Échographie des reins du chat et interprétation des résultats - La Semaine Vétérinaire n° 1583 du 02/05/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1583 du 02/05/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Harriet Hahn*, Pascaline Pey**

Fonctions :
*assistante d’imagerie médicale.
**diplomate ECVDI, maître de conférences en imagerie médicale. Service d’imagerie médicale, Enva.

ASPECT NORMAL

Les reins du chat sont situés dans l’espace rétro-péritonéal. Le rein droit est plus cranial que le gauche. Il est immédiatement caudal à la dernière côte, son pôle cranial étant en contact avec la fosse rénale du lobe caudé hépatique, latéralement à la veine cave caudale. Le rein gauche est caudo-médial à la tête de la rate, latéralement à l’aorte. La rate offre souvent une bonne fenêtre acoustique pour son exploration.

L’examen du rein comprend a minima trois coupes : longitudinale, parasagittale et transverse.

Coupe longitudinale

→ La taille des reins se mesure sur une coupe longitudinale stricte (voir photo 1A). Celle-ci atteint 3,5 à 4,5 cm chez un sujet adulte, et les reins doivent être symétriques. Chez les chats de grande race de type maine coon et les mâles castrés de grand format, ceux-ci peuvent mesurer jusqu’à 5 cm.

→ Leur forme normale est en haricot, avec des bords réguliers et lisses. La capsule n’est habituellement pas visible.

→ Le cortex, périphérique, doit être homogène, hypoéchogène à la rate et hypo- à isoéchogène au foie. Cependant, il peut être isoéchogène à la rate chez le chat adulte qui présente une fonction rénale normale : ce phénomène est dû à l’accumulation de vacuoles lipidiques dans le cortex. La distinction cortico-médullaire doit être franche.

→ La médulla est hypoéchogène à anéchogène. Elle apparaît séparée en plusieurs lobules, délimités par les vaisseaux arciformes et les diverticules du bassinet. Les vaisseaux arciformes la traversent depuis le sinus rénal jusqu’au cortex et peuvent être à l’origine d’un cône d’ombre franc. Ils peuvent être objectivés à l’aide du doppler couleur pour les distinguer d’une éventuelle lithiase. Au sein de la médulla, un liseré hyperéchogène parallèle à la distinction cortico-médullaire et d’épaisseur variable est susceptible d’être observé de façon non pathologique et non spécifique. Il peut aussi être constaté lors de diverses affections : péritonite infectieuse féline (PIF), intoxi-cation à l’éthylène glycol, né­phrocalcinose, etc.

Coupe parasagittale

Le rapport cortico-médullaire est à évaluer sur cette coupe (voir photo 1B). Celui-ci doit être compris entre 1/3 et 2/3.

Coupe transverse

Elle permet notamment d’évaluer la cavité pyélique, ainsi que le trajet urétéral proximal (voir photo 1C). La cavité pyélique ne doit pas être visible, mais elle peut mesurer jusqu’à 2 mm en cas de perfusion intraveineuse, d’utilisation de diurétiques ou d’insuffisance rénale chronique. Elle se manifeste alors par une fine bande anéchogène en forme de V ou de Y. L’uretère ne doit pas avoir de lumière visible à sa sortie du rein, donc son trajet ne doit rapidement plus être évaluable. La graisse du sinus rénal, autour de la cavité pyélique, paraît souvent hyperéchogène et peut même atténuer de manière physiologique le faisceau ultrasonore. Elle est particulièrement développée chez le chat en surpoids.

ASPECTS PATHOLOGIQUES

Insuffisance rénale chronique

Les deux reins sont typiquement de taille normale à diminuée, avec une atténuation, voire une disparition, de la distinction cortico-médullaire selon la sévérité de la néphropathie (voir photo 2). Le cortex apparaît épais (+/- la médulla) et hyperéchogène (iso- à hyperéchogène à la rate). Les contours rénaux peuvent être bosselés, irréguliers. De petites minéralisations dans la cavité ou les récessus pyéliques sont parfois présentes et provoquent un cône d’ombre franc. Des kystes à la paroi fine, de petite taille et au contenu anéchogène, avec un renforcement postérieur, peuvent être observés en position corticale (ou médullaire). Des infarcti rénaux sont parfois visibles : ils se présentent comme une bande triangulaire hyperéchogène à base large, périphérique et perpendiculaire à la capsule, bien délimitée et corticale. Progressivement, le cortex devient plus petit en regard, correspondant à la fibrose de la lésion.

Insuffisance rénale aiguë

Ses causes sont nombreuses et l’aspect échographique rénal est ainsi assez varié. Cependant, dans de nombreux cas, lors d’intoxication aux liliacés par exemple, les reins (notamment le cortex) apparaissent hyperéchogènes et la distinction cortico-médullaire peut être accrue. Les reins sont de taille normale à augmentée. Une mesure d’indices de résistivité et de pulsatilité au doppler pulsé permet de détecter de manière précoce, dans un contexte d’intoxication par exemple, des modifications de la perfusion rénale, avant même que les paramètres rénaux ou l’aspect échographique du rein ne soient modifiés.

