Conduite à tenir lors d’arrêt cardiorespiratoire chez le chat ou le chien - La Semaine Vétérinaire n° 1576 du 14/03/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1576 du 14/03/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Jack-Yves Deschamps*, Laurent Masson**

Fonctions :
*maître de conférences à Oniris (Nantes). Article tiré d’une conférence présentée au congrès de l’Afvac 2013.

L’arrêt cardiorespiratoire constitue une urgence absolue. Une publication récente1 fait le point sur les recommandations en matière de réanimation chez les animaux de compagnie. Le premier objectif est d’oxygéner les tissus : l’oxygène parvient aux poumons (A), est hématosé (B) puis véhiculé par les hématies jusqu’aux tissus (C). Les médicaments (D) n’arrivent qu’en dernière position, car il est illusoire de réanimer un animal grâce à eux seuls. Auparavant, “l’ABCD” allait du plus important à ce qui l’était le moins. Désormais, il convient de commencer par le C, c’est-à-dire le massage cardiaque.

ANTICIPER

Lors d’un arrêt cardiorespiratoire, le temps est précieux. Alors, pourquoi ne pas anticiper ? Un abord veineux est indispensable. Même un petit calibre suffit pour une éventuelle administration d’atropine, de lidocaïne ou d’adrénaline par voie intraveineuse, et pour un dosage de la lactatémie. Une personne est chargée de préparer des seringues à insuline. Identifiées avec un ruban adhésif, celles-ci ne comportent pas d’aiguille, afin d’être utilisables immédiatement.

ANESTHÉSIER ET VENTILER

Chez l’animal dyspnéique en insuffisance respiratoire sévère, il convient de limiter le stress. Une anesthésie légère se révèle parfois nécessaire, notamment pour procéder à l’intubation. Utilisable à effet, le propofol est la molécule de choix, mais doit être injecté lentement. Le diazépam est sûr. Les α2-agonistes, quant à eux, sont interdits. Excepté en l’absence de voie veineuse, il convient d’éviter une induction au masque ou dans une cage à oxygène qui, non ventilée, peut aggraver la dyspnée.

Une trachéotomie peut être envisagée si l’intubation est impossible (voir encadré). Il existe des kits adaptés aux petits animaux, mais Jack-Yves Deschamps utilise pour sa part une sonde endotrachéale. Notre confrère découpe en deux l’extrémité de l’embout et crée ainsi deux languettes, qui sont plaquées à la peau (la sonde est “épluchée”).

Presque tous les animaux qui meurent à la suite d’un arrêt cardiorespiratoire ont d’abord été victimes d’un arrêt respiratoire. Il est donc primordial de surveiller la respiration afin de prévenir les accidents. Néanmoins, il importe de ne pas ventiler excessivement l’animal : celui-ci est susceptible de s’arrêter de respirer s’il est en hypocapnie secondaire à une hyperventilation.

Tant que le cœur bas, il importe de se concentrer sur la ventilation. Pour que cette dernière soit correcte, le rythme doit comprendre dix insufflations par minute, avec 10 ml/kg et une pression maxi­male de 20 cmHg. En pratique, il suffit de suivre le rythme de sa propre respiration (soit toutes les six secondes) et de voir la cage thoracique bouger légèrement. La pression à l’insufflation est plus forte pour un thorax circulaire que pour un autre en V en raison d’une plus faible compliance pulmonaire. L’inspiration ne doit pas durer plus d’une seconde afin d’éviter la diminution du retour veineux vers le cœur par un écrasement des veines pulmonaires.

Le ventilateur est utilisable au cours de la réanimation. Il est indispensable de posséder un Ambu Bag®. Une réanimation effectuée bouche-à-sonde est possible, car l’air expiré renferme encore 20 % d’oxygène environ. Le bouche-à-truffe est utile si le réanimateur est seul (30 massages suivis de deux insufflations à la truffe).

LE MASSAGE CARDIAQUE EN PRATIQUE

Lors d’arrêt cardiaque, le massage doit débuter promptement, avant toute autre action, même en cas de doute. Lors des manœuvres, une seule personne dicte les directives. En matière de réanimation, la réussite réside dans l’automatisme. Il est recommandé de se mettre en situation à la clinique.

