Manager, ou comment s’adapter au niveau de formation et de motivation de ses employés - La Semaine Vétérinaire n° 1563 du 06/12/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1563 du 06/12/2013

Dossier

Auteur(s) : Christophe Deforet

En tant que praticiens, nous sommes confrontés, pour la plupart d’entre nous, à la complexe tâche du management, que l’on soit responsable d’un petit cabinet ou associé d’un centre hospitalier vétérinaire. Or nos études nous forment bien peu à cette pratique. Il existe différents types de management, et les capacités intellectuelles propres à chacun peuvent prédisposer à différentes conceptions de la gestion du personnel.

Le management peut être défini comme l’art de diriger les hommes en vue d’atteindre les objectifs de l’entreprise. Le rôle d’un manager est donc de mettre en place des conditions propices, à la fois au développement des personnes dont il a la responsabilité et à l’atteinte des objectifs de la structure. Pour créer ces conditions, il existe différentes combinaisons efficaces, les styles de management, qui sont plus ou moins adaptés selon les situations.

Le style naturel d’un manager est le fruit de facteurs personnels (aptitudes propres, expérience, caractère, personnalité, convictions, valeurs, etc.) et de la nature de l’environnement dans lequel il évolue (activités, personnalité et attentes des collaborateurs, etc.).

Il n’existe pas une façon meilleure que les autres de manager son équipe, l’idéal est d’utiliser un style varié, adapté au type de travail, à l’autonomie professionnelle et à la motivation des salariés. Afin d’accroître les performances de l’entreprise, il est nécessaire de favoriser la progression de chacun en lui permettant de développer son autonomie.

PLUSIEURS TYPES DE MANAGEMENT PEUVENT ÊTRE ADOPTÉS

Le manager directif accorde la priorité à la tâche, structure l’environnement de travail, prend les décisions et donne des instructions. La communication favorisée par ce manager est de type descendante : les relations sont directes et claires, le traitement du conflit se fait en face à face. Face aux erreurs, le manager directif en explique les conséquences et sanctionne. Il défend les intérêts de l’entreprise et exerce une forte influence sur ses collaborateurs.

Ce type de gestion du personnel peut être adapté à des salariés peu compétents et/ou assez peu motivés à leur arrivée en poste. Toutefois, l’exacerbation de ce comportement dérive vers l’autocratie, fondée sur la croyance que les autres ne sont bons à rien et que seuls la force et le pouvoir comptent. Les subordonnés ne sont alors que des exécutants.

Le manager persuasif accorde la priorité à la tâche, sans toutefois négliger la relation avec le salarié. Il mobilise ses collaborateurs en s’assurant qu’ils s’inscrivent dans une dynamique globale d’évolution positive de l’entreprise. Il prend les décisions, mais explique et consulte, voire aménage si nécessaire. La communication est à la fois ascendante et descendante. Le manager encourage l’initiative et favorise le développement de la communication au sein de l’entreprise. Il reconnaît le droit à l’erreur et compte sur la formation pour y remédier. Il donne envie à chacun de se fixer des objectifs élevés. Ce management correspond bien à des salariés qui ont peu d’expérience, mais une forte motivation.

La dérive vers un style utopiste peut paraître regrettable, car elle repose sur l’idée qu’il faut toujours faire confiance et qu’il est possible de tout obtenir par le dialogue et la concertation. Mais cette attitude est déconnectée de la réalité professionnelle.

Le manager participatif accorde la priorité à la relation. Il associe ses collaborateurs aux décisions, il accepte des solutions autres que celles qu’il avait envisagées. Ce comportement est possible avec des collaborateurs vétérinaires ou des auxiliaires en poste depuis longtemps, qui ont parfaitement intégré la hiérarchie. La communication est alors ascendante, descendante et horizontale, les relations au sein du groupe sont favorisées, les intérêts individuels sont pris en compte, avec une analyse des désaccords et une concertation sur les solutions. Le manager participatif accorde le droit à l’erreur, il analyse les causes davantage par rapport aux situations qu’aux personnes. Il offre l’opportunité de progresser ensemble. Il s’agit de travailler sur un pied quasiment d’égalité, le travail s’effectue dans une ambiance conviviale. Ce management peut être mis en place avec des salariés compétents, mais qui manquent de motivation quant aux initiatives. Il se révèle intéressant lorsque le manager emploie des salariés plus compétents que lui-même pour une tâche donnée (vétérinaires spécialistes, par exemple), ce qui permet de s’appuyer sur les compétences d’autrui.

Le revers de la médaille de ce type de gestion du personnel est le paternalisme, fondé sur la croyance qu’il faut absolument éviter tout conflit et préserver de bonnes relations. L’équipe devient dans ce cas une grande famille sans véritable “chef”, et tout le monde décide alors, car le responsable ne donne pas de directives. Le manager paternaliste est influençable et essaie de s’arranger pour toujours donner satisfaction au personnel, ce qui risque de générer des situations inextricables.

Le manager délégatif responsabilise ses salariés en leur confiant des missions. Les décisions sont prises avec la personne à qui il laisse une large autonomie dans sa mise en œuvre. La communication s’établit dans le cadre d’un respect mutuel, les comportements relationnels sont limités, il reste disponible si on le demande. Le droit à l’erreur est accordé ponctuellement, le collaborateur devant être capable de la corriger. Le manager délégatif observe et analyse les comportements et les résultats, il évalue les performances, et rectifie les missions si nécessaire. En clinique vétérinaire, ce type de management n’est envisageable que pour certaines tâches, avec des salariés compétents et motivés.

