Les méningo-encéphalites non infectieuses du chien - La Semaine Vétérinaire n° 1631 du 22/05/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1631 du 22/05/2015

CONFÉRENCE

Pratique canine

FORMATION

Auteur(s) : Hélène Vandenberghe*, Kirsten Gnirs**

Fonctions :
*Diplomate ECVN, praticienne à la clinique Advetia (Paris)

Les maladies inflammatoires chroniques du système nerveux central, ou méningo-encéphalites non infectieuses, sont représentées majoritairement par quatre entités.

Épidémiologie et symptômes

• La méningo-encéphalite granulomateuse affecte majoritairement les races de chiens de petite taille (yorkshire, westie, chihuahua, etc.), jeunes adultes et adultes. La présentation clinique varie en fonction de la localisation des lésions (fosse postérieure, prosencéphale, voies optiques, méninges). L’analyse du liquide cérébrospinal (LCS) révèle généralement une protéinorachie et une pléiocytose mononucléée (lymphocytes, macrophages, plasmocytes).

• La méningo-encéphalite nécrosante affecte majoritairement les jeunes adultes de trois races : le bichon maltais, le carlin et le chihuahua. D’autres races, telles que le yorkshire et le pékinois, peuvent aussi être touchées. Les signes cliniques (convulsions, marche compulsive, pousser au mur, etc.) correspondent souvent à une atteinte prosencéphalique.

• La leuco-encéphalite nécrosante est décrite chez le yorkshire. Des lésions nécrotiques et inflammatoires sont retrouvées dans la substance blanche du prosencéphale et du tronc cérébral. L’âge d’apparition des signes cliniques est variable.

• La méningite suppurative aseptique affecte majoritairement les races boxer, bouvier bernois et beagle de jeune âge (moins de 18 mois). Les signes cliniques sont majoritairement méningés (fièvre, cervicalgie).

Diagnostic

Le diagnostic nécessite un examen d’imagerie (tomodensitométrie ou imagerie par résonance magnétique, IRM) et une analyse du LCS (par polymerase chain reaction pour la maladie de Carré et la néosporose) est recommandée afin d’exclure les causes de méningo-encéphalites d’origine infectieuse les plus fréquentes.

Traitement

L’approche médicale de ces différentes entités cliniques est proche, avec des réponses thérapeutiques variables. L’administration d’immunosuppresseurs (prednisolone associée à une ou plusieurs autres molécules) donne des résultats satisfaisants. Il convient de traiter tôt et souvent à hautes doses pour contrôler au mieux les signes cliniques et améliorer le pronostic.

• Lors de méningite suppurative aseptique, le mécanisme immunitaire met en jeu des immunoglobulines A, dont la concentration est augmentée dans le sérum et le LCS, et qui seraient impliquées dans les lésions vasculaires médiées par des immuns complexes. Il est recommandé d’administrer des anti-inflammatoires stéroïdiens (prednisolone, 2 mg/kg/jour initialement) éventuellement associés à de l’azathioprine, efficace sur les formes à médiation humorale (2 mg/kg/jour initialement, avec des contrôles par numération et formule sanguines réguliers pour prévenir le risque d’aplasie médullaire). Chez le boxer, la durée moyenne du traitement avant rémission est de 6 à 8 mois. Chez le bouvier bernois, le traitement est souvent administré à vie.

• Pour les autres entités, le mécanisme immunitaire à l’origine des lésions n’est pas élucidé à ce jour, et il n’existe pas de consensus sur la prise en charge médicale. L’administration de prednisolone à des doses immunosuppressives (2 à 3 mg/kg) est souvent la base de la prise en charge thérapeutique. Les effets secondaires sont fréquents. Une seconde molécule immunosuppressive peut être utilisée comme agent d’épargne et permet de diminuer les doses de corticoïdes administrées.

– La cytosine arabinoside (Aracytine®1) est une molécule antimitotique et immunosuppressive qui passe la barrière hémato-encéphalique. Deux modes d’administration sont décrits : des cycles de quatre injections sous-cutanées matin et soir toutes les 3 semaines puis toutes les 4 semaines, à la dose de 50 mg/m2 ou une injection par voie intraveineuse lente de 200 mg/m2 sur 48 heures. Le principal effet secondaire est une aplasie médullaire, rarement rapportée.