Positionnement

L’animal est placé en décubitus latéral (sauf pour les animaux brachycéphales, voir plus loin) gauche ou droit. Chez le chien de grand ou moyen format, le réanimateur masse la zone la plus large du thorax, avec ses deux mains. Ses bras restent droits. L’appui s’effectue grâce aux mouvements des épaules (théorie de la pompe thoracique). Le thorax est écrasé d’un tiers à la moitié de sa largeur, même si des fractures costales sont possibles.

Chez le chat et le chien de petit gabarit ou au thorax fin, la pression s’effectue en regard du cœur, avec une ou deux mains (théorie de la pompe cardiaque). Le chien brachycéphale (thorax rond) est, quant à lui, placé en décubitus dorsal et le massage est sternal.

Massage et suivi

Le rythme du massage comprend 100 à 120 mouvements par minute (deux par seconde). Les cycles sont ininterrompus. Un changement de réanimateur intervient toutes les deux minutes en raison de la fatigue. Une contre-pression abdominale est, si possible, associée. La prise du pouls périphérique permet de vérifier l’efficacité du massage. La surveillance de la reprise des battements cardiaques s’effectue grâce à un stéthoscope œsophagien. En cas d’échec, poursuivre la réanimation cardiaque plus de 10 à 15 minutes n’est pas raisonnable.

La surveillance du rythme cardiaque et du tracé de l’électrocardiogramme est intéressante lors d’administration de médicaments en réanimation. Une tachycardie est observée lors du réveil de l’animal, d’une douleur ou d’une hypotension.

UTILISATION DE MÉDICAMENTS

Lors de bradycardie et/ou d’apparition de bloc atrio-ventriculaire de premier degré (élargissement des ondes P-QRS) ou de deuxième degré (onde P non suivie d’un QRS), et pour tout incident au cours d’une anesthésie, l’administration d’isoflurane doit être stoppée. En cas d’usage d’α2-agonistes, de l’atipamézole est injecté à raison d’un quart de la dose utilisée à l’induction.

Lorsqu’une diminution de 50 à 60 % de la fréquence cardiaque est notée, une faible dose d’atropine (de 0,025 à 0,05 mg/kg) est injectée pour lever le tonus vagal sans risquer une tachycardie. La lidocaïne est indiquée en présence d’extrasystoles ventriculaires ou en cas de tachycardie ventriculaire avec des complexes QRS de formes différentes, et lors d’ondes QRS prématurées associées à un pouls faible (signe de mauvais remplissage ventriculaire). Il convient alors de commencer par administrer une faible dose, car une quantité trop importante est sus­ceptible de supprimer l’automatisme ventriculaire. En cas d’asystolie, l’adrénaline est injectée combinée avec de l’atropine (l’effet α1 provoque une vasoconstriction qui facilite le retour du sang vers le cœur). L’usage du doxapram ou de l’hémisuccinate de méthylprednisolone n’est pas conseillé. Le butorphanol est utile pour la tranquillisation ou la sédation, mais pas pour l’anesthésie. En effet, celui-ci n’agit pas sur les récepteurs de la douleur. En revanche, il peut se révéler intéressant lors d’un surdosage de morphine en l’absence de naloxone.

  • 1 Fletcher D.J. et coll. Recover evidence and knowledge gap analysis on veterinary CPR. Part 7 : Clinical guidelines. J. of Vet. Emergency and Critical Care. Special issue : reassessment campaign on veterinary resuscitation, evidence and knowledge gap analysis on veterinary CPR. Vol. 22, issue s1, pp. S102-S131, june 2012 (http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1476-4431.2012.00757.x/abstract).

TECHNIQUE LORS D’INTUBATION DIFFICILE

→ Appuyer à la base de la langue si l’épiglotte est passée au-dessus du voile du palais.

→ Lors de spasme laryngé, un dépôt de lidocaïne à 10 % en spray chez les chiens de plus de 10 kg est indiqué. Chez les chats et les petits chiens, une seule goutte de solution à 2 % suffit (un risque de surdosage existe).

→ Un petit mouvement de rotation de la sonde écarte les cartilages aryténoïdes.

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