Un cas de maladie inflammatoire des intestins chez un furet - La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013

Formation

NAC

Auteur(s) : LAURIANE DEVAUX*, SAMUEL SAUVAGET**, EMMANUEL RISI***

Fonctions :
*praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)
**praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)
***praticiens au CHV Atlantia à Nantes (Loire-Atlantique)

CAS CLINIQUE

Un furet mâle stérilisé de quatre ans est présenté en consultation pour des vomissements chroniques, des fèces molles et granuleuses évoluant depuis quatre mois, associés à une anorexie depuis 24 heures. Deux ans auparavant, il a fait l’objet d’une suspicion d’infection par le virus de l’entérite catarrhale épizootique, à la suite d’un contact avec un fureton porteur. Une polymerase chain reaction (PCR) sur fèces a été réalisée, mais est revenue négative. Les symptômes de gastro-entérite ont rétrocédé après l’administration d’antibiotiques, de pansements digestifs et d’une corticothérapie. Un régime alimentaire a été mis en place en vue d’une reprise de poids, qui n’a cependant pas dépassé 1 kg.

L’administration de ce même traitement n’a pas entraîné d’amélioration de l’état de l’animal.

L’examen clinique révèle une maigreur et un abattement marqués. Le furet est déshydraté et présente une gêne à la palpation abdominale. Il est hospitalisé en vue d’une réhydratation et afin d’explorer l’origine des symptômes.

Examens complémentaires

L’animal est anesthésié (oxygène et isoflurane) pour l’échographie abdominale. Une voie veineuse est posée à la veine céphalique droite et un prélèvement sanguin est effectué au niveau de la veine cave craniale. La biochimie sanguine et la numération formule ne révèlent aucune anomalie.

L’échographie abdominale met en évidence une ascite en quantité modérée. La paroi des anses intestinales est épaissie, notamment au niveau de la muqueuse (jusqu’à 2 mm d’épaisseur), les nœuds lymphatiques mésentériques sont hypertrophiés et la graisse mésentérique est hyperéchogène. Ces signes sont compatibles avec l’évolution d’une maladie inflammatoire chronique intestinale. Cependant, l’hypothèse d’un processus cancéreux diffus, de type lymphome, ne peut être écartée.

Une biopsie étagée de la paroi digestive intestinale est réalisée par cœlioscopie (avec un endoscope rigide de 2,7 mm et 30° recouvert d’une chemise avec un canal opérateur et un robinet à trois voies). La paroi est suturée par un point non perforant au monofilament résorbable 5-0. La même opération est répétée une seconde fois, sur une portion plus distale de l’intestin grêle. La paroi abdominale et la peau sont ensuite suturées.

Avant le réveil de l’animal, une gastroscopie est réalisée afin d’obtenir un prélèvement de muqueuse gastrique. Elle permet également la mise en évidence d’une inflammation sévère des muqueuses œsophagienne et stomacale, associée à la présence d’une bride œsophagienne dans la portion proximale.

Tous les prélèvements sont conservés dans du formol en vue d’une analyse histologique.

Traitement

Le furet est hospitalisé pendant quatre jours. Dans l’attente des résultats d’analyses, un traitement antibiotique à large spectre est mis en place par voie orale (amoxicilline et acide clavulanique à la dose de 15 mg/kg et métronidazole à 10 mg/kg, deux fois par jour). Il est associé à l’administration de pansements digestifs (phosphate d’aluminium) et d’antiacides injectables (ranitidine à raison de 3,5 mg/kg, deux fois par jour). Comme les antibiotiques administrés par voie orale provoquent des vomissements, ils sont remplacés, après 24 heures, par une formulation injectable.

Un protocole de réalimentation est instauré, avec des gavages quatre fois par jour, alternant du blanc de poulet mixé et un mélange de Carnivore Care®. Au cours de l’hospitalisation, le poids de l’animal se stabilise, mais n’augmente pas, et les vomissements se font plus rares.

Le furet sort avec le même traitement par voie orale, et la cimétidine en comprimés remplace la ranitidine.

Suivi

L’analyse histologique révèle l’existence d’une gastro-entérite éosinophilique et lympho-plasmocytaire. De la prednisolone (à la dose de 1 mg/kg/j, en deux prises) est ajoutée au traitement initial. Face à la lourdeur du traitement, aux difficultés croissantes de l’administration des médicaments et du gavage, et en raison du pronostic réservé, les propriétaires choisissent d’euthanasier l’animal.

DISCUSSION

La maladie inflammatoire des intestins (inflamatory bowel disease, IBD) est une cause courante de gastro-entérite chez le furet. Elle se caractérise le plus souvent par une infiltration lymphoplasmocytaire de la muqueuse digestive. Une infiltration éosinophilique est plus rare, mais a déjà été décrite. Les cellules inflammatoires envahissent alors la muqueuse, la sous-muqueuse et la musculeuse de l’estomac et de l’intestin grêle. Des granulomes éosinophiliques peuvent occasionnellement être mis en évidence dans les nœuds lymphatiques mésentériques ou dans certains organes abdominaux. L’origine de la maladie inflammatoire des intestins reste, à ce jour, inconnue, mais une intolérance alimentaire, une hypersensibilité ou une réaction immunitaire aberrante peuvent être impliquées. Dans le cas de la gastro-entérite éosinophilique, aucun agent pathogène n’a pu être mis en évidence, mais dans la plupart des cas, une allergie alimentaire est en cause.

Les furets atteints sont en général jeunes et présentent le plus souvent des signes frustes ou chroniques. Lors d’une gastro-entérite éosinophilique, les signes sont souvent plus sévères, avec une diarrhée et une perte de poids importantes. L’anorexie, les vomissements et la déshydratation ne sont pas systématiquement décrits.

L’examen clinique seul ne permet pas de différencier ces maladies d’une gastro-entérite virale (entérite catarrhale épizootique notamment), d’une gastro-entérite à Helicobacter ou d’une obstruction par un corps étranger. Bien que ce soit rarement le cas, la gastro-entérite peut aussi constituer une réponse à une infestation parasitaire. Il est donc complété par des commémoratifs précis (contagiosité, traitements antiparasitaires), un test de recherche de l’entérite catarrhale épizootique, des examens d’imagerie médicale (radiographie, échographie) et un bilan sanguin. Le diagnostic de certitude passe par une analyse histologique de biopsies stomacales et intestinales.

Le traitement consiste à supprimer la réaction immunitaire et à établir un régime alimentaire adapté. L’administration de prednisolone (à raison de 1 mg/kg/j) permet le plus souvent une régression des signes cliniques, mais certains furets ne répondent pas bien à ce traitement. L’azathioprine (à la dose de 0,9 mg/kg toutes les 24 à 72 heures) est un traitement alternatif souvent bien toléré. Un régime hypoallergénique peut être mis en place, mais le furet accepte difficilement les changements d’alimentation. Idéalement, l’aliment proposé doit afficher un taux de protéines élevé et être exempt de toutes protéines végétales.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr