Quelle utilisation faites-vous des tests génétiques ?

Une valorisation du chien de race par les cartes ADN

FRANÇOISE LEMOINE Praticienne à Nantes (Loire-Atlantique).

Dans ma pratique spécialisée dans la reproduction, j’effectue beaucoup de cartes ADN. Il s’agit d’une carte d’identité génétique du chien, qui permet la filiation et la traçabilité de l’animal. Je la conseille aux éleveurs de ma clientèle. C’est une preuve qu’ils vendent des chiens de qualité et elle valorise le chien de race. J’utilise aussi les tests génétiques pour dépister les maladies dans une optique de sélection, afin de ne garder que les homozygotes sains pour la reproduction. La nature de ces analyses varie en fonction des races et des exigences des clubs qui les encadrent. Le dépistage des chiots avant la vente permet aux éleveurs d’attester la qualité de leurs animaux.

Dans la pratique généraliste du CHV, nous nous servons assez peu des tests comme diagnostic. Nous préférons des examens d’imagerie, comme, par exemple, une échographie pour rechercher une polykystose rénale. Les tests pourront parfois être utilisés en seconde intention pour confirmer l’origine génétique. En revanche, nous conseillons à tous les propriétaires de bergers à pattes blanches d’effectuer le dépistage du gène MDR1, car la connaissance du statut de l’animal permettra une meilleure prise en charge tout au long de sa vie.

Le test MDR1 avant un traitement à base d’ivermectine

PIERRE-ANTOINE GERMAIN Praticien à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie).

En tant que spécialiste en dermatologie, j’utilise principalement le test MDR1 lors de maladies nécessitant un traitement à base d’ivermectine ou de dérivés chez un animal appartenant à une race à risque. En ce qui concerne les dermatoses génétiques (ichtyose, nanisme hypophysaire, hyperkératose naso-plantaire, syndrome d’automutilation), le diagnostic est assez souvent clinique. Peu d’autres maladies se manifestent de la même façon. Le test sert alors plutôt de confirmation et parfois de preuve face à l’éleveur qui n’est pas toujours conscient du problème, surtout si la répercussion est uniquement cosmétique, comme dans l’ichtyose. Il pourra ensuite être utilisé pour déterminer les porteurs au sein de l’élevage et optimiser les accouplements afin d’éviter la naissance de chiots atteints. Les tests génétiques sont aussi requis par certains éleveurs pour sélectionner des caractères esthétiques précis, tels que la couleur, la longueur du pelage ou le caractère dilué. Les tests génétiques chez le chien trouvent aussi leur intérêt en pathologie comparée. Certaines affections, comme les ichtyoses, existent aussi chez l’homme. Leur étude chez le chien peut ainsi permettre d’orienter et de faciliter les travaux de recherche génétique chez l’humain.

Des outils de médecine préventive

PHILIPPE PILORGE Praticien à Rennes (Ille-et-Vilaine).

Au quotidien, j’effectue principalement du conseil pour interpréter les résultats des tests génétiques et, en réalité, peu de prescriptions de ceux-ci. En effet, cette interprétation nécessite un avis spécialisé et une connaissance approfondie des maladies concernées : âge d’apparition, mode de transmission, pénétrance du caractère…

En ophtalmologie, par exemple, la mutation du gène HSF4, responsable de cataractes, donnera une cataracte précoce chez le boston terrier, mais ne représentera qu’un facteur de risque de développer une des différentes formes connues chez le berger australien. Souvent, en ophtalmologie, la même mutation n’amène pas à la même conclusion en fonction de la race. Les tests génétiques constituent un outil révolutionnaire, puisqu’ils permettent de connaître le génotype d’un individu à un locus donné, mais ils restent en priorité un outil de sélection à la disposition des éleveurs. À l’avenir, nous pourrions imaginer une utilisation de ces tests dans un cadre de médecine préventive, mais cela devra concerner des affections soignables, nécessitera qu’un nouveau réflexe se généralise chez les praticiens et, enfin, que soit accessible un catalogue fiable de tous les tests disponibles, qui sont de plus en plus nombreux.