LE HORS-SOL ENSEIGNÉ DANS NOS ÉCOLES - La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1668 du 01/04/2016

Dossier

Auteur(s) : Lorenza Richard*, Nathalie Devos**

Les enjeux de la formation des productions hors-sol (monogastriques) dans les écoles nationales vétérinaires françaises sont multiples (économiques, sanitaires, etc.). Cette voie offre aux jeunes diplômés de belles opportunités, liées au rôle crucial de la profession dans les secteurs concernés. Les enseignements, certes disparates mais essentiels, sont conduits par un corps professoral soucieux d’attirer les vocations dans ces filières.

Peu d’étudiants vétérinaires connaissent les filières hors-sol en entrant à l’école et le nombre d’heures qui y sont consacrées est relativement faible comparé aux autres secteurs d’activité. Globalement, ces filières restent donc méconnues et, qui sait, certains élèves passent peut-être à côté d’une vocation prometteuse ! Le corps professoral doit se montrer déterminé et déployer des moyens pour former à ces postes. Des enseignants des quatre écoles vétérinaires françaises nous expliquent l’organisation de cet enseignement au sein de leurs établissements et leurs façons de motiver les étudiants à explorer cette voie.

  • 1 Référentiel d’accréditation officiel pour les établissements d’enseignement vétérinaire européens.

ONIRIS

PROPOS RECUEILLIS AUPRÈS DE CATHERINE BELLOC1, MILY LEBLANC-MARIDOR2 ET XAVIER MALHER3 L’enseignement en production et médecine des monogastriques d’élevage se décline, à Oniris, en :

• un enseignement théorique (cours magistraux et travaux dirigés) en 3e année, sous forme de deux unités de valeur pluridisciplinaires : production et médecine porcine et cunicole, d’une part, et production et médecine avicole et piscicole, d’autre part ;

• un enseignement clinique en 4e année, avec visites d’élevage, résolutions de cas cliniques, autopsies. Les confrères praticiens sont impliqués dans le coencadrement des visites d’élevage avec les enseignants et l’approvisionnement en cas cliniques ;

• un enseignement optionnel en 5e année dans le cadre de la dominante “animaux d’élevage” : audits d’élevages à problèmes, modules de certificat d’études approfondies vétérinaires (CEAV) et thèse d’exercice.

De plus, les CEAV des spécialisations en productions porcine et aviaire sont organisés à Oniris.

Le budget alloué nous permet de fonctionner. Si des enseignants-chercheurs (EC) spécialisés dans ces filières sont présents à Oniris, les moyens humains sont fragiles (deux postes d’EC à pérenniser notamment). La notion de masse critique est fondamentale pour assurer un enseignement et des activités de recherche de qualité, et répondre aux sollicitations de nos partenaires académiques et professionnels.

Les atouts d’Oniris sont :

• la localisation géographique de l’école au sein ou à proximité des zones de production, de recherche et de développement majeures ;

• le réseau de vétérinaires (praticiens et salariés des firmes pharmaceutiques ou d’autres structures) avec lesquels les EC collaborent en enseignement, recherche et formation continue, ainsi que pour leurs activités d’expertise qui assurent des points de chute pour des stages, notamment, et le coencadrement de thèses d’exercice.

ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE TOULOUSE

PROPOS RECUEILLIS AUPRÈS DE JEAN-LUC GUÉRIN1 ET GUY-PIERRE MARTINEAU2

Du côté de l’aviculture, l’activité à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT) s’est bâtie sur une forte synergie enseignement-clinique-recherche. C’est cela qui a permis de construire des actions en clinique sur des bases solides, dont profitent les étudiants de 4e et 5e années, et également le programme de résidence en pathologie aviaire, puisque nous avons un programme de résidence reconnu et actif au sein de l’European College of Poultry Veterinary Science (ECPVS). Cette reconnaissance est importante car elle nous permet de participer à des échanges de résidents et, ainsi, de faire du benchmarking entre les équipes européennes.

