Rémunération variable : à mettre en place avec parcimonie et justesse - La Semaine Vétérinaire n° 1565 du 20/12/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1565 du 20/12/2013

Entreprise

Auteur(s) : Françoise Sigot

Bonus et primes d’objectifs sont de plus en plus utilisés dans les entreprises. Assez répandus dans la profession, ces modes de rémunération sont toutefois à manier avec précaution, pour ne pas démotiver les équipes ou altérer la qualité du service.

On a longtemps pensé que la rémunération variable restait l’apanage des grands groupes, qui sont neuf sur dix à la pratiquer. Les études restent peu fréquentes en la matière. Cependant, il semble que les petites et moyennes entreprises soient aujourd’hui de plus en plus nombreuses à recourir aussi à ce système. Et pas seulement pour leurs commerciaux. Elles cherchent ainsi à augmenter la motivation de leurs équipes, à différencier les collaborateurs, selon leur contribution au succès de l’entreprise, et à redonner à la masse salariale une flexibilité perdue. En principe, le variable est utilisé pour les vétérinaires collaborateurs libéraux (sur la base d’un pourcentage du chiffre d’affaires journalier, mensuel ou annuel, régulé en fonction du nombre de jours travaillés ou des actes de soins). Ce mode de rémunération difficilement chiffrable est également utilisé pour les gardes de nuit et de week-end, assorties en général d’un système de motivation (la part variable fondée sur un pourcentage des recettes réalisées). Enfin, les primes de fin d’année concernent toute l’équipe, les vétérinaires et les auxiliaires. À l’avenir, le variable pourrait se développer davantage, car il présente plusieurs avantages. C’est un bon moyen, en temps de crise, de rémunérer mieux et plus juste, en fonction des objectifs atteints, de motiver et de responsabiliser les équipes, sans pour autant augmenter leur salaire fixe. Toutefois, mal paramétré et mis en œuvre de façon hasardeuse, il peut se révéler contre-productif et devenir le terreau de véritables guerres intestines entre collaborateurs.

FAIRE PREUVE DE PÉDAGOGIE

Comme la plupart des décisions managériales, l’introduction d’une part de rémunération variable doit être expliquée avec précision aux collaborateurs. D’abord dans ses motivations, ce qui implique de bien cerner les raisons pour lesquelles l’on souhaite introduire ce mode de rémunération. Ensuite dans son fonctionnement. « La rémunération variable peut être un très bon outil de motivation, sous réserve que les objectifs fixés restent parfaitement lisibles par l’équipe, donc clairement portés à leur connaissance et surtout atteignables », note Thierry Habran, fondateur et dirigeant de Vetentreprise, spécialiste du conseil en management et développement des entreprises vétérinaires. Toutefois, pour une adhésion des collaborateurs à une telle méthode de rémunération, il peut être judicieux de les impliquer en amont en leur demandant s’ils ont des idées sur les initiatives qui pourraient booster l’activité de la clinique. « Ce peut être un bon outil pour l’accompagnement de la mise en place de nouveaux services », estime Delphine Paulet, fondatrice de VetConsulting. Par exemple, pour une gestion optimisée de la relation client de la clinique.

FIXER DES RÈGLES CLAIRES ET ATTEIGNABLES

Il est donc indispensable de prendre du temps, peut-être pour partager le projet avec ses équipes. Surtout pour procéder à une étu­de fine des avantages et des inconvénients de ce mode de rémunération. Ce travail est à mener conjointement avec son comptable pour définir quels peuvent être les points qui serviront à calculer cette part variable. Ensuite, il revient aux dirigeants de décider quels seront les indicateurs pris en compte, en fonction des moyens de la clinique et des objectifs de développement. Il faut donc être précis sur les objectifs qui serviront à calculer la part variable. Lesquels peuvent être quantitatifs et/ou qualitatifs et individuels et/ou collectifs. Enfin, il est aussi impératif d’envisager le pire et donc de bien informer les équipes que, si les objectifs ne sont pas atteints, la part variable ne sera pas due. « Le risque essentiel reste la genèse d’une course au profit qui altère le relationnel client et déforme la mission de soins dans le sens d’une activité exclusivement commerciale. À l’extrême, le vétérinaire n’a plus de valeur ajoutée par rapport à un pharmacien ou à un revendeur de pet-food dont les frais sont inévitablement plus bas, et le business model est en danger », alerte Delphine Paulet.

