La réorganisation du contrôle sanitaire fait débat - La Semaine Vétérinaire n° 1543 du 07/06/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1543 du 07/06/2013

Projet de loi d’avenir agricole

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Auteur(s) : Nathalie Devos

Un projet élaboré par le CGAAER1 propose une nouvelle organisation des services d’inspection sanitaire et du réseau de laboratoires publics via la création d’un établissement public de la sûreté sanitaire de l’alimentation. Ce projet semble toutefois tué dans l’œuf.

Trois ans après la mise en œuvre effective de la révision générale des politiques publiques (RGPP), le projet dit de loi d’avenir agricole pourrait une nouvelle fois bouleverser l’organisation sanitaire en France. Mais pas selon le projet élaboré par le CGAAER, même s’il n’a pas encore été examiné par le ministre, car lors d’une réunion avec le Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (Cnopsav) en mai dernier, Patrick Dehaumont, directeur général de l’alimentation, a déclaré que « le contexte actuel ne se prête pas à la création d’un établissement public ».

Néanmoins, nous nous sommes procurés une partie du rapport du CGAAER, non rendue publique, consacrée à l’organisation nationale des services d’inspection sanitaire et du réseau de laboratoires, dont voici les grandes lignes. Premier constat : « Les données officielles montrent que, depuis sept ans, les moyens humains et financiers affectés à la sécurité sanitaire des aliments sont en constante réduction. Le secteur a perdu 1 000 équivalents temps plein (ETP), soit presque un cinquième de ses effectifs, avec l’impact que cela a pour des services qui ont la charge de contrôler plus d’un million d’établissements. » Deuxième constat des rapporteurs : « L’impossibilité dans laquelle les conseils généraux se sont trouvés d’organiser de manière coordonnée le développement de leurs laboratoires départementaux d’analyse (LDA), ce qui a conduit à une surcapacité analytique très importante de l’ensemble de ces derniers. » Enfin, à la suite du transfert de nouvelles compétences (dans le domaine social notamment) ayant un impact budgétaire lourd, certains départements réfléchissent à conserver ou non leur LDA, par exemple lors de non-rentabilité. Des solutions “intermédiaires” (changement de statut du laboratoire, mutualisation interdépartementale) ont été prises dans certains cas, ce qui a réduit le nombre de LDA de 88 à 75 entre 1988 et 2012. Toutefois, ces “initiatives” ne règlent pas la question de fond, estime le CGAAER.

Une tutelle interministérielle du sanitaire alimentaire non exclue

Pour y remédier, il propose dans son rapport de créer un établissement public de la sûreté sanitaire de l’alimentation (Epssa). Il serait chargé, pour le compte de l’État, de toutes les actions d’inspection et de contrôle liées à la sécurité sanitaire des aliments (de la production à la consommation). L’Epssa serait constitué par l’État et, sur une base volontaire, par les collectivités départementales, notamment celles qui sont propriétaires d’un laboratoire d’analyses. La tutelle de l’établissement serait exercée par le ministre de l’Agriculture. Mais, précisent les auteurs du rapport, cette disposition pourrait évoluer dans un second temps vers une tutelle interministérielle (Agriculture, Finances et Santé).

Le conseil d’administration de l’Epssa serait constitué a minima de représentants de l’État et des conseils généraux, mais aussi de représentants de la société civile concernés par les différents secteurs d’intervention de l’établissement (production, transformation, distribution, consommation, protection animale, etc.) nommés par arrêté du ministre de l’Agriculture. Quant au personnel de l’Epssa, il regrouperait des cadres et des agents techniques et administratifs relevant du programme 206 “sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation” actuellement en fonction dans les services déconcentrés de l’État (côté vétérinaire), ainsi que ceux qui exercent dans les laboratoires d’analyses appartenant aux départements membres de l’Epssa, et ceux en fonction dans les laboratoires nationaux de référence actuellement rattachés à l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Le recrutement d’experts du privé n’est pas à exclure, peut-on aussi lire dans le rapport. Au passage, cette nouvelle organisation met le devenir des actuelles DDPP2 en suspens.

Le financement de l’Epssa serait constitué du budget du programme 206, ainsi que de celui actuellement octroyé à l’Anses pour ses laboratoires de référence et/ou les recettes des redevances sanitaires prévues par la législation communautaire, une possibilité ouverte par le statut d’établissement public. À cela s’ajoutent des contributions financières des départements membres de l’Epssa (qui correspondent aux “subventions d’équilibre” des LDA), ainsi que des redevances “pour services rendus” payées par les professionnels lorsqu’une inspection de leur établissement est effectuée à leur demande.

La délégation de missions exercées actuellement par les vétérinaires

Outre l’exécution des missions qui lui sont déléguées, l’Epssa sera chargé d’adapter les capacités analytiques des laboratoires qui font partie de son organisation, tant en matière de référence que de diagnostic, et de renforcer les capacités opérationnelles des services de contrôle sanitaire.

Concrètement, cela devrait conduire à faire travailler les laboratoires en réseau, expliquent les auteurs, afin que les analyses réclamant des équipements coûteux, par rapport aux nombres d’essais réalisés annuellement, soient concentrées dans le nombre d’unités strictement nécessaire.

Cette rationalisation devrait se traduire par une réduction du nombre des laboratoires qui pratiquent un type donné d’analyses (avec maintien toutefois d’une répartition appropriée sur le territoire), associée à la réorientation de certains agents des laboratoires vers des missions exercées actuellement par des agents des services vétérinaires. Les rapporteurs donnent pour exemple celui des prélèvements à réaliser dans le cadre des plans de surveillance et des plans de contrôle.

Les analyses officielles uniquement du ressort de l’Epssa

Pour le CGAAER, ce projet, qui consiste pour le ministère de l’Agriculture à confier à l’Epssa l’ensemble des actions de terrain, permettrait à la Direction générale de l’alimentation (DGAL), dont les moyens en personnel ne sont plus adaptés, de se recentrer sur celles qu’elle est seule à pouvoir conduire : négociations européennes et internationales, élaboration de la réglementation et du plan national d’inspection et d’analyses, mais aussi nouvelles missions (simplification des normes en vigueur, etc.).

Par ailleurs, dans les six mois qui suivraient sa création, l’Epssa ferait réaliser dans ses laboratoires la totalité des analyses officielles issues de l’exercice des missions qui lui sont confiées. Les agréments des laboratoires des collectivités non parties prenantes à l’Epssa, ainsi que de tout autre laboratoire auquel sont actuellement confiées des analyses officielles dans le domaine alimentaire, seraient donc voués à disparaître.

  • 1 Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux.

  • 2 Direction départementale de la protection des populations.

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