Les Français sont entre deux et dix fois plus traités aux antibiotiques que leurs animaux

Avec une consommation d’antibiotiques de 408 mg/kg/an en 2011, la médaille d’or revient à Chypre. L’argent va à l’Italie, à 370 mg/kg/an, et le bronze à l’Espagne, avec 249 mg/kg/an. Dans ces trois pays du podium européen de l’antibiothérapie vétérinaire, un découplage strict est appliqué. Seuls les pharmaciens peuvent y délivrer les médicaments vétérinaires.

Dans le troisième rapport annuel de l’European Surveillance of Veterinary Antimicrobial Consumption (Esvac) que vient de publier l’Agence européenne du médicament, les données datant de 2011 approchent de l’exhaustivité. Tous les grands pays fortement producteurs de viande ou de lait y ont participé, avec pour la première fois l’Allemagne, l’Italie et la Pologne. Seuls le Luxembourg, la Croatie, la Grèce et la Roumanie n’ont pas encore communiqué leurs ventes d’antibiotiques vétérinaires pour 2011. Ce rapport inclut toutefois trois autres États hors de l’Union européenne à 28, la Suisse et les deux pays les plus petits consommateurs d’antibiotiques et les plus au nord de l’Europe, la Norvège et l’Islande. Ce sont les seuls à en utiliser moins de 10 mg/kg/an. L’indice d’exposition retenu (en mg/kg de biomasse) reste imparfait, car il ne tient compte ni de la posologie ni de la durée du traitement, ni même des consommations par filières. Les animaux de compagnie sont exclus de ce calcul qui ne prend donc en considération que le poids (la biomasse) des productions animales (aquaculture incluse) et des chevaux. Aucune donnée d’exposition n’est ainsi présentée par espèce. Pourtant, le caractère extensif ou intensif des différentes productions influence les usages d’antibiotiques.

Un gradient Nord-Sud

Comme pour les molécules humaines, il y a bien une sorte de gradient Nord-Sud dans l’usage des anti-infectieux vétérinaires. Les pays d’Europe du Nord, la Scandinavie, ont cinq fois moins recours aux antibiotiques que la moyenne européenne (à 150 mg) et plus de dix fois moins que les trois pays méditerranéens sur le podium. Les plus petits et les plus gros consommateurs d’antibiotiques ont pourtant un point commun : ils appliquent un découplage assez strict. Seuls les pharmaciens peuvent les vendre aux éleveurs. Entre ces deux extrêmes (de 50 à 200 mg/kg), les antibiotiques sont toujours délivrés sur prescription, le plus souvent par les vétérinaires ou via des systèmes mixtes avec parfois des distributeurs de type “pharmacies vétérinaires spécialisées”.

Le couplage freine mieux les ventes

Le découplage n’est pas un modèle vertueux en termes de consommation. À l’inverse, le couplage prescription-délivrance permet de davantage la freiner. Ainsi, entre 2010 et 2011, les pays qui pratiquent ce couplage sont ceux qui ont réduit le plus fortement leurs consommations, avec les Pays-Bas (– 22 %), le Royaume-Uni (– 25 %) et la Hongrie (– 28 %) devant l’Autriche (– 14 %) et la France (– 11 %). Un seul État a augmenté son recours aux antibiotiques, l’Espagne (+ 3,5 %), où seuls les pharmaciens délivrent les antibiotiques… sur ordonnance. Mais la prescription de compérage ne fait alors que régulariser les achats des éleveurs. D’ailleurs, les rares exploitants français qui s’approvisionnent en Espagne ne le font pas sur la prescription de leur vétérinaire français…