Des avancées dans la compréhension des génodermatoses - La Semaine Vétérinaire n° 1543 du 07/06/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1543 du 07/06/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : CATHERINE ANDRÉ*, Laurent Masson**

Fonctions :
*équipe “génétique du chien”, CNRS de Rennes. Article tiré d’une conférence présentée aux journées du Gedac, en avril 2013.

Ces dernières années, des progrès ont été réalisés en génétique canine. Ils se sont traduits par le développement de tests génétiques. Les dernières journées du Groupe d’étude des animaux de compagnie (Gedac) de l’Afvac, dont le thème principal était les prédispositions raciales, ont été l’occasion de présenter l’état des connaissances et les outils disponibles dans ce domaine.

MALADIES GÉNÉTIQUES CHEZ LE CHIEN

Avec près de 400 races, l’espèce canine possède d’une part une forte variabilité raciale (diversité morphologique, comportementale, etc.), et d’autre part une grande homogénéité au sein d’une même race : « Ce sont des isolats génétiques. » Cela est le fruit de l’utilisation d’un nombre réduit d’étalons champions, et d’une sélection stricte pour fixer les caractères souhaités. Malheureusement, les pratiques d’élevage ont conduit également à la sélection de caractères non souhaités et à la conservation d’allèles mutés responsables de maladies génétiques monogéniques ou de combinaisons d’allèles responsables de maladies génétiques complexes.

Au final, une forte incidence des maladies génétiques est constatée chez le chien. Le changement d’une base, d’un allèle sur l’un des chromosomes, voire une modification 3D de l’enroulement des brins d’ADN peuvent conduire à une maladie génétique. Environ 500 sont répertoriées chez le chien, au lieu de 5 000 chez l’homme. Par ailleurs, alors qu’une maladie humaine comme la mucoviscidose est présente chez “seulement” 0,02 à 0,1 % de la population, la prévalence des maladies génétiques chez le chien peut atteindre 20 % dans une race donnée.

Cependant, selon Catherine André, « s’il ne faut pas éliminer systématiquement de la reproduction des chiens seulement porteurs, il ne faut pas non plus en garder trop. Le juste milieu est difficile à trouver. Les tests génétiques peuvent aider l’éleveur dans ses choix de reproducteurs. En fait, cette sélection doit prendre en compte de nombreux facteurs, dont la gravité de la maladie, l’effectif de la race, le choix de l’éleveur pour les autres critères (chasse, beauté, etc.). Il convient de prendre conscience du fort taux de consanguinité chez certaines races, qui nuit à la santé des chiens : il n’est pas rare qu’un faible pourcentage seulement de mâles soit à l’origine de la moitié des individus de la génération suivante ! Si un allèle responsable d’une maladie génétique est présent chez ces mâles, il va se “propager” rapidement et fortement au sein de la race en question ».

DÉPISTAGE DES MALADIES GÉNÉTIQUES

Le génome canin est aujourd’hui bien connu, avec l’établissement des cartes comparatives entre espèces (souris, homme, etc.). Le séquençage du génome canin en 2005 et le développement d’outils de recherche biomédicale (sondes chromosomiques, marqueurs, “puces SNP”, biobanque Cani-DNA, etc.) permettent de réaliser des analyses et de déceler des altérations responsables ou prédisposant à des maladies génétiques. En pratique, l’allèle transmis des parents aux chiots atteints est recherché en criblant la totalité du génome et en détectant une association forte entre certains marqueurs et le développement de la maladie. Pour obtenir une puissance statistique suffisante, une vingtaine de chiens sains et autant de chiens atteints sont nécessaires lors de maladie monogénique. Il en faut deux lots d’une centaine pour une maladie multigénique. La difficulté tient alors à l’obligation de diagnostiquer correctement les chiens atteints et de bien déterminer qu’un individu est sain. C’est à ce stade qu’intervient le vétérinaire. Catherine André a en outre précisé qu’un chien sain est cliniquement indemne, mais éventuellement hétérozygote muté (porteur).

