La stérilisation chez les rongeurs et les lagomorphes - La Semaine Vétérinaire n° 1583 du 02/05/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1583 du 02/05/2014

Formation

NAC

Auteur(s) : Émilie Tessier

Fonctions : praticienne à Loos-les-Lille (Nord). Article tiré d’une conférence organisée par l’Afvac Midi-Pyrénées-Languedoc à Toulouse, en février 2014.

CHEZ LE LAPIN

Indications

→ Chez la femelle, la stérilisation a pour but d’éviter la reproduction et les problèmes liés à la territorialité (agressivité, marquage). Elle joue un rôle dans la prévention des tumeurs mammaires (souvent malignes) et surtout des atteintes utérines (adénocarcinomes et hydromètres fréquents, métrites, pyomètres, anévrisme veineux endométrial). Il convient de privilégier les stérilisations précoces, dès la puberté (soit 4 mois), jusqu’à 1 an et demi, âge à partir duquel l’intervention sort du cadre de la stérilisation de convenance, car d’éventuelles maladies intercurrentes sont encore peu visibles. L’imprégnation hormonale de l’utérus est telle, et ce précocement, que l’ovario-hystérectomie s’avère obligatoire. En effet, l’organe est quasiment toujours remanié lors de l’intervention. Son aspect normal est semblable à l’utérus d’une très jeune chatte, c’est-à-dire de l’épaisseur de la mine d’un crayon à bille et de couleur rosée uniforme.

→ Chez le mâle, les indications sont également le contrôle de la reproduction et de la territorialité. La castration a aussi une visée prophylactique (prévention des orchites et des tumeurs). Si la stérilisation peut être considérée comme une nécessité chez la femelle, elle l’est nettement moins chez le mâle.

Technique

→ Chez la femelle, l’ovario-hystérectomie est aisée. L’appareil génital est visible dès l’incision de la ligne blanche et facilement extériorisable. L’exérèse de l’utérus, replié sur lui-même, ne nécessite qu’une petite ouverture. La technique est classique, similaire à celle mise en œuvre chez les carnivores domestiques. Elle présente cependant deux difficultés :

– l’ouverture de la ligne blan- che s’avère délicate, car le système digestif, volumineux, se trouve juste en dessous ;

– la présence d’un important tissu adipeux peut gêner la visibilité et, fragile, il saigne facilement.

Deux particularités sont propres à l’espèce : la ligature des vaisseaux utérins est réalisée à part, et son exérèse oblige à une hémivaginectomie partielle (il convient de faire attention à ne pas ligaturer les uretères lors de cette étape).

→ Chez le mâle, la technique est similaire à celle utilisée chez le chien. La voie d’abord est antéscrotale, avec une ou deux incisions. La castration se pratique à testicule découvert, avec un clampage de la vaginale.

Prévention des complications

→ Chez la femelle, afin de prévenir les adhérences avec le côlon et la vessie, le moignon utérin est suturé et flushé. L’analgésie est indispensable. En phase préopératoire, de la morphine est injectée (2 mg/kg) ou, à défaut, de la buprénorphine (30 à 45 µg/kg). Une anesthésie locale traçante de la ligne blan-che est réalisée avec de la lidocaïne (2 mg/kg). Le protocole anesthésique inclut si possible des α2-agonistes. L’utilisation de doses faibles est intéressante (dexmédétomidine, 2 à 10 µg/kg). En phase postopératoire, la buprénorphine est associée à un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS).

Un autre point de vigilance est la lutte contre l’hypothermie, pendant et après l’intervention (tapis chauffant, bouillotte, couveuse, etc.). Il est conseillé de perfuser l’animal (pose d’un cathéter dans une veine auriculaire ou à la veine saphène externe). À défaut, 10 ml/kg de NaCl sont injectés par voie sous-cutanée. La question de l’intubation se pose : si elle est préférable pour la sécurité de l’anesthésie, le lapin est en revanche très sensible aux traumatismes trachéaux. Le masque laryngé, ou à défaut un simple masque facial, est une bonne alternative.

La reprise du transit digestif doit être rapide (nourrissage à la seringue, utilisation de métoclopramide, 0,5 mg/kg toutes les 6 heures). Le choix du moment du retour de l’animal chez son propriétaire est un compromis entre les soins réalisables à la clinique (conditions d’hospitalisation, injections de buprénorphine pendant 24 à 48 heures, etc.) et ceux possibles à la maison (AINS per os, éventuellement nourrissage à la seringue, etc.), qui est un environnement familier plus propice à un retour de transit rapide.

