Reconnaître et traiter la douleur chez le lapin - La Semaine Vétérinaire n° 1609 du 12/12/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1609 du 12/12/2014

Formation

NAC

Auteur(s) : Charly Pignon*, Valentine Chamard**

Fonctions :
*diplomate ECZM (small mammal),
praticien hospitalier NAC à l’ENVA.
Article tiré d’une conférence
présentée au congrès de l’Afvac
2014, à Paris, en partenariat
avec le laboratoire Axience.

Une douleur chez le lapin passe facilement inaperçue. En effet, cet animal de proie est susceptible de rester prostré au moindre stress. Le praticien est invité à le mettre en confiance pendant la consultation, par exemple en le laissant en liberté dans un parc. Un comportement normal, traduisant une absence de douleur, se manifeste par un lapin qui explore l’environnement en se dressant sur les pattes arrière, un toilettage, une prise de nourriture et une émission de fèces permanente.

A contrario, un animal douloureux présente une baisse d’activité et d’appétit, reste immobile, adopte une position rassemblée sur lui-même ou se cache, urine sous lui car il ne se déplace plus. Ses fèces sont de petite taille, sèches, produites en petite quantité. Certains signes sont spécifiques d’une localisation précise (bruxisme, dysorexie, ptyalisme lors de malocclusion, anorexie, abdomen douloureux lors d’iléus, arrière-train souillé lors d’atteinte de l’appareil urinaire, etc.).

QUELLES MOLÉCULES UTILISER

→ Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). L’emploi du méloxicam est recommandé à la dose de 1 mg/kg, deux fois par jour, par voie orale ou sous-cutanée. Il est bien toléré, même lors d’utilisation au long cours, chez le lapin. Les effets secondaires n’apparaissent souvent qu’en cas de surdosage et lors d’hypotension.

→ Tous les opioïdes sont utilisables chez le lapin. La buprénorphine est la molécule de choix lors de douleur modérée à forte. Elle est administrée à la dose de 20 à 50 µg/kg, par voie intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée, pour une durée d’action de 4 à 6 heures. Sa pharmacocinétique est en plateau, avec un pic atteint à 50 µg/kg. Elle entraîne peu d’effets secondaires (sédation légère, mais pas d’hypotension ni de dépression respiratoire). La buprénorphine peut être utilisée lors de stase digestive (elle ne ralentit pas le transit). Son inconvénient réside dans sa forte affinité avec les récepteurs µ : si cette molécule se révèle insuffisante pour traiter la douleur, il convient d’attendre 6 heures pour administrer un autre opioïde.

Le butorphanol a des effets proches de ceux de la buprénorphine. Cependant, sa valence analgésique est moindre et son activité sédative supérieure. Sa durée d’action est de 2 heures. Il peut être administré à la dose de 0,1 à 0,5 mg/kg, par voie intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée et en perfusion continue.

La morphine est utilisée pour les douleurs intenses à la dose de 1 à 2 mg/kg, pour une durée d’action de 3 à 4 heures. Elle s’administre par voie intramusculaire, sous-cutanée ou intraveineuse lente (risque d’apnée). Ses effets sont variables. La morphine génère une diminution du péristaltisme à 10 mg/kg.

Le fentanyl, à courte durée d’action (20 minutes), est intéressant dans le cadre d’une administration en perfusion continue à la dose de 0,5 µg/ kg/h (utilisé en bolus, c’est un dépresseur respiratoire). La repousse rapide des poils du lapin rend son efficacité en patch aléatoire.

Le tramadol est utilisable per os à la dose de 10 mg/kg, une ou deux fois par jour. Cependant, son administration a fait l’objet de peu d’études.

→ Les α2-agonistes possèdent des propriétés sédatives et analgésiques. Ils peuvent être employés en microdoses en perfusion continue.

→ Les anesthésiques dissociatifs sont judicieusement associés avec du fentanyl en perfusion continue (kétamine à la dose de 2 µg/kg/min ; fentanyl à 0,3 à 0,4 mg/kg/h), auquel est ajoutée de la médétomidine en bolus intramusculaire ou intraveineux toutes les 4 à 6 heures (0,001 à 0,002 mg/kg).

→ Les anesthésiques locaux sont à employer pour toute intervention chirurgicale : bloc traçant sur la ligne d’incision, infiltrations locales, blocs nerveux, etc., à la dose de 1 mg/kg de lidocaïne et de bupivacaïne (il ne faut pas dépasser 4 mg/kg pour la lidocaïne et 2 mg/kg pour la bupivacaïne).

TROIS EXEMPLES DE PROTOCOLES ANALGÉSIQUES

→ Lors de castration (douleur chirurgicale modérée)

– Prémédication : buprénorphine (50 µg/kg) par voie sous-cutanée.

– Bloc local intratesticulaire : un mélange est réalisé avec 0,1 ml de lidocaïne, 0,1 ml de bupivacaïne et 0,8 ml de sérum physiologique. 0,1 ml de ce mélange est injecté dans chaque testicule.

– En phase postopératoire : méloxicam (1 mg/kg, deux fois/jour) per os.

→ Ablation de la bulle tympanique (douleur chirurgicale intense)

– Prémédication : fentanyl (2,5 µg/kg) par voie intramusculaire.

– Anesthésie locale du nerf auriculo-temporal (lidocaïne et bupivacaïne).

– En phase peropératoire : perfusion intraveineuse continue de fentanyl (0,5 µg/kg/h), de lidocaïne (0,4 mg/kg/h) et de kétamine (0,3 mg/kg/h).

– En phase postopératoire : poursuite de la perfusion continue (selon la douleur, 24 heures en moyenne), puis buprénorphine (50 µg/kg toutes les 8 heures) et méloxicam (1 mg/kg, deux fois par jour) per os.

→ Iléus paralytique

Les AINS ne suffisent pas dans ce cas. Il convient de poser une voie veineuse et d’injecter de la buprénorphine (50 µg/kg toutes les 8 heures), et d’y ajouter de la lidocaïne en perfusion continue (50 µg/kg/min) ou en bolus (2 mg/kg).

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