Au niveau international, la situation est extrêmement variable : des équipes très structurées et puissantes existent dans les facultés d’Europe du Nord, alors qu’une impasse totale est assumée dans d’autres universités. Cette hétérogénéité peut être problématique si les étudiants de ces établissements ne se voient pas offrir la possibilité d’aller se former en stage ou en échange dans les structures compétentes.

L’enseignement hors-sol des monogastriques est organisé de la façon suivante, à Toulouse :

En 1re année sont dispensés des enseignements sur les bases de la production aviaire et porcine dans le monde, en Europe et en France : aspects politiques, économiques, sociétaux et zootechniques.

En 2e année, un module d’enseignement intégré de la production et de la pathologie des porcs, des volailles et des lapins intègre un cursus de trois semaines à temps plein qui recouvre, dans un format condensé, tous les enseignements spécifiques, y compris les maladies réglementées.

En 4e année, la clinique est à l’honneur avec des cours sur la médecine de population, l’approche diagnostique autour de cas réels en élevages (cas référés et audits) et la formation à la médecine factuelle.

Enfin, en 5e année, un parcours de formation en aviculture ou en production et pathologie porcine est proposé aux étudiants : le programme est défini en début d’année avec chaque étudiant, pour associer des modules d’enseignement (de CEAV, etc.), des stages et la préparation de la thèse. En aviculture, un stage à l’international est maintenant systématiquement proposé dans ce parcours.

Le budget qui est alloué à cette formation provient largement de la taxe d’apprentissage versée par les organismes professionnels et les entreprises vétérinaires.

Les atouts de la production hors-sol à l’ENVT sont de plusieurs ordres :

• la constitution d’une équipe dédiée aux filières avicoles et porcine ;

• la reconnaissance acquise par l’équipe de l’ENVT auprès des vétérinaires praticiens ;

• des vétérinaires praticiens agissent comme relais pédagogiques et formateurs (“win-win”).

En revanche, la reconnaissance des praticiens est dépendante de l’expertise de l’EC et ne peut donc pas être déléguée.

Enfin, les limites de cet enseignement résident en majorité dans la logistique des déplacements en élevages pour les étudiants.

ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT

PROPOS RECUEILLIS AUPRÈS DE PASCAL ARNÉ1, YVES MILLEMANN2 ET KARIM ADJOU3

Au niveau de l’enseignement initial concernant les filières hors-sol, au regard des critères de l’Association européenne des établissements d’enseignement vétérinaire (A3EV1), l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA) a “réussi” son examen en avril dernier. Elle est désormais “approuvée conditionnelle”. Les critères relatifs aux filières hors-sol sont toutefois satisfaits de manière minimale. Par ailleurs, l’enseignement dispensé répond aux exigences du référentiel de diplôme (ISO 9001 V2008). Soulignons que les enseignements dans ce domaine sont dispensés de manière transversale, tant sur le plan multi-espèces (porcs, volailles) que sur celui de la multidisciplinarité. Les aspects pratiques, en particulier, sont couverts grâce au centre d’application de Champignelles, situé dans l’Yonne, dans des conditions parfois difficiles : augmentation de la taille des groupes liée notamment à l’accroissement du nombre d’étudiants admis, élevages distants de Paris (d’où l’intérêt du positionnement de Champignelles) et difficulté à recruter des enseignants dans la thématique monogastrique.

De plus, une formation continue peut être proposée à nos étudiants, avec le CEAV à Nantes (porcine et aviaire) et le diplôme d’écoles (DE) de pathologie aviaire à Alfort.

Le budget alloué à cet enseignement est intégré à celui du département des productions animales et de santé publique (DPASP) et du centre de Champignelles. Il permet d’assurer les enseignements théorique et pratique. Toutefois, le budget global est un peu « juste ».

