« Tous les acteurs de la filière sont complémentaires »

Dès la fin de mes études, la médecine collective et la zootechnie m’ont intéressé. De retour du service militaire, où j’étais volontaire à l’aide technique dans le Pacifique, je me suis tourné vers le conseil en élevage de ruminants, tout en passant un CES d’épidémiologie et une formation en nutrition animale. J’exerce en volailles depuis 1995.

Je travaille surtout en prévention avec la mise en place des plans de prophylaxie et des programmes de vaccinations et de biosécurité. En cas d’urgence (problèmes de mortalités ou de “non bien-être” animal, tels que des boiteries, par exemple), nous avons souvent recours au laboratoire. Nous travaillons, en effet, sur des lots de plusieurs milliers d’oiseaux, avec 7 000 dindes au minimum et jusqu’à 130 000 pondeuses, dont la valeur marchande est importante. Les attentes des propriétaires et des organisations professionnelles agricoles (OPA) sont donc élevées. Une visite d’urgence est une vraie enquête épidémiologique pour rechercher la cause et traiter au mieux. Le diagnostic repose sur l’individu (autopsies notamment), mais nécessite une vision globale de l’élevage et de la production. En effet, des liens épidémiologiques existent, de façon horizontale, entre bâtiments proches, par exemple, ou verticale, en amont avec l’accouveur et en aval avec l’abattoir (causes de saisies) ou l’élevage de destination. Les soins sont dictés par l’efficacité, le rapport coût-bénéfice, le bien-être animal et l’aspect antibiorésistance, mais je reste toujours indépendant dans ma prescription.

Nouvelles maladies et méthodes d’élevage

La filière avicole est en perte de vitesse sur certains schémas de production, mais d’autres apparaissent. Par exemple, la pondeuse élevée en cage régresse au profit de celle en système alternatif. Les vétérinaires doivent suivre cette évolution constante, car de nouvelles maladies émergent avec de nouvelles méthodes d’élevage. Pour cette raison, je ne me suis jamais ennuyé en pratiquement 20 ans.

La filière a besoin de vétérinaires, mais ils ne devront plus compter que sur la seule prescription d’antibiotiques pour se justifier. D’autres rôles, en plus du pathologiste, nous incombent désormais : mettre au point des substituts d’antibiotiques, garantir le bien-être animal et certifier les produits et les pratiques. Un confrère intéressé ne doit pas nécessairement se spécialiser trop rapidement au début de ses études. Le praticien peut s’adapter à toutes les filières, à condition d’avoir suivi une formation de base appropriée : en médecine d’abord, car c’est elle qui nous démarque de la formation des ingénieurs agronomes, en épidémiologie et en nutrition animale ensuite. Une formation en laboratoire se révèle également intéressante pour valoriser au mieux l’autopsie et la bactériologie.

Cette activité repose sur la prise en compte de tous les acteurs de la filière, en amont et en aval, et sur le travail en équipe avec les ingénieurs et les techniciens, avec qui nous sommes complémentaires.