Morsure de chien en consultation : ce qu’il faut faire - La Semaine Vétérinaire n° 1605 du 14/11/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1605 du 14/11/2014

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Auteur(s) : Christian Diaz

Les cas de morsure sont prévus dans le Code rural. Ils déclenchent des procédures à suivre. Le point sur les responsabilités du gardien de l’animal, de l’Ordre et les pouvoirs publics.

Le drame récent d’une consœur gravement mordue lors d’une visite de mise sous surveillance sanitaire d’un molosse ne peut que nous interpeller, sur le plan tant humain que légal (voir encadré page 19).

Même si le soufflé psychotique des années 2006-2008 est retombé, il n’en demeure pas moins que certains chiens présentent un réel danger, indépendamment de tout classement fondé sur la notion raciste et éthiquement indéfendable des catégories.

La conduite à tenir sur le plan légal en cas de morsure

Le Code rural prévoit ce cas de figure (voir encadré ci-dessous). Toute morsure d’une personne, quelles qu’en soient les circonstances, est censée déclencher une procédure qui doit être accomplie en 15 jours et comporter les étapes suivantes :

– une mise sous surveillance (pendant 15 jours) par un vétérinaire sanitaire ;

– une déclaration de la morsure au maire par le propriétaire de l’animal ou tout professionnel en ayant connaissance dans l’exercice de ses fonctions, le vétérinaire sanitaire précédent en tout premier lieu ;

– une évaluation comportementale par un vétérinaire inscrit sur une liste départementale, visant à déterminer le niveau de risque auquel se situe le chien, à l’origine d’un rapport communiqué au maire, et prescrivant des recommandations ;

– la mise en œuvre des mesures préconisées, qui relève du pouvoir de l’édile, décideur en la matière.

Si, pendant une mise sous surveillance en cours, une autre morsure se produit, elle déclenche une nouvelle procédure. Dans le cas rapporté ici, le chien n’en était pas à sa première morsure et il avait déjà fait l’objet d’une évaluation plutôt favorable (niveau 2 sur 4, risque mineur), probablement faussée par l’anamnèse (description subjective des faits par le client, à distinguer des commémoratifs).

La morsure grave et vulnérante dont notre consœur a été victime doit obligatoirement déclencher une nouvelle procédure, avec déclaration auprès du maire et évaluation comportementale de l’animal.

Les pouvoirs du maire

Il appartient au maire, informé de la morsure, de contraindre le détenteur à respecter la législation.

L’application des mesures préconisées relève également de sa responsabilité. Celle-ci peut être engagée, y compris au niveau pénal, si un accident se produit alors qu’il n’a pas donné suite à la déclaration de morsure ou aux prescriptions du rapport d’évaluation.

Si le chien présente un risque majeur, il peut être classé au niveau 4. Le vétérinaire doit alors conseiller l’euthanasie de l’animal ou son placement dans un lieu où il ne pourra pas provoquer d’accident.

Le maire peut contraindre le détenteur à mettre en place ces dispositions, mais aussi appliquer la procédure de l’article L. 21-11 du Code rural qui lui permet, en cas de danger grave et immédiat, de placer l’animal dans un lieu de dépôt et de faire procéder à son euthanasie, après avis d’un vétérinaire désigné par le préfet.

Le maire est donc à même, s’il en a la volonté politique et qu’il est correctement instruit des faits, de prendre des mesures visant à assurer la sécurité des personnes.

Les responsabilités du gardien de l’animal

Le vétérinaire, qui est un professionnel, est considéré comme le gardien juridique de l’animal auquel il donne ses soins, y compris en présence de son propriétaire, et il est ainsi responsable des dommages qu’il provoque (article 1385 du Code civil), y compris de ceux qu’il inflige à son maître ou qu’il s’occasionne. L’article pose le principe d’une responsabilité qui ne comprend que trois causes exonératrices : la force majeure, le fait d’un tiers et la participation de la victime au dommage, qui doivent être prouvés par le gardien.

Le propriétaire étant considéré comme un tiers en présence du vétérinaire, sa responsabilité pourrait être recherchée si la preuve est faite de l’absence de mesures de sa part face à un danger connu… Toute la difficulté de prouver l’implication d’un propriétaire niant le danger représenté par son chien après le premier incident officiel grave, et ce d’autant plus qu’il survient sur un professionnel présumé conscient du risque, puisque la consultation était justement consécutive à une morsure, peut ici être mesurée.

L’engagement devant les tribunaux de la responsabilité du propriétaire, alors qu’il s’agit apparemment du premier accident grave, apparaît aléatoire. Comme le dit un procureur en retraite, juger n’est pas forcément rendre la justice.

La protection du vétérinaire

Notre consœur salariée bénéficie de la protection des salariés en matière d’accident du travail. Cette notion d’accident du travail n’existe pas pour les travailleurs non salariés. Un tel événement est susceptible de menacer non seulement le niveau de vie du travailleur de façon durable, mais aussi la survie de l’entreprise libérale en cas d’exercice individuel. En l’absence de contrats prévoyant le versement d’indemnités journalières adaptées à l’activité, les conséquences peuvent être dramatiques. Il est recommandé de souscrire une telle protection dès le début de l’activité professionnelle.

Les rôles des organisations vétérinaires

L’Ordre a pour mission de défendre la santé publique. Informé du danger représenté par un animal, il rappelle leurs devoirs aux différents intervenants.

→ Les vétérinaires ont pour mission de mettre en œuvre les mesures légales, et ont un devoir d’information, pour les praticiens impliqués, envers le propriétaire et le maire, ainsi que de compétence (pour le vétérinaire évaluateur), dans le respect du public et des autorités.

→ Le maire se voit rappeler ses obligations. De nombreux maires n’ont pas reçu ou assimilé toutes les informations concernant les chiens dangereux, imprégnées des théories politiquement correctes et moralement douteuses, à l’origine des mesures discriminatoires en vigueur, qui masquent les aspects positifs de la législation.

→ L’Ordre doit jouer son rôle social face un vétérinaire en détresse, et lui apporter un soutien moral et éventuellement matériel face à un accident de la vie. En raison du traumatisme à la fois physique et moral provoqué par un tel événement, l’intervention d’associations comme Vétos-Entraide, en partenariat avec l’Ordre, apparaît elle aussi légitime.

Morsures d’une personne : ce que dit la loi

Dans le cadre de la prévention contre la rage, l’article L. 223-10 du Code rural stipule : « Tout animal ayant mordu ou griffé une personne, même s’il n’est pas suspect de rage, est, si l’on peut s’en saisir sans l’abattre, soumis par son propriétaire ou détenteur et à ses frais à la surveillance du vétérinaire sanitaire (…) »

→ L’article L. 211-14-2 du même code précise : « Tout fait de morsure d’une personne par un chien est déclaré par son propriétaire ou son détenteur ou par tout professionnel en ayant connaissance dans l’exercice de ses fonctions à la mairie de la commune de résidence du propriétaire ou du détenteur de l’animal. »

→ « Le propriétaire ou le détenteur du chien est en outre tenu de le soumettre, pendant la période de surveillance définie en application du premier alinéa de l’article L. 223-10, à l’évaluation comportementale mentionnée à l’article L. 211-14-1, qui est communiquée au maire. »

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