bonne qualité (dès la deuxième semaine de vie) favorise l’augmentation de volume du rumen et le développement des papilles ruminales, et stimule la musculeuse. Une future génisse laitière doit être capable de consommer de 1 à 1,2, voire 2 kg de concentrés pendant au moins 3 jours consécutifs pour pouvoir être sevrée. Cette consommation varie selon les races. En allaitant, un GMQ présevrage trop élevé n’est pas intéressant chez les animaux qui seront engraissés longtemps, contrairement aux futurs taureaux reproducteurs.

Source : conférences de Sébastien Buczinski et de Bertrand Guin.


Affections digestives ou liées à l’alimentation

Des dyspepsies constatées autour du sevrage ont plusieurs origines. En élevage de veaux de boucherie, un trouble du comportement incite certains veaux à boire de l’urine. Celui-ci se transmet à l’échelle d’un lot et pourrait avoir comme origine un déséquilibre alimentaire, tel qu’en oligo-éléments, associé à de l’ennui ou à une baisse d’expression des comportements sociaux. Chez les veaux dont l’alimentation est strictement lactée (lait ou lactoremplaceurs), des fermentations se produisent dans le rumen en cas de défaut de fermeture de la gouttière œsophagienne et entraînent des retards de croissance. Plus rarement, lors d’un apport excessif en concentrés au moment du sevrage, une acidose ruminale est possible. Chez les jeunes de 3 à 10 mois, le syndrome d’accumulation de foin dans les pré-estomacs immatures est de moins en moins observé, alors que la météorisation chronique demeure fréquente, liée à une alimentation inadaptée (apport de fourrage insuffisant ayant induit un mauvais développement du rumen) ou à un sevrage trop brutal, ou encore lors d’anorexie temporaire (en cas de maladie). Des cas de volvulus s’observent chez des veaux de 1 à 6 mois, sporadiques, avec des signes généraux sévères. Les ulcères de la caillette sont également sporadiques, avec des signes généraux variables. Une autopsie oriente le diagnostic dans le cas d’ulcère ou de volvulus. Un examen bactériologique sur un segment intestinal conservé en anaérobiose confirme une suspicion de gastro- ou d’entérotoxémie.

Source : conférences de Bertrand Guin et de François Schelcher

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