Interprétation des tests de neuro-ophtalmologie chez le chien et le chat - La Semaine Vétérinaire n° 1581 du 18/04/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1581 du 18/04/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Jean-Laurent Thibaud*, Laurent Fuhrer**, Laurent Masson***

Fonctions :
*diplomate ECVN, praticien à Créteil (Val-de-Marne).
**diplomate ECVN, praticien à Saint-Avertin (Indre-et-Loire). Article tiré de plusieurs conférences présentées au congrès de l’Afvac 2013 à Nantes.

Si elle rebute parfois les praticiens de prime abord, la neuro-ophtalmologie est en revan­che incontournable et fréquemment mise en pratique lors des consultations. Il importe de savoir réaliser et interpréter les tests de réponse de clignement à la menace et du réflexe photomoteur lors de l’examen neurologique de base ou de suspicion d’atteinte de la vision.

CLIGNEMENT À LA MENACE

Voies nerveuses impliquées

Comme son nom l’indique, ce test ne sollicite pas un réflexe mais une réponse, qui nécessite la participation active de l’animal. Cet examen fait intervenir l’ensemble des voies visuelles, ainsi que les voies motrices du nerf facial (du cortex moteur au nerf) responsable de la fermeture des paupières, ainsi que le cervelet, qui adapte les mouvements volontaires.

Réalisation

L’animal doit se rendre compte qu’il est “menacé”. Lui administrer une première tape sur le chanfrein ou émettre un bruit en guise de préambule peut aider cette prise de conscience. Il doit aussi être coopératif. Un stress important est susceptible de l’empêcher de répondre. À l’exception de la vue, aucun sens n’est stimulé. Le praticien simule alors une tape sur la face sans toucher ni l’animal ni ses vibrisses, et sans provoquer un courant d’air, qu’il percevrait.

Interprétation

Un test correctement pratiqué déclenche la fermeture des paupières. Il permet de contrôler l’intégrité de la fonction visuelle pour le champ évalué et la fonctionnalité du nerf facial.

Un test négatif met en évidence une lésion de l’une des structures qui participent à sa réalisation. Les autres tests qui explorent la fonction visuelle, le cortex cérébral, le nerf facial ou le cervelet permettent de situer celle-ci précisément (voir ci-après). En l’absence de clignement à la menace, la rétraction du globe oculaire lors de la réalisation du test évoque une paralysie faciale. Cette dernière est confirmée par un toucher palpébral ou cornéen.

RÉFLEXE PHOTOMOTEUR

Voies nerveuses impliquées

Purement sous-cortical, le réflexe photomoteur est présent sur l’œil testé et partiellement sur l’œil controlatéral (réflexe consensuel ou indirect). Il explore les voies visuelles préchiasmatiques, ainsi que le contingent parasympathique du nerf oculomoteur. Cependant, le stress est susceptible de moduler la réponse (mydriase sous effet sympathique).

Indication

Ce réflexe présente un intérêt lors de suspicion d’atteinte de la vision, d’anisocorie (détermination de l’œil et du système atteints) ou de lésion ophtalmique externe, de coma ou d’hypertension intracrânienne (il participe au score de Glasgow modifié).

Réalisation

Le réflexe photomoteur consiste à mettre l’animal dans une ambiance faiblement lumineuse et à appliquer une lumière vive sur un œil, puis sur l’autre. Les diamètres pupillaires des deux yeux sont à chaque fois examinés.

L’interprétation de ce réflexe s’effectue en l’absence d’un traitement bloquant le diamètre pupillaire (atropine, néosynéphrine) ou d’une lésion anatomique empêchant les mouvements iriens (synéchie, dégénérescence irienne, etc.).

Interprétation

Une constriction symétrique des deux pupilles (elle peut être asymétrique chez le chat) constitue une réponse normale. Lors de lésion unilatérale sur le nerf optique testé, une absence de constriction pupillaire est observée, quel que soit l’œil. En revanche, la stimulation de l’œil sain entraîne une constriction pupillaire normale. Si l’anisocorie est le seul symptôme noté, le réflexe photomoteur permet de déterminer l’œil atteint (voir tableau). L’absence de constriction, quel que soit l’œil stimulé, alors que la vision est conservée, évoque une lésion du trajet parasympathique (nerf oculomoteur).

