UNE COMÉDIE “EUTHANASIQUE”

En peinture, les vanités sont un type particulier de nature morte qui souligne symboliquement l’éphémère de la vie humaine et la relativité des ambitions (pouvoir, honneurs, sciences et arts) face à la fuite du temps et à la mort. Une mort déniée par notre société, comme l’illustre le débat actuel sur l’euthanasie. En Europe, étonnamment, la Suisse a autorisé très tôt le suicide assisté. Dès 1942, année où elle légalisa également la prostitution. Le Vaudois Lionel Baier, auteur en 2013 d’une réjouissante comédie (Les Grandes Ondes), mêle ici avec pertinence et humour ces deux spécificités helvètes dans un huis clos pour trois acteurs.

Un vieil architecte malade arrive un soir de neige dans la chambre d’un motel désuet et déserté, qu’il a jadis construit. Décidé à en finir, il a fait appel à une association d’aide au suicide.

Confronté à l’accompagnatrice perplexe qui se présente à lui et au jeune prostitué immigré de la chambre voisine qu’il doit convaincre, comme l’exige la loi, d’être témoin de son suicide, il doit continuellement en différer la procédure. Au fil des dialogues, entre légèreté et mélancolie, se tisse entre les personnages un réseau de sensualité latente et de secrets qui pousseront chacun à rebattre les cartes de son jeu. L’habileté de la réalisation et de l’interprétation séduit, la fiction, pourtant, ne convainc pas. Comme si la grande maîtrise de l’écriture la retenait de se laisser déborder par la vie. Au risque de rendre l’exercice un peu vain.

La Vanité de Lionel Baier avec Patrick Lapp, Carmen Maura, Ivan Georgiev, Suisse-France, 1 h 15, sortie le 2 septembre 2015.