Un cas d’hydromètre chez une lapine - La Semaine Vétérinaire n° 1551 du 13/09/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1551 du 13/09/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : Marianne Verry*, Samuel Sauvaget**, Emmanuel Risi***

Fonctions :
*praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique).
**praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique).
***praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique).

CAS CLINIQUE

Anamnèse

Une lapine non stérilisée de sept ans, vivant seule, est référée pour une dilatation abdominale depuis quelques jours. Le vétérinaire référent souhaite explorer l’origine de la présence d’un liquide transparent qu’il a ponctionné dans l’abdomen. L’appétit est conservé, mais l’animal est amaigri.

Examen clinique

La lapine est maigre sans être cachectique. Elle reste alerte. Une nette distension abdominale est visible (voir photo 1), empêchant la palpation de tout autre organe. La locomotion est rendue difficile par le volume du ventre. L’auscultation cardiaque est normale. Une tachypnée modérée est constatée. L’examen buccal permet la découverte d’une élongation coronaire de la PM1 maxillaire droite avec une ulcération de la joue droite en regard de cette dent.

Hypothèses diagnostiques et examens complémentaires

Face à cette distension associée à la présence d’un liquide dans l’abdomen, plusieurs hypothèses sont avancées. La distension abdominale peut être liée soit à la présence d’un épanchement (exsudat ou transsudat étant donné l’apparence du liquide ponctionné), soit à la dilatation et à la collection de liquide dans un organe creux de la cavité abdominale, par exemple l’utérus (une gestation, une métrite, un hydromètre, un pyomètre, etc.). Face aux résultats des examens complémentaires (voir tableau), un diagnostic d’hydromètre est établi. Le traitement de choix est l’ovariohystérectomie.

Traitement chirurgical

La lapine est prémédiquée avec de la buprénorphine (0,05 mg/kg par voie sous-cutanée) et du midazolam (1 mg/kg par voie intramusculaire). Puis l’induction est effectuée avec du sévoflurane au masque (de 4 à 7 % progressivement, 1 l/min d’oxygène). L’intubation est réalisée grâce à une sonde trachéale de 2 mm. L’anesthésie est ensuite entretenue avec du sévoflurane (3 %). Un cathéter 24G est posé à la veine céphalique gauche et l’animal est perfusé à 15 ml/kg/h pendant toute l’intervention. Du méloxicam (0,3 mg/kg par voie sous-cutanée) et de la pénicilline G (40 000 UI/kg) sont injectés juste avant l’opération.

Après une tonte large et la désinfection de l’abdomen, la lapine est installée au bloc opératoire sur un tapis chauffant, les membres postérieurs maintenus en légère extension, avec pour assurer le monitoring un électrocardiogramme, un capnomètre et un oxymètre de pouls.

Une laparotomie de 5 cm est entreprise, juste caudalement à l’ombilic. Les cornes utérines remplies de liquide (surtout la droite) sont alors extériorisées (voir photo 3). Un clamp puis une ligature sont posés au niveau du pôle vasculaire des deux ovaires avec du fil tressé résorbable 4-0. Le pôle vasculaire est ensuite sectionné et l’hémostase vérifiée. L’extériorisation du reste de l’utérus et du vagin permet d’observer un vagin flasque totalement rempli de liquide (voir photo 4). Ce dernier est vidangé par voie naturelle avant la pose d’un clamp et de deux ligatures transfixiantes le plus profondément possible sur le vagin. Après la section de ce dernier, l’ensemble de l’appareil génital est sorti de la cavité abdominale et celle-ci est refermée. Le plan musculaire est suturé par un surjet simple avec du fil tressé résorbable 4-0. La peau est ensuite suturée par un surjet simple avec du fil monofilament non résorbable 4-0. Avant de réveiller l’animal, une abrasion de la dent PM1 maxillaire droite, ainsi qu’une désinfection à la chlorhexidine de l’ulcère jugal à droite sont pratiquées.

Suivi postopératoire

Le réveil s’effectue dans une couveuse maintenue entre 28 et 30 °C. L’animal est perfusé pendant les 24 premières heures postopératoires à un débit de 2,5 ml/kg/h. La douleur est gérée au moyen d’injections de buprénorphine (0,05 mg/kg, par voie sous-cutanée, deux à trois fois par jour au besoin) et de méloxicam (0,3 mg/kg, par voie sous-cutanée, une fois par jour). Au cours des 24 premières heures, la lapine ne s’alimente pas spontanément et est nourrie à la seringue (Recovery Suprême Food(r), 20 à 30 ml, deux fois par jour). Rapidement, elle recommence à s’alimenter spontanément, mais les gavages sont continués pour l’aider à reprendre de l’embonpoint. Elle est rendue à ses propriétaires en bon état général, trois jours après l’intervention chirurgicale.

Lors de la visite de contrôle pour le retrait des points cutanés, dix jours plus tard, l’animal est vif, se déplace facilement et a repris 200 g.

DISCUSSION

L’hydromètre est une accumulation de liquide séreux dans l’utérus. Il est décrit en particulier chez les lapins de souche néo-zélandaise. La pro­gestérone produite par le corps jaune durant une pseudogestation induit un développement mammaire, mais aussi utérin, qui peut dégénérer en hydromètre ou en pyomètre.

La pseudogestation est possible même chez des lapines de compagnie qui vivent seules.

Les signes cliniques incluent généralement un utérus dilaté et rempli de fluide, une fréquence respiratoire augmentée, une anorexie et une perte de poids.

Une ponction transabdominale de la cavité utérine permet de récolter un liquide clair avec une faible densité, contenant peu ou pas de cellules et de protéines. Cette ponction, de préférence échoguidée, est possible sans être nécessaire au diagnostic et peut se révéler risquée, car parfois la paroi utérine se déchire.

Le diagnostic est majoritairement orienté grâce à l’échographie, même si, dans certains cas, il est possible de soup­çonner fortement un hydromètre sur une radiographie ab­dominale. Dans la plupart des cas cités dans la littérature, il n’existe pas de prédisposition anatomique à l’apparition de l’hydromètre et les lapines atteintes sont généralement peu symptomatiques. Compte tenu du risque élevé de torsion utérine, mais aussi de l’amaigrissement assez rapide associé à cette dilatation de l’utérus, le traitement chirurgical est relativement urgent. Cependant, si le diagnostic est établi à temps, l’ovariohystérectomie associée à un traitement de soutien post­opératoire peut être couronnée de succès.

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