De l’usage raisonné des antibiotiques en équine - La Semaine Vétérinaire n° 1574 du 28/02/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1574 du 28/02/2014

Journée européenne de l’Avef

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Auteur(s) : Marine Neveux

La 14e journée européenne de l’Avef s’est tenue le 21 février dernier à Roissy-en-France. Un succès en termes d’audience, le nombre de congressistes étant fortement à la hausse cette année.

La journée européenne de l’Association vétérinaire équine française (Avef) a rassemblé sur un sujet fédérateur, « quoi de neuf en antibiothérapie équine ? », comme en témoigne la présence de nombreux praticiens, de confrères étrangers, des organisations professionnelles vétérinaires, des institutionnels, des représentants de l’administration, de l’industrie pharmaceutique, et de la recherche. Un thème ô combien d’actualité et politique pour ce rendez-vous organisé par Claire Scicluna et Jean-Marc Betsch. L’Avef finalise également des fiches de recommandations pour l’usage des antibiotiques en pratique équine. « Nous les soumettrons à l’Agence nationale de sécurité sanitaire. Vous serez en outre consultés sur la faisabilité de ces recommandations », a précisé notre consœur, porteuse du projet. L’objectif est d’établir, via un consensus formalisé, des bonnes pratiques d’antibiothérapie chez le cheval. La journée a abordé aussi une multitude de sujets pratiques qui font le quotidien du praticien équin, avec un volet interactif (quiz) et des échanges parfois vifs, mais passionnants, qui ont bousculé certaines idées reçues1.

Une étude de la Feeva en Europe

Une enquête, menée en Europe auprès des praticiens en 2013, a évalué leur usage des antibiotiques en pratique équine (facteurs influençant leur choix, protocoles, besoins, etc.). Elle a porté sur des situations cliniques comme la toux chez le cheval adulte, la diarrhée, le poulain malade, la lymphangite, l’endométrite. Au final, 435 réponses ont été obtenues issues de 22 pays.

Les facteurs qui influencent le choix de l’antibiotique cités sont l’expérience professionnelle, la culture bactérienne, les guides et les recommandations. Ceux qui n’influent pas sur ce choix sont la demande des clients et les remises qui peuvent être consenties sur les produits. « L’usage métaphylactique n’est pas trop répandu en pratique équine, c’est une bonne chose », a commenté Claire Scicluna.

Par ailleurs, les praticiens déplorent le manque d’antibiotiques pour soigner les chevaux, notamment les céphalosporines de 3e et 4e générations (C3G/C4G). Quant au besoin de pénicilline, il rejoint une demande générale européenne.

Face aux différentes situations cliniques, le vétérinaire équin utilise davantage les antibiotiques en dermatologie et en reproduction, puis pour soigner les troubles respiratoires, les diarrhées et les poulains malades. Au final, tous cas cliniques confondus, la pénicilline arrive en tête des usages, suivie du triméthoprime sulfate, de la gentamicine, puis des C3G et C4G (voir encadré).

La pratique en quelques morceaux choisis

Cette journée s’est poursuivie avec un tour d’horizon des conditions requises pour recourir, ou non, aux antibiotiques2.

Leur utilisation lors d’endométrite serait l’une des premières indications en équine, essentiellement avec des molécules de base. Pour autant, les endométrites ne sont pas toujours infectieuses, a tempéré Jean-François Bruyas (Oniris). « Pour l’histologiste, les endométrites subcliniques et chroniques sont celles associées à des lésions dégénératives de l’endomètre, ce sont des affections irréversibles et sans traitement. La bactériologie dira, à ce stade, qu’il n’y a pas de germes. » Les endométrites cliniques chroniques forment « un groupe assez hétérogène, certaines sont septiques et d’autres non ». Il existe aussi des métrites aiguës ou puerpérales, liées à un défaut d’hygiène au poulinage et/ou à une rétention placentaire. dans ce cas, des germes sont présents.

Lors d’endométrites, pas d’antibiotique automatique

« Les endométrites sont infectieuses ou non, donc les antibiotiques ne sont pas automatiques », a poursuivi Jean-François Bruyas. La métrite aiguë ou puerpérale fait appel à des lavages répétés, mécaniques, associés à des utérokinétiques. Seule l’urgence entraîne l’utilisation d’un antibiotique avec un large spectre (triméthoprime sulfate qui se concentre sur l’utérus, ou pénicilline streptomycine). Face à une endométrite chronique, il faut augmenter la vidange utérine, les défenses locales, et éliminer les germes par un lavage-siphonnage quotidien avec des anti-infectieux locaux. Un traitement utérotonique est pertinent. « Associer à cela des antibiotiques, je reste un peu septique. Est-ce vraiment utile et quelle molécule utiliser ? », s’est interrogé Jean-François Bruyas.

Des antibiotiques, et surtout de l’eau !

Notre consœur Céline Mespoulhès, ingénieur de recherche à l’ENVA, a posé la question des plaies : « Faut-il utiliser de l’eau ou des antibiotiques ? » Au final, la réponse est un peu « les deux, mais surtout de l’eau. Il faut impérativement traiter correctement la plaie, utiliser des molécules de première intention, avec les bonnes posologies, pour obtenir une cicatrisation optimale ».

Rhodococcose et usage raisonné

Rhodococcus equi est un sujet important, comme l’a illustré Monika Venner, vétérinaire en Allemagne. Il convient de mettre l’accent sur la conduite à tenir dans l’élevage touché. Le traitement de la pneumonie à R. equi s’étend sur quatre à six semaines au minimum, voire davantage chez certains poulains. « Il faudrait toujours combiner deux antibiotiques pour R. equi. Pour le moment, nous avons peu d’isolats résistants en Europe. Mais ce sont des molécules en partie utilisées en médecine humaine, nous devons donc y recourir de façon raisonnée. » Le traitement classique combine la rifampicine (10 mg/kg per os toutes les 24 heures) et l’azithromycine (10 mg/kg per os toutes les 24 heures). « La monothérapie ne devrait plus exister en raison de la sélection de souches résistantes. » Les critères d’inclusion pour le traitement sont notamment le score des abcès, une situation clinique d’affection respiratoire avec dyspnée ou fièvre supérieure à 40° et depuis plus de deux jours.

Josh Slatter, professeur en médecine interne au Collège royal de Londres, a rappelé la difficulté de « différencier les maladies bactériennes et virales. C’est un défi, car les signes cliniques ne sont pas spécifiques. Tous les tests ont des limites, aucun n’est sensible et spécifique à 100 % ».

En conclusion, la profession peut se féliciter d’un usage raisonné des antibiotiques, de la valorisation du diagnostic et des tests, et d’une diminution des usages dans l’ensemble des situations cliniques.

1 Voir le dossier en pages 23 à 26 de ce numéro.

2 Voir aussi en page 46 de ce numéro.

Usage des antibiotiques en Europe

Dans l’enquête menée par la Federation of European Equine Veterinary Associations (Feeva), toutes gammes confondues, la pénicilline arrive en tête des usages, suivie du triméthoprime sulfate, de la gentamicine, et des C3G/C4G. « Pour ces dernières, nous pouvons faire des progrès », estime Claire Scicluna.

> Chevaux qui toussent : le traitement passe souvent par les antibiotiques (pénicilline et triméthoprime sulfate).

> Chevaux atteints de diarrhée : leur utilisation est effective dans la moitié des cas (plutôt triméthoprime sulfate, pénicilline puis gentamicine).

> Poulains malades : recours fréquent à des C3G/C4G.

> Lymphangites et troubles cutanés : usage d’antibiotiques dans plus de la moitié des cas, souvent sans prélèvement (surtout la pénicilline).

> Endométrites : recours aux antibiotiques, avec relativement souvent des prélèvements (pénicilline et gentamicine).

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