Le préjudice moral lié à l’animal toujours aussi mal indemnisé - La Semaine Vétérinaire n° 1568 du 17/01/2014
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La Semaine Vétérinaire n° 1568 du 17/01/2014

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Auteur(s) : Céline Peccavy1

Le préjudice moral est facilement brandi dans les procédures judiciaires qui impliquent des animaux. Assez ancienne, l’indemnisation de ce préjudice lié à un animal date, dans son principe, d’un arrêt de la Cour de cassation du 16 janvier 1962 (arrêt Lunus, du nom du cheval impliqué).

Depuis cette date, les décisions concernant le préjudice moral n’ont cessé de se succéder. Ainsi, le préjudice affectif du propriétaire d’un yorkshire écrasé par un automobiliste qui a pris la fuite a été reconnu par la cour d’appel de Paris (arrêt du 7 mars 1983). De même, il y a eu préjudice moral lorsqu’un vétérinaire a décidé d’euthanasier une chienne sans le consentement de son propriétaire (arrêt de la Cour de cassation du 8 juillet 1986).

Pour autant, le préjudice moral est-il à coup sûr accordé aux demandeurs ? La jurisprudence récente montre le contraire, mais également, au niveau du quantum de l’indemnisation, qu’on est loin des sommes exorbitantes sollicitées par les requérants.

UNE DEMANDE SOUVENT REJETÉE

Même si l’arrêt Lunus est intervenu dans des circonstances funestes, la mort d’un animal ne justifie plus forcément l’octroi d’une indemnisation. Une décision de la juridiction de proximité de Courbevoie, datée du 6 décembre 2011, a rejeté une demande pour un chat, atteint d’une grave maladie, qui avait dû être euthanasié. L’existence d’un préjudice moral n’a pu être établie. La juridiction de proximité de La Châtre avait rendu une décision contraire le 3 décembre 2009, accordant une indemnisation au titre du préjudice moral à la suite de l’euthanasie obligatoire d’un chien. Cependant, le demandeur n’a obtenu que la somme de 250 €.

En dehors des cas de mortalité, la jurisprudence est également partagée sur cette indemnisation.

UN PRÉJUDICE RAREMENT RECONNU

Dans une décision rendue par la juridiction de proximité de Cognac, le 24 janvier 2011, il est question d’un chien atteint d’une conséquente maladie de peau qui a nécessité de longs mois de traitements et beaucoup de déplacements chez un vétérinaire spécialiste, éloigné géographiquement du domicile de la propriétaire. Les vendeurs lui ont alors proposé de remplacer le chien. Le refus opposé par l’acheteuse (qui a mis en avant son attachement déjà existant à l’animal) n’a toutefois pas été sans conséquences. La juridiction a considéré que le préjudice moral n’était pas constitué, dans la mesure où la propriétaire avait fait le choix de garder l’animal plutôt que de demander la résolution de la vente. Pour le juge, seule la séparation aurait justifié l’existence d’un tel préjudice. Il n’était donc pas question, dans ce cas, de prendre en considération le problème de santé comme une base d’indemnisation. Un jugement du tribunal d’instance de Bayonne du 10 novembre 2010 a été rendu dans le même sens : l’acheteur d’un chat atteint d’un vice rédhibitoire, mais qui a survécu, a sollicité du tribunal l’octroi d’une indemnisation pour préjudice moral, justifié par le fait de s’être occupé de l’animal dans ces conditions. Le juge n’a pas suivi cette argumentation et a rejeté sa demande.

Une tendance un peu plus marquée à l’octroi du préjudice moral se profile aujourd’hui, lorsqu’il est question de la mort de l’animal. La seule souffrance de celui-ci ne semble apparemment pas suffire aux magistrats. Ainsi, la juridiction de proximité d’Auch a pris, le 12 janvier 2009, une décision favorable. Alors qu’un chien souffrait de troubles dermatologiques, les vétérinaires étaient unanimes pour affirmer que l’euthanasie de l’animal semblait, à court terme, inévitable. La demanderesse a donc obtenu gain de cause lors de sa demande d’indemnisation du préjudice moral, la juridiction considérant qu’il était dû « au regard de l’affection que Mme J témoigne à son chien tel que cela ressort de ses courriers ». La somme de 350 € lui a été attribuée.

Face aux sommes octroyées, celui qui entend faire fortune ne peut qu’être déçu. Celles-ci ne dépassent pas quelques centaines d’euros, alors que la plupart du temps les plaideurs raisonnent en milliers d’euros. Le préjudice moral reste donc un poste d’indemnisation très secondaire.

  • 1 Avocate au barreau de Toulouse.

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