« Ce rapport formule des constats pertinents, mais ne va pas suffisamment loin » - La Semaine Vétérinaire n° 1553 du 27/09/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1553 du 27/09/2013

Entretien avec Benoit Assémat

Dossier

Que pensez-vous du rapport d’information sur la filière viande ?

Ce rapport aborde de nombreux sujets et il formule des constats pertinents, mais il ne va pas assez loin sur les mesures concrètes à mettre en œuvre. On reste vraiment sur sa faim en termes de propositions. Les crises sanitaires dans le domaine alimentaire existent depuis longtemps, et plusieurs rapports se sont succédé, notamment en mars 2000 avec le rapport de Félix Leyzour et de Daniel Chevalier, réalisé au nom de la commission d’enquête sur la transparence et la sécurité sanitaire de la filière alimentaire en France. Des propositions pertinentes avaient été faites, notamment sur la réorganisation nécessaire du dispositif de surveillance et de contrôle. Au fil des années, nous avons l’impression que même les parlementaires ne prennent pas en compte les propositions précédentes. Ainsi, ce nouveau rapport dresse le constat des points faibles, mais les propositions manquent. Les dimensions européennes, qu’il s’agisse de la complexification des circuits commerciaux ou des règles applicables en matière de contrôle, sans oublier le problème du financement, sont des points majeurs à prendre en compte. Compte tenu du contexte actuel des finances publiques, si les propositions n’intègrent pas la problématique du financement, elles ne pourront pas aboutir. Or, aussi bien pour les filières agro-alimentaires que pour les consommateurs, il est indispensable d’assurer sur le long terme et en temps de paix le financement du dispositif de surveillance sanitaire, auquel les vétérinaires apportent une contribution essentielle dans les filières animales.

Les vétérinaires et les services de contrôle de l’État sont pourtant pointés comme un maillon essentiel de la chaîne alimentaire, non ?

Oui, ce constat est pertinent mais, par ailleurs, la DGAL et la DGCCRF sont décrites dans le rapport comme si les deux systèmes cohabitaient en harmonie et en synergie. Or, dans les faits, ce n’est pas le cas. Et aucune proposition n’est faite pour que les deux entités fonctionnent réellement ensemble. Il faut mettre en place un dispositif unifié réunissant toutes les compétences dans les domaines de la sécurité sanitaire, de la qualité et de la traçabilité. En effet, ces notions sont distinctes, mais étroitement liées entre elles. C’est à cette condition que l’on pourra rétablir la confiance entre les filières de production et les consommateurs, mais également avec les pouvoirs publics.

Les récentes crises sur la viande de cheval sont-elles plus de l’ordre de la fraude que du scandale sanitaire ?

On nous dit que les enjeux de la viande de cheval ne sont pas d’ordre sanitaire, mais je crois qu’il faut éviter de dissocier les enjeux sanitaires de la traçabilité. On ne peut pas dire que, s’il y a des trafics, il n’y a pas de problème sanitaire ! Face à ces risques, des propositions existent, mais le rapport n’a pas été sur ce terrain. Il a pourtant été initié à la suite du scandale de la viande de cheval, c’est donc un point de faiblesse. La filière du cheval est la seule pour laquelle l’équarrissage fonctionne de façon différente des autres espèces de production. L’enlèvement d’un cheval mort est onéreux (jusqu’à 900 € la tonne) et est à la charge intégrale du détenteur. S’il n’y a pas de mutualisation du coût de l’enlèvement, cela crée pour certains propriétaires une forte incitation financière à frauder, avec les conséquences sanitaires que chacun connaît, et l’enfouissement qui semble se développer. Un autre point essentiel fragilise le système : il n’existe pas de bases de données dans certains pays et aucune coordination n’est mise en place à l’échelle européenne. Donc, la traçabilité des équidés est plus incertaine et ouvre la porte aux trafics. La fin de vie est problématique chez les équidés, car elle est onéreuse. Avec son statut d’animal de rente, les fraudeurs tentent de recycler des chevaux au statut médicamenteux inconnu pour récupérer la valeur bouchère. Si l’Europe réfléchissait à un temps d’attente forfaitaire, permettant la réintroduction des équidés dans la chaîne alimentaire sous le contrôle du vétérinaire, cela résoudrait le problème des propriétaires qui n’ont pas les moyens d’assumer le coût de la fin de vie de leur animal. Les nouvelles études sur les résidus médicamenteux de la phénylbutazone pourraient aider à une telle prise de conscience. Un premier pas consisterait à introduire ce médicament dans la liste des substances essentielles du règlement LMR, mais il faut aller plus loin, avec un délai d’attente forfaitaire.

Le rapport envisage des effectifs supplémentaires pour les contrôles. Est-ce pertinent et suffisant ?

C’est indispensable, mais il faudrait mettre en place un dispositif vertueux de redevances sanitaires, dans l’esprit des principes de financement fixés au niveau européen. Le rapport n’aborde pas ce point. Des effectifs supplémentaires ne régleront pas tout. Il persiste une sorte de refus d’aborder le problème de fond. Il faudrait espérer qu’en période calme, on puisse refonder le dispositif de surveillance et de contrôle, prenant en compte toutes les dimensions, y compris celles relatives au financement du mandat sanitaire et aux analyses de contrôle officiel, dans le cadre du maintien sur l’ensemble du territoire du maillage constitué par les vétérinaires et les laboratoires d’analyses.

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