Le risque anesthésique

L’important n’est pas la molécule choisie mais le protocole dans son intégralité et son adaptation à l’animal. La gestion de l’anesthésie est plus importante que la recette : « On peut tuer avec le produit le plus cher du monde et faire de belles anesthésies avec un produit ancien », souligne Luca Zilberstein, maître de conférences en anesthésiologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort. Pour diminuer le risque, il est très important d’effectuer un bon examen clinique qui permet de déceler les affections sous-jacentes. « Il ne faut pas se focaliser uniquement sur la race, mais plutôt sur l’individu : les races brachycéphales, au sens large, ne sont, a priori, pas plus à risque que les autres. En revanche, tous les chiens présentant de graves difficultés respiratoires sont indéniablement plus vulnérables que ceux qui n’en ont pas, argumente-t-il. Ainsi, un labrador avec une paralysie laryngée sera davantage à risque qu’un brachycéphale qui respire bien. La mortalité n’est pas liée à la race, mais à la maladie de l’animal. Un maine coon ou un sphynx sans cardiomyopathie n’aura pas plus de probabilité de mourir qu’un autre chat. »

Le risque anesthésique n’est pas non plus lié à l’acte chirurgical réalisé, mais toujours à la santé de l’animal anesthésié : un simple détartrage sur un chien de 18 ans représentera une anesthésie plus risquée qu’une intervention orthopédique très compliquée sur un jeune chien en pleine forme.

Réduire le risque cardiovasculaire

Le risque de mortalité pendant l’anesthésie est de 0,1 à 0,2 % chez le chien et le chat, avec un pourcentage plus élevé pour ce dernier, ainsi que pour les jeunes et les vieux animaux. Les causes de mort lors d’anesthésie sont à 60 % cardiovasculaires, à 30 % respiratoires et seulement à 10 % dues au rein, au foie ou à un autre organe. L’insuffisance hépatique ou rénale ne représente que 3 % des complications. « Notre principale préoccupation sera donc de réduire le risque cardiovasculaire. Pour cela, une association de produits dont les effets cardiovasculaires se compensent est privilégiée, poursuit Luca Zilberstein. On gardera à l’esprit qu’il n’y a pas de produit mortel, pas de produit sans risque et pas de protocole plus sûr qu’un autre, tout dépend de l’animal et de l’opérateur. Seule la surveillance diminue les probabilités, pas le produit. »

Contrairement aux idées reçues, la phase d’anesthésie est assez sûre, grâce aux moyens de surveillance mis en œuvre : la menace est bien plus importante au moment du réveil, où la surveillance est plus réduite. « Lors du réveil, les besoins en oxygène s’accroissent, car le métabolisme augmente rapidement. En cas de défaut d’oxygénation, les organes vitaux se retrouvent en hypoxie, mettant en jeu la vie de l’animal », précise Maud-Aline Chesnel, anesthésiste au CHV Atlantia (Nantes). « Attention, un animal peut respirer normalement et pourtant hypoventiler lors de chirurgie, ce ne sera visible que grâce à la capnographie », prévient Stéphane Junot, maître de conférences en anesthésie à VetAgro Sup. Enfin, « il convient de se rappeler que toutes les morts en salle d’opération ne sont pas des morts anesthésiques… », tempère Luca Zilberstein.