Lors de cécité, l’interprétation du réflexe photomoteur complète la réponse au test du clignement à la menace :

→ si les deux sont absents, il convient de réaliser un fond d’œil, car une atteinte du ou des nerfs optiques ou du chiasma optique est alors suspectée ;

→ une contraction absente à la suite de la stimulation d’un œil, mais présente après la sollicitation de l’autre, indique une lésion préchiasmatique du premier ;

→ si le clignement à la menace est absent et si les réflexes photomoteur et palpébral sont normaux, l’atteinte est localisée au-delà du chiasma optique (test de la boule de coton négatif) ou est cérébelleuse (test de la boule de coton positif). Lors de coma, la présence des réflexes photomoteurs suggère une atteinte extracrânienne. À l’inverse, leur altération évoque une atteinte intracrânienne, qui est d’autant plus grave lors d’évolution du myosis vers la mydriase et d’atteinte bilatérale.

TESTS PHARMACOLOGIQUES

Les tests pharmacologiques à la néosynéphrine et à la pilocarpine concernent le système neurovégétatif. Ils exploitent une propriété particulière des effecteurs qui ont perdu leur innervation : l’hypersensibilité de dénervation.

Il existe des contre-indications relatives, telles que la présence de lésions cornéennes ou l’administration de pilocarpine lors d’uvéite ou de néosynéphrine en cas de glaucome par fermeture de l’angle, par exemple.

Afin de prévenir tout risque d’interaction, il est indispen­sable de ne pas administrer préalablement d’autres substances telles que des anesthésiques locaux. L’œil est simplement rincé avec une solution physiologique, afin d’éliminer toute trace de mucosité. Compte tenu de la contenance limitée du cul-de-sac conjonctival, une à deux gouttes de collyre suffisent.

Test à la néosynéphrine

Indication

Utilisé en présence d’un syndrome de Claude-Bernard-Horner, le test à la néosynéphrine permet de confirmer et de localiser une lésion des voies sympathiques qui innervent l’œil.

Réalisation

Le collyre est dilué par rapport à la solution commerciale à 10 % : le produit dilué à 1 % n’a pas d’action sur un œil sain, ce qui permet une bonne lecture du test.

Interprétation

L’observation d’une mydriase met en évidence une atteinte sympathique. S’il apparaît en moins de 15 minutes, ce résultat caractérise une lésion du troisième neurone (dit postganglionnaire). Une mydriase obtenue en 30 à 45 minutes signe une atteinte du deuxième neurone. Une mydriase qui survient en deux heures est en faveur d’une affection du premier neurone. S’il ne revêt pas un caractère diagnostique, en revanche, ce test oriente vers la mise en œuvre d’examens complémentaires.

Test à la pilocarpine

Indication

Cette technique confirme les atteintes du système parasympathique, en particulier lors de dysautonomie canine ou féline. Celles-ci se traduisent, entre autres anomalies, par une mydriase.

Réalisation

L’instillation du collyre (solution diluée à 0,1 %) conduit à une restauration du myosis, dans un délai qui se révèle assez variable en pratique. Celui-ci dépend du degré d’atteinte des fibres parasympathiques. Dans la plupart des cas, le myosis est rétabli en moins de 30 minutes.

Interprétation

Le test est considéré comme négatif en l’absence de réponse dans un délai de 90 minutes. Il revêt un intérêt lors de mydriase ou de myosis modérés. En outre, certaines dysautonomies ne se traduisent pas par un déficit, mais par une exacerbation de l’activité qui conduit à un myosis spastique dû au système parasympathique, ou encore à une mydriase spastique due à la voie sympathique. Ainsi, l’interprétation n’est valable que si le résultat est positif et inscrit dans le cadre d’un diagnostic différentiel.

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