Morphiniques et anesthésies loco-régionales améliorent l’analgésie

L’association de plusieurs molécules analgésiques, appelée analgésie multimodale, permet d’agir à différents niveaux des voies de la douleur. Elle améliore le confort de l’animal et permet de réduire les doses pour chaque molécule, y compris pour les anesthésiques, ce qui limite les risques d’effets indésirables. Un protocole analgésique est établi pour chaque animal, après un examen clinique et selon l’intensité de la douleur attendue ou observée. Il est ensuite adapté d’après ses réactions, objectivées à l’aide d’un score de douleur (grille 4AVet, score de Glasgow).

Recourir aux morphiniques

Les indications médicales ou chirurgicales des morphiniques sont nombreuses dans la prise en charge de la douleur.

> La méthadone et la morphine sont utiles en prémédication ou en cours d’intervention, lors de douleur modérée à sévère. Elles ont une action assez courte, d’environ quatre heures. La méthadone possède un effet anti-NMDA (N-méthyl-D-aspartate) qui limite l’incidence des douleurs chroniques postchirurgicales. Elle dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) vétérinaire et peut être administrée par voie intraveineuse sans entraîner de libération d’histamine (absence de risque d’hypotension, contrairement à la morphine).

> Le fentanyl, environ cent fois plus puissant que la morphine, est utilisé lors de douleurs sévères, en phase opératoire ou postopératoire immédiate. D’après l’expérience des conférenciers, son administration par voie intraveineuse permet un contrôle précis de l’analgésie, avec une action rapide et courte (environ 20 minutes en bolus de 2 à 5 µg/kg), alors que l’efficacité des patchs transdermiques varie d’un animal à l’autre. Une présentation vétérinaire injectable par voie intraveineuse devrait être commercialisée au printemps. Comme le fentanyl peut entraîner une dépression respiratoire, l’animal doit être sous contrôle continu lors de son emploi.

Ces trois molécules sont des stupéfiants. Elles sont à stocker dans une armoire fermée à clef, non visible de la clientèle, et chaque utilisation doit être strictement consignée (date, animal, dose injectée)¹.

> La buprénorphine (20 µg/kg) possède une AMM vétérinaire et n’est pas un stupéfiant : elle est donc facilement accessible et utilisable en clientèle. Moins puissante que la morphine ou la méthadone, elle agit pendant environ douze heures. Elle est donc intéressante en relais, lors du retour de l’animal à son domicile, par exemple. En raison de sa forte affinité pour les récepteurs µ et de sa stabilité, elle ne doit pas être employée avant les autres molécules, car elle bloque leur fixation.

> Le butorphanol est surtout conseillé pour son effet sédatif chez le chien et le chat. Son action analgésique est intéressante chez les oiseaux.

> D’autres opioïdes à usage humain sont disponibles, comme le tramadol. Celui-ci peut être prescrit à domicile (hors AMM) après une intervention chirurgicale ou chez des chiens arthrosiques, associé à un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) ou seul lors d’insuffisance rénale.

Les effets secondaires varient selon les molécules, mais ils sont peu fréquents lorsque les doses et les précautions d’emploi de chacune sont respectées.

Pratiquer des anesthésies loco-régionales

En bloquant la production et la conduction des impulsions nerveuses nociceptives, la lidocaïne et/ou la bupivacaïne permettent un meilleur contrôle de la douleur, et une réduction des doses d’anesthésiques fixes ou volatils. Les conférenciers ont donc encouragé les praticiens présents à pratiquer des anesthésies loco-régionales, qu’elles soient :

– locales : de surface (pose d’un cathéter, d’une sonde nasale, etc.), par infiltration (comme en dentisterie) ou par diffusion (à l’aide d’un drain, lors d’exérèse d’un fibrosarcome par exemple, ou d’injection intra-articulaire) ;

– tronculaires (en périphérie d’un nerf) : pour les membres (bloc du plexus brachial, bloc du nerf tibial, etc.), le thorax (bloc intercostal) ou les nerfs crâniens (blocs mandibulaire, infra-orbitaire, etc.) ;

– péridurale : selon la dose injectée entre la dure-mère et le canal rachidien, au niveau de l’espace lombo-sacré (L7-S1), l’anesthésie peut concerner le périnée, la queue, les membres pelviens et l’abdomen caudal.

Toutes ces techniques sont détaillées dans le guide pratique d’analgésie² rédigé par les conférenciers, qui liste aussi les mécanismes de la douleur et l’ensemble des molécules utilisables. Il précise en outre comment établir un protocole et évaluer la douleur chez l’animal.

• 1 Un cahier de registre des stupéfiants est disponible auprès des délégués Sogeval.

• 2 Guide disponible auprès des délégués Sogeval.