– La ciclosporine peut être utilisée à la dose initiale de 10 mg/kg/jour, en dehors des repas. Elle ne passe pas bien la barrière hémato-encéphalique, sauf lors d’atteinte inflammatoire. Les principaux effets secondaires rencontrés sont les troubles digestifs (vomissements fréquents), des toxicités hépatique et rénale.

– L’azathioprine (Imurel®1) est utilisée à la dose de 2 mg/kg/jour pendant 2 semaines puis 2 mg/kg un jour sur deux. Les effets secondaires les plus fréquents sont une myélosuppression, une hépatotoxicité et des troubles digestifs. Du fait que la plupart des auteurs s’accordent sur un trouble de l’immunité à médiation cellulaire, l’azathioprine semble peu appropriée lors de méningo-encéphalite granulomateuse ou nécrosante.

– La lomustine (Bélustine®1) est un agent de chimiothérapie qui peut être employé à la dose de 50 à 80 mg/m2 toutes les 4 à 6 semaines, avant diminution de la dose. Les principaux effets secondaires sont une myélosuppression, une hépatotoxicité et des troubles digestifs (gastro-entérite hémorragique).

– La procarbazine (Natulan®1) est utilisée à la dose de 25 à 50 mg/m2/jour. Du fait de la myélosuppression qu’elle engendre, des numérations et formules sanguines de contrôle régulières sont nécessaires.

– Le mycophénolate mofétil (Cellsept®1) est utilisé à la dose de 20 mg/kg toutes les 12 heures pendant un mois puis 10 mg/kg/jour.

– Le léflunomide (Arava®1) peut aussi être employé, mais son coût est parfois rédhibitoire.

Pronostic

La réponse clinique est variable. Les facteurs pronostiques sont difficiles à déterminer, avec des durées de survie différentes selon les études. Des variations semblent exister en fonction de la race. La méningo-encéphalite granulomateuse répond généralement mieux au traitement que la forme nécrosante. La localisation lésionnelle et les signes cliniques ne semblent pas influencer le pronostic. Certaines lésions IRM (telles qu’un effet de masse ou un engagement cérébral dans le foramen magnum) seraient défavorables. Pour la méningite suppurative aseptique, la mise en place précoce d’un traitement adapté favoriserait la récupération clinique. Pour les autres formes, une période critique de 3 mois est mise en évidence par plusieurs auteurs : si l’animal est toujours en vie au-delà de 3 mois de traitement, la probabilité de contrôle de la maladie au long court serait supérieure.

Suivi

Des contrôles cliniques et biologiques sont recommandés au minimum tous les 3 mois, même en cas de régression totale des symptômes. Outre la réponse clinique, il est en effet nécessaire d’évaluer les effets secondaires des traitements. Une numération et formule sanguines permet d’évaluer les effets secondaires des immunomodulateurs sur les lignées cellulaires sanguines. Une analyse du LCS est recommandée à chaque visite de suivi. En fonction des résultats, une diminution des doses de traitement peut être envisagée. Un suivi par imagerie n’est pas forcément nécessaire, sauf si les anomalies ne sont visibles qu’à l’imagerie et non révélées par l’analyse de LCS (comme lors de lésions parenchymateuses cérébrales pures, sans atteinte méningée). Lors d’échappement au traitement après diminution des doses, une prise en charge à vie est souvent indispensable. En cas d’effets secondaires ou d’insuffisance d’efficacité d’une monothérapie, une bi- voire une trithérapie sont envisageables. Le dosage des protéines de la phase aiguë de l’inflammation (sérum amyloïde A et protéine C réactive) permet d’évaluer l’efficacité du traitement et de prévenir les récidives cliniques lors de méningite suppurée aseptique. Une augmentation des concentrations sériques de ces derniers doit inciter à augmenter les doses administrées.

  • 1 Pharmacopée humaine.

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