Focus sur la DEP, le SDRP, les mycotoxines et les antibiotiques

Diarrhée épidémique porcine (DEP) : quel risque en France ? Comment s’y préparer ? Tel était l’angle développé par Béatrice Grasland (Anses de Ploufragan, Côtes-d’Armor) au sujet de cette maladie, lors des dernières journées de la recherche porcine (JRP), qui se sont tenues les 3 et 4 février à Paris. La conférencière a rapporté les résultats de simulations d’une introduction de la souche hyper­virulente qui circule aux États-Unis et au Canada sur notre territoire. Les simulations, réalisées par l’Anses de Ploufragan sous l’égide de Nicolas Rose, prennent en compte les six types d’élevage (naisseur, naisseur-engraisseur, naisseur-post-sevreur, post-sevreur, post-sevreur-engraisseur et engraisseur) répertoriés en Bretagne dans la base de données BDPorc, ainsi que les mouvements d’animaux entre ces élevages. Elles révèlent que sans mesure préventive (restriction de mouvements ou abattage), la diffusion de la maladie serait rapide (en l’absence d’immunité) : le pic épidémique de la maladie se situerait environ au 250^e jour après le premier cas, et environ 80 élevages pourraient être infectés par semaine. Deux autres scénarios envisagés (restriction de mouvements et/ou abattage) concluent que l’abattage précoce des premiers foyers serait la mesure la plus efficace pour limiter la propagation de la maladie, et que les restrictions de mouvements seules auraient un impact partiel. Dans les deux cas, la rapidité de mise en place des mesures, moins de 10 jours après l’infection de l’élevage, est essentielle.

La souche Léna du SDRP

De son côté, Olivier Bourry (Anses de Ploufragan) a présenté une étude portant sur la souche Léna de génotype 1.3 du virus du syndrome dysgénésique et respiratoire du porc (SDRP). Hautement pathogène (37,5 % de mortalité), elle a été isolée en Biélorussie en 2007. Or l’Europe de l’Ouest n’est pas à l’abri de son introduction, d’autant que les vaccins actuellement disponibles contre le SDRP montrent une efficacité partielle contre cette souche. Les chercheurs ont ainsi observé que celle-ci est particulièrement virulente, comparée à la souche française Finistère de génotype 1.1, représentative de celles circulant couramment en Europe de l’Ouest.

Pour ce faire, 18 porcs exempts d’organismes pathogènes spécifiques (EOPS) de 6 semaines ont été placés en animaleries confinées indépendantes. Huit animaux ont été inoculés par la souche Léna, cinq par la souche Finistère versus cinq témoins. Ils ont été suivis pendant 7 semaines. Le groupe “Léna” a présenté une hyperthermie et un score clinique élevés conduisant à la mort de trois animaux, ainsi qu’à une baisse importante de la consommation alimentaire et à une diminution marquée du gain moyen quotidien (GMQ). Ceux infectés par la souche Finistère ont montré une élévation de la température rectale et un score clinique beaucoup plus faible. Leur consommation alimentaire et leur GMQ ont été peu altérés. Les analyses virologiques indiquent que la souche Léna induit une virémie 100 fois plus importante que la souche Finistère.

Explants intestinaux et mycotoxines

Philippe Pinton (Inra) a, pour sa part, présenté les travaux de son équipe sur le modèle original que représentent les explants intestinaux de porcs pour analyser les effets néfastes des mycotoxines. Les chercheurs ont ainsi réalisé, à partir de segments d’intestins de porcelets, des explants de 6 mm de diamètre. Ceux-ci ont été exposés à 5 ou 10 µm de déoxynivalénol (DON, produit par Fusarium) pour une durée de 1 à 12 heures, dans des plaques de culture. Ils ont été utilisés pour des études histologiques et d’expression des gènes. L’expérience montre que les résultats sont en accord avec les données obtenues in vivo ou in vitro. Ces explants constituent des outils originaux et complémentaires de la culture cellulaire, mais ils permettent aussi, et surtout, une alternative à l’utilisation des animaux à des fins expérimentales.

Antibiotiques et éleveurs

Notre consœur Anne Hémonic est, quant à elle, revenue sur l’évolution des usages d’antibiotiques chez un groupe de 46 élevages de porcs du Grand Ouest entre 2010 et 2013. Les résultats révèlent que la baisse des usages d’antibiotiques en trois ans est importante (– 31 % en moyenne) et concerne une large majorité des exploitations étudiées (74 %).

Beaucoup d’efforts ont porté sur la prévention des maladies par une meilleure gestion de la conduite des animaux, de l’hygiène, de l’alimentation, des bâtiments et des protocoles vaccinaux. Néanmoins, certains aléas sanitaires se sont aussi traduits par des hausses d’usages.

Il reste que la perception des éleveurs concernant la variation des usages d’antibiotiques dans leur élevage en trois ans est erronée dans plus de 60 % des cas. D’où la nécessité de mettre en place, pour eux, un outil d’auto-évaluation.