SUIVRE ET TENIR SES ENGAGEMENTS

Une fois le système lancé, rien de tel pour le mettre à mal que de penser qu’il va vivre seul. « La rémunération variable implique le monitoring des performances, c’est un outil de responsabilisation des employés qui sont impliqués dans la genèse de leur propre rémunération. Bien géré, il permet une prise de conscience collective des enjeux de gestion, notamment les marges, ce qui rapporte ou non, le seuil de rentabilité, etc., qui sont souvent inconnus des non-associés. C’est aussi un outil de responsabilisation du management de la clinique qui doit suivre les chiffres avec assiduité afin d’identifier des progrès individuels et collectifs, mais aussi d’éventuelles situations de démotivation », explique la fondatrice de VetConsulting. Les objectifs doivent être atteignables, mais également bien temporisés. « Il ne faut pas que les collaborateurs attendent trop avant de voir les résultats de leurs efforts. Un système de part variable versée au trimestre est donc préférable à l’annualisation », fait valoir Thierry Habran. Enfin, si les objectifs ne sont pas tenus, il convient de redoubler de vigilance sur le suivi, pour, dès lors que les performances sont réorientées à la hausse, redistribuer le fruit de leurs efforts aux collaborateurs. Il en va du maintien de la motivation des équipes.

PRENDRE GARDE AUX EFFETS PERVERS

Bien gérer la rémunération variable est un bon outil de motivation et, par ricochet, une source de croissance pour la clinique, mais mal monté, mal expliqué et mal paramétré, ce système peut être dévastateur. « Nous avons introduit une part variable à la demande de nos ASV. Pour la calculer, nous avons privilégié des objectifs individuels et fixé par ailleurs un seuil collectif de déclenchement fondé sur le chiffre d’affaires global de la clinique. Une erreur monumentale qui nous a conduits à voir des ASV se disputer les clients et laisser totalement de côté le service et la qualité de l’accueil », témoigne un vétérinaire qui a, depuis, revu ses indicateurs. Les effets pervers les plus fréquemment observés prennent en effet la forme d’un excès d’individualisme. Des inégalités croissantes peuvent survenir entre les collaborateurs, spécialement si les salaires de base ne sont pas équitables. Le risque est donc de faire naître une entreprise à deux vitesses. Enfin, les primes sur objectifs peuvent pour certains, conduire à la démotivation. Pris dans la spirale d’une compétitivité interne démesurée, frustrés d’être comparés à d’autres peut-être mieux lotis ou sûrs de leur bon droit pour revendiquer les bonus comme des acquis, des salariés baissent les bras.

Autant dire que la rémunération variable ne constituera jamais à elle seule la recette magique de motivation des équipes. C’est pourquoi il est important de ne pas négliger les autres outils de motivation. « La reconnaissance, notamment pour les ASV, est un point essentiel de l’engagement dans le travail. Le mot “merci”, ou “bravo”, de préférence en public, est bien plus puissant qu’une prime de faible montant. Penser à valoriser les efforts individuels vis-à-vis de l’équipe et du public, par exemple en mettant en scène chaque mois, “le conseil du mois” avec la photo du collaborateur qui l’a proposé, à partir d’une boîte de suggestions que les associés étudient et sélectionnent ensemble, est aussi un moyen d’entretenir la motivation et de stimuler la contribution à l’entreprise », conclut Delphine Paulet.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr