Ophtalmologie canine : points forts du congrès de l’Ecvo - La Semaine Vétérinaire n° 1569 du 24/01/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1569 du 24/01/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Laurent Bouhanna

Fonctions : DESV d’ophtalmologie, praticien à Paris

Le congrès de l’European College of Veterinary Ophthalmologists s’est déroulé en mai dernier, à Barcelone (Espagne). Résumé des points forts de quelques présentations.

1 > PRÉVENTION DU GLAUCOME DE L’ŒIL ADELPHE

Une étude rétrospective, portant sur 41 chiens atteints de glaucome primaire à angle fermé, évalue les effets préventifs du brinzolamide 1 %1 (10 cas), du dorzolamide 2 %2 (19 cas) et d’une association de dorzolamide 2 % et de timolol 0,5 %3 (12 cas), administrés par voie topique, sur l’apparition d’un glaucome dans l’œil non affecté. 21 développent un glaucome dans le second œil (dans un délai médian de 7,6 mois après l’apparition du glaucome dans le premier œil). Concernant ce délai avant échec du traitement, aucune différence n’est mise en évidence entre les trois groupes. Pour 20 chiens, la pression intra-oculaire reste normale dans le second œil : jusqu’à la conclusion de l’étude (médiane de 27,4 mois) pour 4 chiens (9,8 %), jusqu’à l’interruption du suivi (médiane de 11,6 mois) pour 7 chiens (17,1 %), ou jusqu’à leur mort (médiane de 15,4 mois) pour 3 chiens (7,3 %).

En conclusion, le bénéfice clinique des trois collyres testés pour retarder l’apparition d’un glaucome dans l’œil non affecté chez des chiens souffrant d’un glaucome primaire à angle fermé sur le premier œil semble limité. Toutefois, compte tenu des limites de ce travail rétrospectif préliminaire, une étude plus large, randomisée avec des analyses de données pour de nombreuses variables, apparaît souhaitable.

Source : R. Stavinohova et coll. : « Retrospective study of the effect of topical brinzolamide 1 %, dorzolamide 2 % and a fixed dorzolamide 2 % / timolol 0,5 % combination on the onset of glaucoma in the second eye in dogs with primary closed angle glaucoma (2003 to 2012). »

2 > KÉRATOCONJONCTIVITE SÈCHE : TACROLIMUS VERSUS CYCLOSPORINE

L’objectif de cette étude, menée sur 40 chiens, est d’évaluer l’efficacité d’un collyre de tacrolimus pour réduire les si­gnes cliniques de kératoconjonctivite sèche chez le chien, et de comparer cette efficacité avec celle de la cyclosporine. Deux groupes de 20 animaux sont constitués. Le premier reçoit un collyre à la cyclosporine 0,75 % trois fois par jour, le second un collyre au tacrolimus 0,02 % deux fois par jour. Chaque groupe est subdivisé en trois lots, selon les résultats du test de Schirmer. Des examens ophtalmologiques sont réalisés avant, un mois et deux mois après le début du traitement. Une réduction significative de la néovascularisation cornéenne après seulement un mois de traitement est notée dans les deux groupes, avec une efficacité supérieure pour le tacrolimus dans les stades modérés et avancés. Pour tous les sujets, une augmentation significative du résultat du test de Schirmer est constatée, aussi bien après le premier mois de traitement qu’après le second pour le tracrolimus, et seulement après deux mois de traitement pour la cyclosporine.

En conclusion, pour les cas avancés de kératoconjonctivite sèche chez le chien, l’efficacité du tacrolimus pourrait être supérieure à celle de la cyclosporine.

Source : K. Radziejewski et coll. : « Comparative study of clinical evaluation of tacrolimus and cyclosporine eye drops for treatement of canine keratoconjunctivitis sicca. »

3 > IMPLANT LORS DE KÉRATITE SUPERFICIELLE CHRONIQUE

L’objectif de cette étude, portant sur huit bergers allemands, est d’évaluer l’efficacité d’un traitement expérimental lors de kératite superficielle chronique d’origine dysimmunitaire. Ce traitement repose sur un implant sous-conjonctival de cyclosporine à libération prolongée. Un collyre à l’ofloxacine est administré pendant deux semaines après l’implantation et un autre à la dexaméthasone 0,1 % pendant quatre semaines. Pour les cas où la kératite superficielle chronique progresse, de la dexaméthasone 0,1 % ou du diméthylsulfoxyde 30 % et de la cyclosporine A 0,75 % sont administrés en topique. Des contrôles ont lieu deux semaines après la mise en place de l’implant, puis après un, deux, trois, six et douze mois. La région de la cornée affectée par le processus inflammatoire est examinée, et le développement d’une pigmentation et d’une néovascularisation cornéennes évalué. Une récidive est observée au cours des deux à quatre mois qui suivent la fin de l’administration de la dexaméthasone. Trois et six mois après sa mise en place, un déplacement unilatéral de l’implant se produit chez deux chiens.

