Des délégués formés mais surtout compétents - La Semaine Vétérinaire n° 1661 du 12/02/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1661 du 12/02/2016

MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE

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ÉVÉNEMENT

Auteur(s) : Michaella Igoho

Tout comme les visiteurs médicaux en santé humaine, les délégués vétérinaires devront bientôt satisfaire à des conditions minimums de qualification pour exercer leur métier.

La loi d’avenir reste un vaste chantier en construction, comme nous l’expliquions dans notre dossier1, fin 2015. Certaines de ses dispositions tendent à encadrer les pratiques commerciales dans le domaine du médicament vétérinaire à l’instar des dispositions relatives aux spécialités à usage humain. Aujourd’hui, c’est au tour des délégués vétérinaires, dont le niveau de formation sera aligné sur celui des visiteurs médicaux. Les nouvelles dispositions suivent notamment les recommandations d’un rapport de l’Inspection générales des affaires sociales (Igas), qui invitait à encadrer cette profession2. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) vient ainsi de rendre un avis3, publié le 18 janvier dernier, sur des projets de décret et d’arrêté relatifs aux conditions de qualification du délégué vétérinaire, parfois aussi dénommé délégué commercial, pharmaceutique ou médical. Désormais, il devra satisfaire à un niveau de connaissances et justifier de diplômes correspondants pour exercer ce métier. En effet, le projet de décret fixe le niveau de qualification et les domaines retenus ; le projet d’arrêté détaille, quant à lui, les diplômes correspondants.

Un bac + 2 au minimum

Les conditions inscrites dans ce décret imposent un niveau de qualification bac + 2 ou 120 crédits ECTS (European Credits Transfer System, système européen de transfert et d’accumulation de crédits). Aujourd’hui, les entreprises recrutent déjà majoritairement des délégués justifiant d’un niveau bac + 2 à dominante scientifique. En effet, dans la pratique, les laboratoires spécifient dans leurs offres que le poste requiert ce niveau minimum et une formation scientifique ou en biologie animale. Des connaissances du milieu de la santé animale sont demandées et constituent un avantage pour le candidat. La formation vente ou commerciale semble toutefois l’atout mis en avant.

Concrètement, avec le décret, un laboratoire ne sera plus autorisé à embaucher un délégué vétérinaire ne justifiant pas d’un niveau bac + 2. Mais pas que. En effet, le projet prévoit que le candidat doit posséder des connaissances scientifiques suffisantes. Les domaines retenus sont relatifs aux médicaments et à la médecine vétérinaires, ainsi qu’à l’élevage.

Des commerciaux non, des scientifiques oui

Interrogé à ce sujet, Olivier Debaere, de la Direction générale de l’alimentation (DGAL), indiquait, en novembre, dans nos colonnes4 que « seront visés les diplômes nationaux de l’enseignement supérieur agricole. La mesure la plus significative est qu’une personne uniquement titulaire d’un diplôme commercial ne pourra plus exercer cette activité. Il convient désormais de les compléter avec une formation dans le domaine de la biologie ». Dans son avis publié le 18 janvier dernier, l’Anses rejoint cet objectif. L’agence reconnaît qu’il est important que les délégués vétérinaires disposent de connaissances nécessaires relatives au médicament vétérinaire, à sa réglementation, aux conditions de son usage et de délivrance.

Le projet d’arrêté vient fixer une liste des diplômes, titres ou certificats nécessaires aux personnes qui font de l’information par démarchage ou de la prospection pour des spécialités vétérinaires, y compris des aliments médicamenteux. Les diplômes concernés devraient être répartis en trois catégories : les sciences (mathématiques ou encore chimie), les sciences de la vie et les sciences de la terre. Les formations commerciales seront exclues. Les délégués déjà en activité devront notamment compléter leurs connaissances par des formations en biologie. Il appartient également aux laboratoires de veiller à ce que les formations soient mises à jour, entre autres, en fonction des évolutions de la réglementation, de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) ou encore du résumé des caractéristiques du produit (RCP). Par ailleurs, les diplômes obtenus par les visiteurs médicaux spécialisés en santé humaine pourraient être aussi reconnus. Ainsi, un visiteur médical répondant aux conditions de formation prévues par la loi (au minimum bac + 2 validé ou titre homologué de visiteur médical) aura la possibilité de postuler à un poste de délégué vétérinaire. Il est toujours permis pour l’entreprise de proposer au candidat visiteur médical une formation complémentaire en interne. Cette disposition tombe à point nommé, alors que l’avenir de la profession est menacée avec plus de 9 700 emplois perdus en 2004 et 2015.