Poussé à l’extrême, ce type de management vire au comportement bureaucrate, reposant sur la croyance que pour vivre heureux au travail, il faut vivre caché. Le manager ne s’implique pas dans les relations avec le personnel, et fonde sa gestion sur la mise en place de procédures et d’un grand formalisme.

DES APTITUDES QUI VARIENT SELON L’INTELLIGENCE UTILISÉE

Au-delà de ces quatre types de management, il existe aussi des qualités intrinsèques à chaque manager qui vont l’inciter à adopter préférentiellement certains comportements managériaux.

La théorie des intelligences multiples, défendue par le psychologue américain Howard Gardner, est développée depuis le début des années 80. Elle considère que nous disposons de différents types d’intelligence, que nous développons plus ou moins selon notre éducation et notre environnement. Ainsi, l’intelligence logique, qui peut être évaluée par les tests de quotient intellectuel, ne serait pas la seule à prendre en considération. Nous pouvons aussi être dotés d’une intelligence verbale, corporelle, émotionnelle ou spatiale, pour ne citer que les principales de la théorie qui ont une conséquence sur le style de management.

L’intelligence logique (ou logico-mathématique), la plus classiquement reconnue, est liée à l’aptitude à analyser, et au raisonnement séquentiel. Les managers dits rationnels sont ainsi capables de fractionner leurs objectifs finaux en tâches plus simples à mettre en œuvre pour les salariés.

Par exemple, donner au salarié l’objectif final de doubler le chiffre d’affaires de la clinique en pet-food est peu concret pour lui. En revanche, lui proposer de systématiquement aborder avec tous les clients (pour lesquels une fiche individuelle est créée) l’alimentation de leur animal peut constituer une première étape.

Les managers rationnels sont aussi capables de présenter des analogies entre le fonctionnement de l’entreprise et un tout autre domaine, plus imagé, comme celui du pilotage d’un avion, etc.

L’intelligence verbale est la capacité à maîtriser les subtilités du langage. Le manager doté d’une telle intelligence pèse chaque terme et s’évertue à employer un vocabulaire précis. On sait à quel point la communication entre les individus peut être complexe et, en matière verbale, un propos flou ouvre la porte à des interprétations multiples et à des inférences de la part de l’interlocuteur qui peuvent être fâcheuses. Au contraire, une consigne énoncée clairement favorise la réalisation de la tâche. De plus, des propos émis sans ambiguïté évitent qu’une phrase anodine soit perçue comme un reproche par le salarié.

L’intelligence verbale est donc une qualité essentielle pour un manager, elle pacifie les relations et permet d’affirmer sa position hiérarchique.

L’intelligence corporelle, complémentaire de l’intelligence verbale, sert à s’affirmer dans une équipe. Le manager à l’aise dans son corps dégage une assurance qui renforce sa position de responsable. Les individus qui sont au contraire mal à l’aise dans leur enveloppe corporelle, en raison d’une timidité excessive notamment, placent leurs interlocuteurs dans une situation d’inconfort et manquent de crédibilité. Plus on s’épanouit dans son corps, plus les rapports aux autres sont facilités. La pratique d’une activité théâtrale permet parfois de développer une aisance corporelle, le cas échéant. L’intelligence corporelle permet ainsi d’associer l’affirmation de soi et le sens du contact, tous deux favorables à un management efficace.

L’intelligence émotionnelle est liée à une capacité à ressentir ses propres émotions et, finalement, à mieux se connaître, ce que Howard Gardner nomme « intelligence intrapersonnelle ». Se connaître soi-même, être à l’écoute de son ressenti permet en outre de mieux comprendre les autres et mieux appréhender leurs émotions. Ainsi, un collaborateur en colère, qui pourrait susciter une certaine irritation réciproque chez le manager, alors enclin à réagir de façon autoritaire, sera perçu différemment s’il est capable de décoder les émotions : les siennes et celles d’autrui. L’emportement d’un salarié est souvent associé à une volonté de changement : un manager qui est capable de rester suffisamment serein peut ainsi faire retomber la tension en cherchant d’abord à comprendre ce que souhaite son interlocuteur.

Être conscient de ses propres tendances émotionnelles (colère, peur, etc.) permet de prendre du recul par rapport à celles-ci et d’améliorer son contact aux autres. Savoir évaluer ses propres travers, mais aussi ses ressources personnelles, sert à mieux mobiliser celles des salariés.

L’intelligence spatiale va bien au-delà de la représentation des espaces physiques : elle permet de se projeter hors du quotidien, donc d’être visionnaire. Elle est liée à la créativité et au sens de l’initiative, ô combien favorables au management de l’entreprise. Cette intelligence offre une vision systémique de la société, considérée comme un tout dont chaque élément la constitue. En situation difficile, elle permet une approche contextuée du cadre de travail et un recul suffisant pour chercher des solutions.

DE MULTIPLES FACTEURS ASSOCIÉS

Il n’existe pas un type de management idéal : la forme d’intelligence propre à chacun peut lui permettre d’effectuer le choix de gestion du personnel le plus adapté à la situation et à la personne. Il peut être fort profitable de chercher parfois à développer certaines formes d’intelligence que nous avons occultées (émotionnelle ou corporelle, notamment, car ce sont les moins valorisées dans notre culture) grâce à un travail de développement personnel. La gestion des ressources humaines doit être réfléchie dans toutes ses phases. Bien recruter une personne en adéquation avec le poste, la former, la suivre grâce à des entretiens réguliers, est indispensable pour envisager des relations plus sereines avec son personnel, qui auront des conséquences directes sur la satisfaction des clients. La relation avec ses salariés ne devrait pas être un combat dont il faut sortir gagnant, mais bien une collaboration harmonieuse dans laquelle chacun peut être bénéficiaire.

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