Péritonite infectieuse féline

Il existe deux formes de PIF : une sèche et une humide. Cette dernière se manifeste par un épanchement caractéristique riche en protéines. Lors de forme sèche, des lésions pyogranulomateuses touchent divers organes (cerveau, yeux, reins, mésentère, foie notamment). Celle-ci se repère échographiquement par une néphromégalie bilatérale, un cortex hyperéchogène, des contours rénaux bosselés dus à des granulomes péricapsulaires ou intracapsulaires, voire un halo périphérique hypoéchogène unilatéral ou bilatéral (voir photos 3 et 4). Des masses complexes intraparenchymateuses peuvent être observées.

Dysplasie rénale

Cette atteinte évoque une anomalie de développement du parenchyme rénal à l’origine d’une insuffisance rénale sévère chez le jeune. Elle est notamment décrite chez le persan et le ragdoll. Les reins ressemblent à ceux touchés par une néphropathie chronique, c’est-à-dire qu’ils sont petits, à contours bosselés, hyperéchogènes, avec une atténuation de la distinction cortico-médullaire et un épaississement cortical. Une biopsie chirurgicale est plus appropriée qu’une biopsie échoguidée, car le diagnostic de dysplasie rénale repose sur l’évaluation de 100 glomérules au minimum.

Polykystose rénale

La polykystose rénale est une des maladies congénitales les plus fréquentes du chat. Elle est décrite chez le persan, le ragdoll et le british shorthair de race ou croisés. Cette affection se rencontre de moins en moins souvent, mais aboutit à une insuffisance rénale chronique précoce assortie d’une néphromégalie. Le cortex rénal et/ou la médulla contiennent de nombreuses structures kystiques (paroi fine et contenu anéchogène avec un renforcement postérieur) de taille variable. Les deux reins sont souvent affectés. Une recherche de dysplasie effectuée chez un chat trop jeune conduit, dans certains cas, à de faux négatifs étant donné que leur développement est progressif et que les petits kystes ne sont pas visibles échographiquement. Le diagnostic peut être établi à partir de 10 mois avec une bonne certitude, si l’examen est pratiqué par un utilisateur expérimenté, équipé d’une sonde de bonne qualité. Si la paroi est épaisse ou irrégulière, avec un contenu échogène, il est moins probable qu’il s’agisse d’un kyste : un abcès, un hématome ou une tumeur sont à envisager et une cytoponction est recommandée.

Néoplasie

→ Infiltration diffuse : le lymphome est la tumeur rénale la plus fréquente chez le chat (voir photo 5). Typiquement, une néphromégalie bilatérale, des reins hyperéchogènes et aux contours irréguliers sont constatés. Il est possible d’observer un halo périphérique sous-capsulaire hypoéchogène, une ou plusieurs masses ou une dilatation pyélique.

→ Lésion focale : différentes masses tumorales primitives ou métastatiques sont sus-ceptibles d’affecter le rein. Leur aspect est non spécifique : elles peuvent se présenter comme une masse plus ou moins bien délimitée, hyperéchogène à hypoéchogène, homogène ou hétérogène, qui déforme et détruit l’architecture rénale normale selon sa taille. La différence entre une tumeur primitive ou une métastase n’est pas visible à l’échographie. De façon moins fréquente, des abcès ou des granulomes sont rencontrés. Dans tous les cas, une cytoponction à l’aiguille fine ou une biopsie est recommandée pour établir le diagnostic de certitude.

Hydronéphrose

Il s’agit d’une dilatation de la cavité pyélique et des récessus du bassinet (voir photo 6). L’uretère proximal est souvent dilaté de manière concomitante. Le diagnostic différentiel englobe une infection chronique (pyélonéphrite, urétérite), une obstruction du bas ou du haut appareil urinaire ou un uretère ectopique.

L’obstruction et l’uretère ectopique doivent être exclus en suivant le trajet urétéral. Une dilatation pyélique supérieure à 13 mm conduit à un diagnostic de quasi-certitude d’obstruction, provoquée par un calcul (la cause la plus fréquente chez le chat), un caillot sanguin, une sténose ou une masse. L’uretère peut alors avoir un trajet tortueux, moins évident à suivre.

L’uretère ectopique, rare, s’accompagne souvent d’un hydro-uretère en raison de l’obstruction partielle au lieu d’abou- chement dans l’urètre (le plus souvent), le vagin ou le côlon. À l’échographie, les reins sont de taille normale à augmentée, avec des contours lisses. Plus la pression est importante, moins il y a de médulla et de cortex visibles (phénomène de compression). Dans les cas les plus sévères, il ne persiste qu’une fine bande de parenchyme périphérique.

Pyélonéphrite

Cette atteinte est due à une infection bactérienne de la cavité pyélique et du parenchyme rénal. La cavité pyélique est souvent modérément dilatée par un matériel plus ou moins échogène, ainsi que l’uretère proximal. Une stéatite péri-urétérale proximale est assez courante. La taille des reins apparaît souvent normale, ses contours réguliers. Une distorsion du système collecteur avec une asymétrie du bassinet peut conduire à la suspicion d’une chronicité.

Bibliographie

  • → Biller D.S., DiBartola S.P., Eaton K.A. et coll. Inheritance of polycyctic kidney disease in Persian cats. J. Heredity 1996;87(1) : 1-5.
  • → D’Anjou M.A., Bédard C., Dunn M. Clinical significance of renal pelvic dilatation on ultrasound in dogs and cats. Vet. Radiol. Ultrasound 2011; 52(1) : 88-94.
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