Dermatoses chez les serpents : origines et symptômes - La Semaine Vétérinaire n° 1554 du 04/10/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1554 du 04/10/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : Julien Goin

Fonctions : assistant hospitalier au service “animaux d’espèces inhabituelles” d’Oniris (Nantes).

À l’instar des autres vertébrés, la peau des serpents est un organe étendu, en interaction avec le milieu extérieur, qui possède de multiples fonctions : rôle de protection contre la dessiccation, les traumatismes et les agents infectieux et parasitaires ; de thermorégulation ; de perception sensorielle, etc. L’épiderme est constitué d’écailles kératinisées. Le derme contient des cellules pigmentaires (chromatophores), mais est dénué de glandes sébacées et sudoripares. La couche épidermique superficielle est renouvelée lors de la mue, qui dure en moyenne dix à quinze jours, et dont la fréquence varie selon l’espèce, l’âge et le régime alimentaire notamment. Pendant cette période, la peau devient terne, les yeux opalescents, et le serpent a tendance à se baigner longuement (voir photo 1). L’ancienne peau se décolle au niveau des lèvres par le biais de frottements, puis d’une seule pièce en se retournant sur elle-même (voir photo 2).

SIGNES CLINIQUES

Les affections cutanées sont fréquentes chez les serpents. Des conditions d’élevage inadaptées en sont souvent à l’origine (chauffage mal réglé, hygrométrie excessive, substrat trop humide, etc.). Elles se traduisent par des signes cutanés “classiques” (érythème, croûtes, ulcères, plaies, abcès, etc.), des troubles de la mue (voir photos 3 et 4), du prurit (frottement contre les décors du terrarium, bains prolongés), voire, lors de cachexie sévère, par une peau fragile qui a tendance à se déchirer lors de la manipulation.

Dermatoses infectieuses

Les dermatoses infectieuses des serpents sont d’origine bactérienne ou fongique. Le plus souvent, les infections bactériennes mettent en jeu des germes Gram négatif (Aeromonas hydrophila, Pseudomonas aeruginosa, Bacteroides spp., entérobactéries de type Salmonella spp., Serratia spp., etc.). Les affections fongiques impliquent diverses espèces d’agents mycosiques (Aspergillus spp., Candida spp., Fusarium spp., etc.). Ces infections, rarement primaires, sont fréquemment secondaires à un traumatisme, à une immunodépression, à une hygrométrie excessive, etc. Elles se traduisent souvent par une décoloration des écailles, parfois associée à leur chute (voir photos 5 et 6). Elles peuvent évoluer en abcès, constitué d’un noyau central de pus caséeux, solide ou pâteux, entouré par une capsule épaisse et fibreuse (voir photo 7).

DERMATOSES PARASITAIRES

Les dermatoses parasitaires sont fréquentes, et principalement représentées par la pseudo-gale ophionyssique à Ophionyssus natricis. Cet acarien hématophage est macroscopiquement visible sous la forme de petits grains, noirs à rougeâtres, situés dans les zones à peau fine (région péri-oculaire, face ventrale du cou, espaces entre les écailles ventrales), ainsi que dans le terrarium (substrat et gamelle d’eau, voir photos 8 et 9). Il est considéré comme le vecteur potentiel de différents agents pathogènes (paramyxovirus et virus de la maladie des corps d’inclusions entre autres). Il peut être responsable d’un prurit et d’une anémie. Les tiques sont également rencontrées, notamment chez les individus issus d’un prélèvement en milieu naturel : Amblyomma spp., Hyalomma spp. (famille des Ixodidés), Ornithodoros spp. (famille des Argasidés), etc.

DERMATOSES D’ORIGINE ENVIRONNEMENTALE OU TRAUMATIQUE

→ La maladie des ampoules (ou blister disease) est une dermatite ventrale, secondaire à un substrat excessivement humide (par exemple en cas d’arrosage par le propriétaire en vue d’augmenter l’hygrométrie, de renversement accidentel de la gamelle d’eau) ou sale (lors de diarrhée, d’hygiène insuffisante). Cette affection commune se traduit par l’apparition d’ampoules en regard des écailles ventrales, qui percent, se surinfectent et deviennent croûteuses (voir photos 10 et 11).

→ Les brûlures sont fréquentes, car la nature poïkilotherme et ectotherme des reptiles contraint à installer, au sein du terrarium, un système de chauffage (tapis, câble ou ampoule selon l’espèce et le type de terrarium). Un chauffage inadapté, trop puissant, mal thermostaté ou non protégé, ou encore un gradient thermique mal réalisé avec une chaleur trop focalisée (par exemple utilisation d’un rocher chauffant), peut conduire à l’apparition de brûlures. Leur survenue est favorisée par le comportement particulier des reptiles, qui les rend capables de rester en contact avec l’élément chauffant plusieurs heures avant de se soustraire à la brûlure, voire parfois jusqu’à la mort. L’origine de cette absence de réactivité est inconnue. Elle n’est pas consécutive à l’absence de douleur (la peau des reptiles possède des récepteurs nociceptifs), mais peut être due à la carence de ce type de situation à l’état naturel, puisque les reptiles se thermorégulent, chez de nombreuses espèces, par l’exposition aux rayons solaires. Les brûlures, plus ou moins profondes, ressemblent cliniquement à la blister disease, avec la formation d’ampoules qui se percent et se surinfectent. Après la guérison, une cicatrice dépigmentée, présentant des écailles plus petites et désorganisées, voire absentes, peut apparaître.

→ Les morsures sont consécutives à des attaques de congénères (serpents nourris simultanément au même endroit) ou, le plus souvent, de proies (rongeurs, rat notamment). Les plaies de morsure sont parfois sévères (avec une abcédation, des lésions crâniennes ou vertébrales, une perforation cœlomique), voire mortelles. Par précaution, il convient de nourrir si possible les serpents séparés les uns des autres, et avec des proies mortes.

→ L’abrasion rostrale, consécutive aux frottements répétés du serpent contre les parois transparentes de son terrarium (grillage, vitre, plexiglas) lors d’une tentative d’évasion, est possible, mais beaucoup moins fréquente que chez les lézards.

TUMEURS CUTANÉES

Plusieurs types tumoraux cutanés et sous-cutanés sont décrits chez les reptiles (carcinome épidermoïde, fibrosarcomes, lipomes, mastocytomes, mélanomes, etc., voir photo 12), mais ces affections restent peu répandues par comparaison avec les autres types de dermatoses.

Les particularités thérapeutiques chez les serpents et le traitement de leurs dermatoses feront l’objet d’un article dans un prochain numéro.

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