Décryptage
Auteur(s) : SABINE GIRARD*, CATHERINE ROY**
Fonctions :
*Auteur de la thèse (ENVA, 2015) : « Risques pour la femme enceinte liés à l’utilisation de médicaments pendant les exercices cliniques au sein du Centre hospitalier universitaire vétérinaire d’Alfort. »
**Expert ASN, commission radioprotection vétérinaire, formatrice PCR
Vrai. Le taux de prévalence de la survenue d’anomalie congénitale chez les femmes enceintes vétérinaires est de 7,2 % comparé à 5,9 % dans la population générale. Le risque de malformation congénitale est cinq fois plus élevé pour une vétérinaire enceinte amenée à réaliser entre une et dix radiographies par semaine, que pour celles qui n’en font pas1. Cette association statistique n’est pas retrouvée dans toutes les études sur l’impact de l’exposition professionnelle des femmes enceintes aux rayons ionisants. Il y aurait une augmentation modérée, mais non significative, du risque de malformation congénitale parmi les femmes travaillant plus de 45 heures par semaine2.
Faux. Seuls les médicaments de faible masse moléculaire, lipophiles et non ionisés traversent facilement le placenta. À titre d’exemple, la morphine, l’amoxicilline, le diazépam ont un passage élevé, à l’inverse de la dexaméthasone, du propofol et du furosémide. Pour qu’une molécule arrive au placenta, il aura fallu que la mère s’expose par une voie permettant à la molécule de se retrouver dans le sang. Il est donc primordial de se renseigner sur les molécules manipulées et de se prémunir d’une exposition selon les recommandations des fabricants.
Faux. Il y a un risque malformatif au cours de la grossesse si, d’une part, la femme enceinte est exposée à une molécule ayant un tropisme particulier pour un organe et que, d’autre part, le moment de l’exposition coïncide avec la période de sensibilité de cet organe définie par le calendrier d’organogenèse. Un agent exogène ne peut plus interférer avec la mise en place d’un organe si celle-ci a déjà eu lieu.
Vrai. Les barbituriques se sont avérés tératogènes et fœtotoxiques chez l’animal. La sécurité de l’exposition d’une femme enceinte à ces molécules n’est pas établie. Dans ce cadre, le principe de précaution s’applique.
Vrai. Si la plupart des études ne montrent pas d’association statistique significative entre l’exposition de la femme enceinte aux vapeurs de gaz anesthésique et une augmentation du risque de malformations congénitales, certaines montrent que le risque d’avortement spontané chez les femmes exposées plus d’une heure par semaine à des vapeurs de gaz anesthésique est plus de deux fois supérieur à celui encouru par les femmes non exposées1.
Faux. Certains laboratoires, commercialisant par exemple des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) vétérinaires, émettent des mises en garde à l’égard des femmes enceintes qui manipuleraient des comprimés.
Vrai et faux. La loi n’interdit pas l’accès d’une salariée enceinte à une salle de radiographie. Cependant, le Code du travail (articles D. 4152-5 et R. 4451-45) impose que les conditions de travail de la femme enceinte, après sa déclaration de grossesse, soient telles que la dose que l’enfant à naître risque de recevoir pendant la grossesse ne dépasse pas 1 mSv à l’issue de la grossesse. La réglementation oblige l’employeur à sensibiliser son personnel sur les risques concernant l’activité de radiographie tous les trois ans ou autant que de besoin (lors de l’arrivée d’un nouveau salarié). Cela doit être consigné dans le document unique de la clinique mis à jour tous les ans. Si le médecin du travail considère la salariée enceinte apte à effectuer des clichés radiographiques (fiche d’aptitude à l’appui) et si l’employeur l’a sensibilisée en amont sur les risques des rayons ionisants et met à sa disposition un dosimètre opérationnel à lecture immédiate (placé sur l’abdomen) en plus du dosimètre passif nominatif et des protections plombées classiques, alors, si la salariée vétérinaire le souhaite, elle peut continuer à effectuer des radiographies.
Vrai et faux. Une femme enceinte ne peut pas manipuler d’agents de chimiothérapie, quelle que soit la période de la grossesse, du fait de leur fort risque tératogène et reprotoxique. Cette interdiction fait d’ailleurs partie du guide de bonnes pratiques de cancérologie signé par les structures déclarant une activité de chimiothérapie auprès de l’Ordre. Si l’employeur n’a pas rempli ces obligations réglementaires, il pourra être tenu pour responsable en cas de problème.
Vrai. L’employeur doit procéder à l’évaluation des risques et la transcrire dans un document unique. Il évalue en particulier les conséquences éventuelles de ces risques sur la grossesse. Le médecin du travail est le conseiller de l’employeur concernant les risques professionnels des postes et les aménagements à proposer. En cas de nécessité médicale, l’employeur est tenu de proposer à la femme enceinte un autre emploi compatible avec son état, sans diminution de la rémunération.
Vrai. L’article D. 4152-3 du Code du travail stipule qu’il est interdit d’exposer une femme enceinte non immunisée à la toxoplasmose. Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un aménagement du poste à la salariée exposée à la toxoplasmose, il lui fait connaître par écrit, ainsi qu’au médecin du travail, les motifs qui s’opposent à cette affectation. Le contrat de travail de la salariée est alors suspendu jusqu’à la date du début du congé légal de maternité. La salariée bénéficie alors d’une garantie de rémunération pendant la suspension du contrat de travail, composée de l’allocation journalière de la Sécurité sociale et d’une indemnité complémentaire à la charge de l’employeur (le taux, les délais et les modalités de calcul de l’indemnité complémentaire sont déterminés par voie réglementaire). L’employeur peut être tenu pour responsable si l’une de ses salariées contracte la toxoplasmose, sauf s’il arrive à prouver qu’elle ne l’a pas contractée à la clinique… ce qui est quasiment impossible.
1 Shirangi A. et coll. Birth defects in offspring of female veterinarians. J. Occup. Environ. Med. 2009b;51:525-533.
2 Shirangi A. et coll. Maternal occupational exposures and risk of spontaneous abortion in veterinary practice. J. Occup. Environ. Med. 2008;65:719-725.
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