Les labos jouent au jeu des chaises musicales !

Ça bouge au sein de l’industrie du médicament vétérinaire ! Alors que la rumeur courait déjà depuis plusieurs semaines, le laboratoire pharmaceutique français Sanofi a annoncé, le 15 décembre dernier¹, entamer des négociations exclusives, en vue de céder Merial, valorisée à 11,4 milliards d’euros, sans compter la somme de 4,7 milliards d’euros que versera par ailleurs Boehringer Ingelheim.

En janvier 2015, Elanco annonçait finaliser son rachat de Novartis Santé animale. Quelque temps auparavant, Ceva et Sogeval se rapprochaient, afin de créer un nouveau leader mondial. Retour sur ces rapprochements plus ou moins surprenants, qui redessinent le paysage du marché du médicament vétérinaire.

Un nouvel acteur en santé animale

Dès novembre 2015, Sanofi envisageait la cession de Merial comme une option stratégique à court terme et considérait, s’agissant de la santé animale, que « les synergies qu’il est possible de dégager avec les autres activités de Sanofi restent limitées ». En contrepartie de cette cession, le groupe devrait racheter l’activité “santé grand public” du laboratoire allemand Boehringer Ingelheim, estimée à 6,7 milliards d’euros. La finalisation de la transaction Sanofi-Boehringer Ingelheim est envisagée au quatrième trimestre de 2016. Si cette dernière aboutit, le rapprochement des deux laboratoires impulsera la naissance d’un deuxième acteur mondial du marché de la santé animale, avec un chiffre d’affaires estimé à 3,8 milliards d’euros en 2015. Les portefeuilles de Merial dédiés aux animaux de compagnie et aux volailles viendront alors compléter l’expertise de Boehringer Ingelheim dans les porcs. Sanofi annonce que « la fusion des portefeuilles et des plateformes technologiques dans le domaine des antiparasitaires, des vaccins et des spécialités pharmaceutiques positionnerait la nouvelle entité sur les principaux segments de croissance du marché de la santé animale ». De quoi bouleverser les règles du jeu des chaises musicales, au niveau mondial, dans le trio de tête Zoetis, MSD Santé animale (Merck & Co) et Merial (Sanofi)². Ce rapprochement permettrait au couple Boehringer Ingelheim-Merial d’entrer en lice pour être le leader mondial du marché. À ce stade des négociations, il est difficile de connaître les priorités qui seront celles du laboratoire allemand, classé 6^e sur le marché mondial de la santé animale. Ce qui est certain, c’est que l’entreprise, dont l’activité “santé animale” représente 8 % de son chiffre d’affaires, compte rester « très engagée dans le développement de solutions innovantes pour les vétérinaires et propriétaires d’animaux. » a déclaré le professeur Andreas Barner, président du conseil de Boehringer Ingelheim.

Un échange de bons procédés

Sanofi ne perdrait cependant pas au change et deviendrait le leader mondial de la santé grand public, avec une part de marché mondiale estimée à 4,6 % et un chiffre d’affaires d’environ 5,1 milliards d’euros. « Cette transaction pourrait permettre à Sanofi de devenir un leader mondial du marché très porteur des médicaments sans ordonnance et d’adjoindre à son portefeuille des marques très reconnues », a déclaré Olivier Brandicourt, directeur général de Sanofi. L’activité “santé grand public” de Boehringer Ingelheim, dont le chiffre d’affaires devrait s’établir à 1,6 milliard d’euros pour l’exercice 2015, viendrait conforter la position de Sanofi sur ce marché en termes de produits et d’implantations géographiques (hors Chine). Le laboratoire au logo tricolore aurait accès à un nouveau portefeuille de marques phares dans les antispasmodiques, les troubles gastro-intestinaux (Dulcolax®), les vitamines, minéraux et suppléments, et les antalgiques, et atteindrait la masse critique dans les traitements de la toux et du rhume. En outre, son activité “santé grand public” connaîtrait une expansion significative aux États-Unis, en Europe, en Amérique latine et en Eurasie et permettrait au groupe d’être leader dans plusieurs pays et/ou catégories de produits.

Un secteur en ébullition

En 2011, Eli Lilly annonçait sa volonté de renforcer sa médecine vétérinaire. Sa division “santé animale”, Elanco, avait repris, à la même période, les activités vétérinaires de la société belge Janssen³. Le portefeuille cédé comportait une cinquantaine de produits pour les animaux domestiques et d’élevage. La même année, Pfizer rachetait Synbiotics⁴. Fin 2013, le laboratoire Ceva Santé animale faisait, quant à lui, l’acquisition de Sogeval. À la même période, le groupe pharmaceutique allemand Bayer finalisait l’acquisition de la division “santé animale” de Teva aux États-Unis, pour 145 millions de dollars. En 2015, Elanco⁵ déclarait finaliser l’acquisition de Novartis Santé animale, créant ainsi un nouveau leader mondial de la santé animale, pour un montant de 5,4 milliards de dollars. Cette opération est consécutive à l’achat par Elanco de Lohmann Santé animale en 2014. La cession inclut un portefeuille de près de 300 marques visant des produits thérapeutiques, des vaccins, des antiparasitaires, des antimicrobiens, des produits chirurgicaux, des enzymes et des produits liés à la sécurité sanitaire des aliments. Cette année 2016 pourrait réserver encore quelques surprises.

• 1 http://bit.ly/1P4xlCJ.

• 2 http://bit.ly/1j3LVha.

• 3 http://bit.ly/1J2tBTq.

• 4 http://bit.ly/1RLJ0Zn.

• 5 http://bit.ly/1wP4QxU.