Une période transitoire

Des mesures transitoires sont prévues pour les délégués vétérinaires en activité au moment de la parution de la loi d’avenir, c’est-à-dire le 14 octobre 2014. Deux cas de figure sont possibles : soit ces derniers remplissent les conditions de diplôme retenues ou ont exercé pendant aux moins trois ans dans les 10 années précédant la parution de la loi, soit ils doivent suivre une formation professionnelle continue dispensée par un organisme de formation d’une durée de 50 heures dans les domaines du médicament et de la médecine vétérinaires. À ce stade, cette période transitoire ne vaut pas pour les délégués en activité à la date de parution des décret et arrêté. Ils devront se former dans les quatre ans qui suivent, soit jusqu’en octobre 2018.

Les laboratoires plutôt satisfaits

Arnaud Deleu, directeur des affaires économiques et de la formation au Syndicat de l’industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV), fait le point sur cette réforme à venir : « Nous partageons les ambitions de ces projets. Mais, bien avant cette réforme, les laboratoires formaient en interne leurs délégués vétérinaires. Ce référentiel de formation existe et s’appuie sur des blocs de compétences minimums. Nous nous accordons donc sur la nécessité qu’il y ait une qualification spécifique aux délégués vétérinaires, mais considérons que d’autres modalités que l’exigence du diplôme de formation initiale peuvent être retenues. Nous avons d’ailleurs proposé la création d’un titre de “délégué vétérinaire” avec une formation certifiante. » Dans cet objectif, un certificat de qualification professionnelle (CQP) pourrait être créé. Le SIMV engage actuellement des échanges à ce sujet au sein de la branche professionnelle représentée par l’Union5. Cette qualification permettrait aussi aux candidats, dont le diplôme n’est pas reconnu mais qui ont les compétences requises, de postuler aux différentes offres d’emploi. « Cela n’empêche pas les laboratoires de leur apporter les connaissances spécifiques à la santé animale et au médicament vétérinaire, précise Arnaud Deleu. Notre souhait était de permettre aux délégués actuellement en poste exerçant sans les niveaux de diplômes requis de ne pas perdre leur emploi. Cette dérogation est prévue dans le projet de décret. » Par ailleurs, lors des travaux autour de la loi d’avenir, le SIMV avait souhaité la reconnaissance des compétences des auxiliaires spécialisés vétérinaires (ASV) « qui, au vu de leurs expériences, peuvent informer sur le médicament vétérinaire ». Il s’agit de faciliter aux ASV l’accès au métier de délégué vétérinaire. « Ce minimum de formation bac + 2 ne doit pas les exclure, poursuit Arnaud Deleu. Imposer un diplôme minimum alors que des personnes possèdent les compétences n’est pas souhaitable. Ne pas les inclure dans ce projet signifierait que l’État met des barrières à la capacité d’embauche des entreprises. La composante économique de notre secteur doit être prise en compte. Or, sur cette question, les projets de textes se situent dans le prolongement de ce qui a été fait en santé humaine. »

  • 1 Voir La Semaine Vétérinaire nos 1647 et 1648 des 23 et 30/10/2015, pages 42 à 45.

  • 2 Rapport Igas de 2013 sur l’encadrement des pratiques commerciales pouvant influencer la prescription des antibiotiques vétérinaires : http://bit.ly/1KFB630.

  • 3 http://bit.ly/1Q91ncE.

  • 4 Voir La Semaine Vétérinaire nos 1649 du 6/11/2015, page 15.

  • 5 http://www.lunionccn.com.

POINT DE VUE DE BADRÉ CAMARA

« Dans les grandes lignes, les idées de la réforme sont bonnes. Je peux concevoir ce besoin d’aligner notre métier sur ce qui se fait en santé humaine, car il n’y a qu’“une seule santé”. Le fait que les délégués soient formés et au courant des évolutions de l’actualité peut rassurer les vétérinaires. De tels domaines précis et “pointus” nécessitent que l’information soit maîtrisée par les interlocuteurs et transmise de façon claire. Les laboratoires ont des attentes sur ce point. De manière générale, ils donnent l’impression que leurs exigences sont importantes lors des recrutements. Les laboratoires proposent déjà une formation initiale, afin que les délégués vétérinaires soient à niveau une fois sur le terrain. Ils ciblent principalement des profils scientifiques, avec notamment une bonne maîtrise de la pharmacopée vétérinaire. Finalement, plusieurs profils peuvent correspondre à ces exigences. Il ne faudrait pas cloisonner le métier, ce qui compte avant tout c’est la qualité de la formation plus que le diplôme. »

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