L’utilisation des implants à la cyclosporine associée à des produits anti-inflammatoires topiques conduit à la régression des symptômes. Ainsi, les implants à la cyclosporine libérée à une dose d’environ 20 à 25 mg par jour pendant un an ne permettent de contrôler la kératite superficielle chronique que s’ils sont associés à des collyres anti-inflammatoires. Cette étude présente une limite : l’absence de cas témoins, traités sans cyclosporine, mais uniquement avec des anti-inflammatoires stéroïdiens.

Source : Z. Kovacova et coll. : « Subconjonctival sustained-release cyclosporine implant in the treatment of chronic superficial keratitis in 8 German Shepherd dogs. »

4 > LÉSIONS PERFORANTES CORNÉENNES ET GREFFE DE CORNÉE

Une étude rétrospective portant sur 48 cas décrit l’utilisation de la greffe de cornée dans le traitement de lésions cornéennes perforantes chez le chien, et évalue son efficacité pour préserver la vision. Les races brachycéphales sont surreprésentées (75 % des cas). Une kératoplastie transfixiante est pratiquée sur 20 des 48 yeux (42 %) et une kératoplastie lamellaire sur 28 yeux (58 %). Des greffons congelés sont utilisés pour 43 des 48 yeux (90 %) et des greffons frais homologues pour 5 yeux (10 %). Dans le premier groupe (greffons congelés), 26 greffons sont homologues (60 %) et 17 hétérologues (40 %). La taille moyenne des greffons est de 7 mm (3 à 15 mm).

Une association de traitements topiques (antibiotiques, corticoïdes, cycloplégiques, cyclosporine A 0,2 %) et, si besoin, un traitement systémique à base de mycophénolate mofétil (un immunosuppresseur sélectif) est administrée en phase postopératoire. La durée moyenne de suivi est de 420 jours. Les complications postchirurgicales consistent en des déhiscences de plaie et des glaucomes (4 cas sur 48, soit 8 %, dans les deux cas). Des signes de rejet sont observés pour 59 % des greffons hétérologues congelés, 50 % des homologues congelés, 60 % des homologues frais, 55 % des kératoplasties transfixiantes et 54 % des kératoplasties lamellaires.

Des traitements médicaux et chirurgicaux (greffe conjonctivale pédiculée) ont permis de contrôler avec succès le rejet du greffon dans 48 % des cas. Pour la fonction visuelle, un résultat favorable est obtenu dans 81 % des cas et une opacification modérée à sévère de la cornée n’est observée que dans 28 % des cas.

En conclusion, la greffe de cornée apparaît comme un traitement efficace lors de lésions cornéennes perforantes chez le chien. Lors de rejet du greffon, un traitement complémentaire, médical ou chirurgical, se révèle parfois nécessaire. Il permet d’obtenir des résultats visuels satisfaisants.

Source : R.P. Lacerda et coll. : « Corneal grafting for the treatment of full-thickness corneal defects in dogs : review of 48 cases. »

5 > 50 % DE CORPS ÉTRANGERS CORNÉENS PERFORANTS

207 cas de corps étranger cornéen sont inclus dans une étude rétrospective. 72 % des chiens ont moins de cinq ans. L’english springer spaniel et le labrador sont surreprésentés. La pénétration du corps étranger est superficielle (13,5 % des cas), implique le stroma antérieur (9,2 %), le stroma moyen (15 %), le stroma profond (13,5 %) ou perfore la cornée (48,8 %). Une atteinte du cristallin est présente dans 22,2 % des cas et une phacoémulsification est pratiquée chez dix de ces chiens (de façon à limiter les risques de complications et à conserver la vision à long terme). Une énucléation est réalisée dans six cas.

Sur six cas de lésion du cristallin traités médicalement et qui ont pu être suivis à long terme (plus de deux ans), quatre n’ont développé aucune affection cristallinienne grave. En revanche, une affection sévère a évolué deux ans après le traumatisme dans deux cas, lentement pour l’un et rapidement pour l’autre, avec l’apparition d’une cataracte mature et d’un glaucome qui a nécessité une énucléation. Ainsi, des complications peuvent survenir longtemps après la lésion par le corps étranger. Un suivi à moyen et long termes est donc nécessaire pour les animaux chez lesquels le corps étranger a lésé le cristallin.

Source : S. Tetas et coll. : « Corneal foreign body injury in dogs, review of 207 cases. »

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