→ Chez le mâle, les mêmes règles d’analgésie s’appliquent : un morphinique au choix (1 mg/kg de morphine; 30 à 45 µg/kg de buprénorphine ; 1 mg/kg de butorphanol peut se révéler suffisant), une injection traçante et intratesticulaire de lidocaïne (2 mg/kg), éventuellement associés à un α2-agoniste (dexmédétomidine, 50 à 75 µg/kg), et dans tous les cas à l’administration d’un AINS. La lutte contre l’hypothermie et la relance du transit digestif sont aussi importantes que chez la femelle. La pose d’un cathéter est cependant moins nécessaire (une injection sous-cutanée de NaCl peut suffire).

CHEZ LES RONGEURS CAVIOMORPHES1

Indications

Outre le contrôle de la reproduction, la stérilisation permet, chez la femelle cochon d’Inde, de prévenir l’apparition de kystes ovariens, fréquents chez cette espèce. L’opération est plus aisée chez les mâles, mais nécessite tout de même une laparotomie (la voie d’abord abdominale est à préférer). La prise en charge de l’analgésie est donc très importante. Chez les femelles caviomorphes, l’appareil reproducteur est difficilement extériorisable par laparotomie au niveau de la ligne blanche. Pour cette raison, lorsque des animaux des deux sexes cohabitent, il est recommandé de privilégier la stérilisation des mâles et de réserver celle des femelles aux situations pathologiques. Néanmoins, les techniques de stérilisation par les flancs se développent, notamment chez le cochon d’Inde, avec une bien meilleure récupération de l’animal.

Technique

Comme chez le lapin, il convient d’être vigilant lors de l’incision abdominale, car le volumineux système digestif est situé en dessous.

→ Chez la femelle cochon d’Inde, l’ovariectomie (ou l’ovario-hystérectomie) se réalise par les flancs, aussi bien dans le cadre d’une opération chirurgicale de convenance que lors de kystes ovariens ou d’affection utérine. L’animal est placé en décubitus ventral. L’incision cutanée est effectuée juste sous les lombes, 2 cm en arrière des côtes, de chaque côté. Le chirur- gien trouve alors directement l’ovaire, aisément extériorisable à cet endroit. Avec l’âge, le tissu adipeux peut gêner sa visualisation. D’où l’intérêt de conseiller la stérilisation de convenance de la femelle cochon d’Inde vers l’âge de 4 à 6 mois.

→ Chez le mâle, la voie d’abord abdominale est préconisée par rapport à la scrotale, en raison de moindres complications (hernie, infections). Le repère pour l’incision réalisée sur la ligne blanche (qui est fine chez le chinchilla et mal délimitée chez le cobaye), est la position d’un des testicules une fois remonté (position très caudale, juste sous la paroi musculaire). Les testicules sont extériorisés. Une ou deux ligatures classiques sont effectuées : le cordon spermatique d’une part et l’attache de la vaginale de l’autre, ou bien tout ensemble dans une même ligature.

Prévention des complications

Chez les deux sexes, l’analgésie doit être soignée (1 mg/kg de morphine, relayée en phase postopératoire par la buprénorphine, associée à une anesthésie locale et à l’adminis- tration d’AINS). Il convient également de lutter contre l’hypothermie, d’instaurer une fluidothérapie sous-cutanée au minimum, et de relancer le transit digestif. Les conditions d’hygiène en phase postopératoires sont strictes chez le cochon d’Inde. La terre à bain du chinchilla est supprimée pendant cette période.

CHEZ LES RONGEURS MYOMORPHES2

Les mâles et les femelles peuvent être stérilisés par voie abdominale. L’opération est réalisable dès 4 mois pour les rattes en prévention des tumeurs mammaires et des affections utérines. L’utérus est facilement accessible et extériorisable. La technique est classique et facile, hormis la petite taille de l’animal et la fragilité des pédicules ovariens. La technique de castration des mâles est identique à celle des caviomorphes, sans les complications de transit digestif, mais avec un risque d’arrachage de points. Les sutures à l’aide d’agrafes, de colle ou en intradermique sont donc préférées. Les précautions destinées à éviter les complications sont similaires à celles mises en œuvre chez les rongeurs caviomorphes.

  • 1 Cochon d’Inde, chinchilla, octodon (herbivores).

  • 2 Rat, souris, hamster, gerbille (non herbivores).

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