Le potentiel toxinogène de souches de Stachybotrys issues de fourrages - La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016

CONFÉRENCE

Pratique mixte

FORMATION

Auteur(s) : Jean-Denis Bailly*, Marine Neveux**

Fonctions :
*Professeur à l’ENVT.
Article rédigé d’après une présentation
faite lors de la 42e journée de la recherche
équine à Paris, le 17 mars.

Le potentiel toxinogène de souches de Stachybotrys issues de fourrages a fait l’objet de travaux réalisés en partenariat entre l’unité mixte de recherche Toxalim, à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (Haute-Garonne), et le laboratoire de mycologie de Besançon (Doubs).

La microflore du fourrage

La microflore de fourrage sec est souvent très complexe : il existe une flore du champ, une autre de stockage et une dernière dite d’altération avancée. La proportion des souches dépend de la qualité initiale du fourrage et des conditions de stockage.

Stachybotrys

Stachybotrys est un genre fongique saprophyte tellurique avec un fort potentiel cellulotytique. Cette moisissure peut coloniser les fourrages. C’est une espèce hygrophile, donc son développement est toujours associé à une réhumidification du fourrage durant le stockage. Elle est connue comme potentiellement capable de produire plusieurs mycotoxines appartenant à la famille des trichothécènes macrocycliques.

La contamination par Stachybotrys est observée dans la paille, mais aussi dans le foin, car sa méthode de détection a été améliorée et en raison de l’usage de grosses balles de foin qu’il est plus difficile de stocker correctement.

Les symptômes chez le cheval

Stachybotrys peut être responsable d’accidents toxiques aigus chez plusieurs espèces animales, dont les chevaux. Les signes cliniques sont très variables : de la diminution des performances sportives à la mort des animaux en quelques heures. Généralement, le sujet présente une desquamation au niveau des naseaux et des ulcérations au niveau des muqueuses.

Les analyses biologiques peuvent révéler une leucopénie et une thrombopénie, ainsi qu’une élévation des γ-glutamyltransférases (γGT), des phosphatases alcalines et de la créatine kinase, en lien avec des douleurs musculaires et des anomalies de déplacement des animaux.

Souvent, les chevaux de sport sont repérés en amont. Parfois, ce sont les contrôles sanguins de routine qui attirent l’attention. Autre situation d’appel : il arrive qu’un animal meurt, puis plus aucun, puis un deuxième, car une nouvelle balle de foin mal stockée a été distribuée.

Traitement

Le seul traitement est d’arrêter l’exposition et de changer de foin. Les paramètres sanguins reviennent à la normale en quelques semaines.

Les espèces de Stachybotrys

Il existe deux espèces majeures de ce microchampignon : Stachybotrys chartarum et Stachybotrys chlorohalonata.

Les spores sont agglomérés. S. chartarum peut produire plusieurs mycotoxines : des trichothécènes macrocycliques, qui ne sont pas présentes avec S. chlorohalonata.

Étude

L’objectif de cette étude a consisté à analyser ces souches dans les fourrages. Vingt souches ont été utilisées et isolées d’échantillons de foin, à partir de cas cliniques pour la plupart. Ce nombre est trop faible pour tirer une conclusion épidémiologique, mais il apparaît que le quart nord-ouest de la France est plus fréquemment touché, en raison des conditions météorologiques et de la quantité de chevaux.

Parmi les souches qui contaminent les fourrages, environ 40 % sont des souches de S. chartarum. L’équipe de chercheurs a aussi montré qu’une proportion importante est très fortement toxinogène et capable de produire plusieurs trichothécènes macrocycliques en grande quantité lorsque les conditions sont favorables. L’analyse morphologique de ces souches a été réalisée sur trois milieux. Les profils de toxinogenèse sont variables selon les souches.

Prévention

Il convient donc de noter l’importance de sensibiliser les éleveurs à la qualité du stockage et du fourrage. Les années pluvieuses sont propices à la réhumidification de ce dernier.

Est-ce que l’utilisation d’un purificateur de foin pourrait limiter ce problème ? Cette précaution devrait être prise très trop, avant le développement du champignon. Les toxines, une fois présentes, résistent très bien à la chaleur.

POINTS FORTS

– Une étude montre, pour la première fois, que les fourrages peuvent être fréquemment contaminés par des souches fortement toxinogènes de S. chartarum.

– Cette contamination peut avoir des conséquences directes sur la santé animale et entraîner l’apparition d’intoxications aiguës chez les équidés qui y sont très sensibles.

– Il convient donc d’attirer l’attention des éleveurs sur la vigilance à accorder à l’égard des conditions de stockage des fourrages.

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