Au final, ces recherches génétiques présentent plusieurs intérêts :

→ pour la santé des chiens (dépistage et diagnostic) ;

→ pour la médecine humaine (pathologie comparée, transfert des connaissances chez l’homme au travers des groupes de travail), car le chien bénéficie d’un suivi médical qui se rapproche de celui de l’homme, partageant les mêmes modes de vie et possédant une physiologie comparable ;

→ pour la découverte de la fonction de nouveaux gènes, car même si ces derniers sont connus, leur fonctionnement ne l’est pas toujours ;

→ pour le développement de nouveaux médicaments, de nouvelles thérapies au bénéfice du chien comme de l’homme.

APPLICATIONS EN DERMATOLOGIE

Les travaux menés par l’équipe de Catherine André ont permis de progresser dans la connaissance de certaines affections dermatologiques qui touchent une forte proportion d’individus au sein d’une même race : l’ichtyose chez le golden retriever, les kératodermies nasales et plantaires chez le dogue de Bordeaux et l’irish terrier, les mélanomes buccaux et cutanés dans différentes races. Au cours de sa présentation, Catherine André a détaillé les travaux menés sur l’ichtyose, fréquente chez le golden retriever. Après sa caractérisation sur les plans clinique et histopathologique, son mode de transmission et le gène responsable ont été déterminés. Point fort avantageux chez le chien, « le même gène et la même mutation sont toujours responsables de la maladie dans une race déterminée, alors que chez l’homme, en raison de la grande hétérogénéité génétique entre les personnes, il existe de nombreuses mutations au sein d’une même population ». Les analyses génétiques, avec 50 000 marqueurs répartis uniformément sur le génome, ont permis d’identifier une région du chromosome 12 canin, puis une mutation dans le gène PNPLA1 via le séquençage des gènes candidats. Enfin, la validation de la mutation a été obtenue par un criblage sur 250 golden retrievers dont le statut était connu, et chez 300 chiens d’autres races indemnes. À l’issue de ces recherches, « l’identification de ce gène chez le chien a permis non seulement de découvrir la cause de l’ichtyose chez le golden retriever, mais aussi un huitième gène d’ichtyose de type Arci chez l’homme (ichtyoses congénitales autosomiques récessives), dévoilant ainsi le rôle de l’enzyme pour laquelle ce gène code, inconnue jusqu’alors », a souligné Catherine André.

RÔLE DES VÉTÉRINAIRES

Les progrès à venir ne demandent qu’une collaboration encore plus développée entre les vétérinaires, les éleveurs et l’équipe “génétique du chien”. Actuellement, un travail de recherche est mené sur les mélanomes chez le caniche, le schnauzer, le rottweiler et d’autres races, ainsi que sur la kératodermie naso-plantaire chez le dogue de Bordeaux et l’irish terrier. Il nécessite le recueil d’échantillons sanguins chez des chiens sains et atteints, ainsi que leurs apparentés.

QU’ATTENDRE DES TESTS GÉNÉTIQUES ?

Les analyses génétiques testent une région du génome en analysant les deux copies du gène. Pour une maladie monogénique “simple”, ils permettent de savoir si le chien est homozygote sain (donc s’il peut être destiné à la reproduction), homozygote atteint ou hétérozygote (porteur). Mais ils ne permettent pas d’exclure une forme clinique très proche de la maladie si celle-ci en compte plusieurs. C’est pourquoi l’examen clinique demeure primordial : le test génétique n’est qu’un examen complémentaire pour affirmer ou infirmer le diagnostic.

Lors de maladie monogénique, grâce à la connaissance du statut génétique des parents, il est possible de prévoir les proportions de chiens homozygotes sains, homozygotes atteints et hétérozygotes dans la descendance. Par exemple, l’union de deux individus porteurs de la mutation de l’ichtyose conduit à 25 % de chiots sains, 50 % de porteurs sains et 25 % de malades. Selon Catherine André, s’il ne faut toutefois pas exclure systématiquement de la reproduction les sujets porteurs, il est indispensable de les accoupler à des chiens sains.

En revanche, aucune prévision n’est possible lors de maladie multigénique.

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