Conduite à tenir lors de suspicion d’intoxication aiguë - La Semaine Vétérinaire n° 1602 du 24/10/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1602 du 24/10/2014

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/ABEILLES

Auteur(s) : Lorenza Richard*, Claire Beauvais**

Fonctions :
*Praticienne à Sceaux (Hauts-de-Seine)

Le diagnostic d’une intoxication aiguë d’abeilles est souvent complexe et source de controverses. Il doit être entrepris par le praticien en association avec un laboratoire d’analyses.

1 > AUDIT DU RUCHER

En premier lieu, un examen minutieux des colonies et un audit sanitaire du rucher sont à effectuer afin de confirmer l’hypothèse d’intoxication et de déterminer si l’affaiblissement ou la mort des colonies n’est pas liée aux pratiques de l’apiculteur (utilisation de produits toxiques ou non autorisés pour l’entretien du matériel ou le traitement des parasites, etc.). Des renseignements relatifs aux pratiques industrielles (industries chimiques, par exemple) et agricoles (mauvais usage de pesticides par les agriculteurs et les éleveurs, ou par les particuliers) aux alentours du rucher sont aussi à rechercher. Il convient de contacter les apiculteurs de la zone afin de demander si leurs colonies sont également atteintes. La note de service de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) n° 2012-8113 du 6 juin 2012 incite les apiculteurs à déclarer les mortalités aiguës portant sur plus de 10 % des abeilles d’une colonie ou de plus de 10 % des ruches d’un rucher auprès de la direction départementale de la protection des populations (DDPP).

2 > PRÉLÈVEMENTS

Les prélèvements doivent être réalisés 48 heures au maximum après l’observation des signes cliniques et envoyés au laboratoire1 en veillant à ce que la chaîne du froid ne soit pas rompue (voir tableau).

Lors d’une déclaration de mortalités par l’apiculteur, l’examen du rucher est effectué dans les 48 heures qui suivent la déclaration par un agent de la DDPP ou un agent sanitaire apicole désigné, avec la rédaction d’un procès-verbal de prélèvement contresigné par l’apiculteur. Même en dehors d’une enquête phytosanitaire, et bien que ce rôle ne lui soit pas officiellement dévolu, le praticien peut prélever des végétaux dans les 72 heures, au centre des parcelles (éviter les bordures, début ou fin). Une autorisation est à demander à la gendarmerie pour pénétrer dans les parcelles agricoles, qui sont des propriétés privées.

Lors de suspicion de mauvaise pratique agricole, les prélèvements sont réalisés en trois exemplaires (triple expertise en procédure pénale) en présence d’un agent assermenté (un gendarme, par exemple). Les abeilles ou les lieux peuvent être pris en photos ou filmés. Les laboratoires fournissent des protocoles de prélèvements, de conservation et d’expédition des échantillons. Les commémoratifs et les signes cliniques sont indispensables, car ils orientent la recherche vers certaines familles de toxiques.

3 > ANALYSE DES RÉSULTATS

L’interprétation des résultats tient compte du délai écoulé entre l’intoxication supposée et la réalisation des prélèvements, les signes cliniques observés, l’environnement et l’enquête de terrain, les conditions météorologiques (lessivage des résidus par la pluie), la DL50 des molécules identifiées et les taux retrouvés. En effet, ces derniers varient selon la matrice (accumulation de résidus dans les cires ou réduction d’une substance toxique lors de la transformation du nectar en miel, susceptibles de fausser l’interprétation des analyses). En cas de suspicion d’une substance particulière, l’interprétation des résultats suit la logique suivante.

> Lorsque la substance est absente de l’échantillon, il convient de déterminer si ce dernier est suffisant en quantité ou en qualité. La quantité de la substance peut également être inférieure à la limite de détection par le laboratoire, soit initialement, soit parce qu’elle a été dégradée. Les produits de dégradation doivent également être recherchés.

> Si la substance est détectée mais non quantifiable, la question de son implication dans le cas étudié peut être posée plus facilement. Si elle est quantifiable, il convient également d’évaluer la quantité qui a pu être métabolisée de façon naturelle ou dégradée pendant le stockage des échantillons, de se demander si la matrice prélevée est représentative du risque d’exposition des abeilles et si la quantité retrouvée correspond au volume de perte des abeilles.

La collaboration avec le laboratoire d’analyses pour l’interprétation des résultats est indispensable

4 > DEVENIR DES COLONIES INTOXIQUÉES

Les substances responsables de l’intoxication pouvant persister dans la ruche, il est nécessaire de déplacer le rucher, d’éliminer les réserves de miel et de pollen et d’introduire une nouvelle reine. Si l’intoxication par un produit phytosanitaire épandu hors respect de la réglementation dans le voisinage est démontrée, l’apiculteur a la possibilité d’entamer une procédure judiciaire ou à l’amiable.

Le praticien peut conseiller à l’apiculteur de souscrire une police d’assurance qui couvre le risque d’intoxication et de surveiller attentivement ses colonies durant les périodes de traitement des cultures environnantes.

  • 1 Laboratoires officiels agréés par le ministère de l’Agriculture pour les analyses toxicologiques des abeilles : Anses Laboratoire de Sophia Antipolis (Alpes-Maritimes) et Girpa à Beaucouzé (Maine-et-Loire).

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