L’une des premières forces de notre enseignement réside dans le fait qu’il est dispensé relativement tôt (fin de 2e année). Cela permet de conserver une initiation précoce des étudiants à l’option hors-sol et de les amener à ne pas s’autocensurer, donc à envisager aussi ces filières. Le second atout réside dans la place importante laissée à des enseignements pratiques, en particulier en élevages et au centre de Champignelles.

Par ailleurs, un parcours de 5e année option “rurale” est appelé “parcours industriel” : il est choisi, chaque année, par deux ou trois étudiants, qui peuvent notamment participer au DE de pathologie aviaire.

VETAGRO SUP

PROPOS RECUEILLIS AUPRÈS DE MARIE-ANNE ARCANGIOLI1, ALICE DE BOYER DES ROCHES2 ET DOMINIQUE LEGRAND

L’enseignement des filières hors-sol est dispensé de la façon suivante, à VetAgro Sup :

• en 1re année, enseignements de zootechnie par un EC de VetAgro Sup, avec sept heures de cours magistraux et huit heures de travaux dirigés, une heure de cours sur les techniques de contention des porcs et des volailles, une visite d’élevage de monogastrique avec présentation d’un compte rendu par les étudiants et un stage d’une semaine en élevage monogastrique. Ce volume horaire est suffisant pour donner une idée globale des particularités de ce type de productions en tronc commun ;

• en 3e année, enseignement théorique de pathologie porcine et aviaire, pour un total de huit heures, dispensé par les EC de l’ENVT spécialisés dans les deux filières hors-sol. C’est peu, mais nous n’avons pas les moyens en interne (ni en heures ni en personnel) d’assurer cet enseignement spécialisé. Les collègues connaissent ce cadre restreint et organisent leurs cours de façon à ouvrir l’esprit de nos étudiants vers cette activité ;

• en 4e année, enseignement clinique. En rotation, tous les étudiants partent une journée sur une visite d’élevage porcin et une visite d’élevage aviaire avec des praticiens spécialisés, motivés par le fait de pouvoir attirer les étudiants vers leur activité. L’intérêt est de leur montrer comment travaille la profession dans ce domaine, le type d’interventions et les relations clientèles qu’ils entretiennent. À cela s’ajoutent, ponctuellement, des consultations/hospitalisations/autopsies de volailles fermières de particuliers, encadrées par les EC de VetAgro Sup ;

• en 5e année (année d’approfondissement en productions animales ou mixte), les étudiants peuvent choisir de suivre une formation de médecine d’élevage des porcs et des volailles effectuée sur une semaine complète par deux EC de l’ENVT. Ils reçoivent également une formation pratique sous forme d’atelier avec techniques de prélèvement, euthanasie et autopsies des volailles, activité encadrée par un EC de VetAgro Sup et un praticien.

Côté budget, nous bénéficions des moyens permettant de réaliser ces enseignements et nous avons pu mettre en place, en 2014-2015, une meilleure compensation financière des éleveurs qui reçoivent nos étudiants de 1re année sur leur exploitation. Les interventions des praticiens et des EC de l’ENVT sont rémunérées, des crédits sont également alloués pour l’atelier volaille de 5e année. Le budget total est donc assez élevé, mais les baisses de dotations vont impacter le nombre de visites en 4e année.

Nous devons communiquer sur l’approche “médecine des élevages hors-sol” pour éveiller l’intérêt des étudiants et lever les a priori sur ce type d’élevage intensif. Le problème principal est le regard que les jeunes portent sur cette activité. Nous devons le changer et l’essentiel de nos actions est dédié à cela. Nous pouvons aussi les interpeller dès la 1re année, car, à leur arrivée, ils connaissent encore moins ce métier que celui de vétérinaire rural.

Faire plus est impossible sans un recrutement interne ou une mutualisation sur les établissements les mieux situés en matière de bassins d’élevages porcs et volailles et/ou ceux ayant des EC spécialisés en hors-sol.

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