La gestion des plaies en urgence - La Semaine Vétérinaire n° 1526 du 08/02/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1526 du 08/02/2013

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Patricia Meynaud*, Sandrine Ferrandi**

Fonctions :
*unité de chirurgie de l’ENVT. Article tiré d’une conférence organisée par l’Afvac Sud-Est à Grasse, en octobre 2012.

PREMIERS SOINS

→ L’analgésie s’effectue par voie générale et/ou locale en irriguant la plaie avec une solution de lidocaïne à 2 % ou en appliquant une compresse imbibée de lidocaïne à 2 % pendant une à deux minutes. L’anesthésie loco-régionale peut également se révéler pertinente.

→ Protection de la plaie : afin d’éviter d’introduire des poils dans la plaie lors de la tonte, elle est remplie avec un gel stérile hydrosoluble ou protégée par des compresses stériles humidifiées si sa surface est plane, voire fermée temporairement par des pinces à champ.

→ Tonte de la plaie sur une large surface permettant de mettre en évidence d’autres lé­sions. Les poils des abords immédiats peuvent être coupés aux ciseaux imbibés d’huile afin de les y coller.

→ Lavage de la plaie, voire de l’animal : en cas d’éviscération, les organes sont lavés et maintenus humides avant une intervention chirurgicale urgente. La plaie est rincée afin d’éliminer les corps étrangers, les caillots, la fibrine, les tissus nécrosés. L’effet mécanique est primordial. Il est obtenu par un lavage sous pression (aiguille 18 à 19G dans une poche à perfusion sur une seringue de 20 à 35 ml). La pression doit être suffisante pour éliminer les éléments néfastes sans pour autant léser les tissus. L’idéal est d’utiliser du chlorure de sodium à 0,9 % stérile, éventuellement tiédi. Lorsque la plaie est particulièrement sale (terre, sable, gravier, etc.), le premier lavage peut être directement réalisé sous le robinet, en la savonnant délicatement. Lors d’infection avérée, de la chlorhexidine savon est appliquée (activité non inhibée par la présence d’éléments organiques). Elle est préférée à l’eau oxygénée qui aggrave les lésions en raison de sa toxicité. Selon la gravité des plaies, ce nettoyage est réalisé chez un animal vigile, tranquillisé ou anesthésié.

ÉVALUATION

Après le lavage et le nettoyage, un premier bilan des lésions peut être établi : taille, profondeur, type de tissus atteints, etc. Si la plaie est propre, une reconstruction immédiate est envisagée. Dans les cas contraires (plaie contaminée, infectée, douteuse), il convient de réaliser un parage, tout en tenant compte de l’origine du traumatisme, car certaines peuvent induire des complications spécifiques. En effet, les brûlures s’infectent couramment. Les plaies consécutives à un frottement, à un écrasement ou à une brûlure évoluent en outre sur plusieurs jours. Il convient d’inclure ces paramètres dans l’approche thérapeutique (pas de reconstruction immédiate) et de prévenir le propriétaire des éventuelles complications.

PARAGE

Le praticien doit porter a minima un calot, un masque et des gants chirurgicaux. Les instruments sont stériles. Deux types de parages sont possibles.

→ Par plans successifs : le chirurgien élimine les corps étrangers et excise les tissus dévitalisés et/ou infectés, de la superficie vers la profondeur, en évitant de dévitaliser des tissus ou de propager l’infection par la séparation exploratrice de plans de clivage naturels. Pour évaluer la vitalité tissulaire, la couleur est un bon indicateur, en se rappelant que les structures ligamentaires et tendineuses, même grisâtres, peuvent être encore viables, contrairement au tissu musculaire. Le saignement est aussi un bon indicateur, mais il est altéré lors d’hypotension et de vasoconstriction. La plaie est rincée régulièrement et en fin de parage, à l’aide de chlorure de sodium à 0,9 % stérile sous pression modérée. Lorsqu’elle est située dans une région faiblement pourvue en tissus, ceux qui sont douteux peuvent être conservés avant d’être réévalués deux à trois jours plus tard. Un second parage est alors envisagé.

→ En bloc : la totalité de la plaie est excisée après sa fermeture. Les marges d’exérèse passent par les tissus sains. Cette technique n’est réalisable que dans les zones riches en tissus.

RECONSTRUCTION

Lorsqu’il est possible, le traitement reconstructif est idéal. Les fils monobrins sont préférés aux tressés (plus inflammatoires et capillaires). En cas de doute, mieux vaut s’abstenir et envisager une suture retardée (en attente de tissus sains et peu exsudatifs), secondaire (après un ou plusieurs parages et la mise en place de pansements favorisant la phase de détersion) ou une cicatrisation par seconde intention.

Il convient de signaler le cas particulier des scalps : la survie du lambeau scalpé dépend de sa revascularisation. Ainsi, après un lavage et un parage soigneux, il est replacé le plus rapidement possible dans l’espoir de préserver un maximum de tissu.

DRAINAGE DES ESPACES MORTS

Que la suture soit immédiate, retardée ou secondaire, il convient de combler les espaces morts, grâce aux sutures ou aux drains.

Le drain de Penrose est souvent utilisé. Il fonctionne par gravité. Plusieurs peuvent être mis en place dans des plans différents. Son extrémité est recouverte d’un pansement absorbant à changer régulièrement. Il est enlevé lorsque la quantité produite devient minime (elle s’arrête rarement, le drain étant lui-même irritant).

Les drains actifs (drain de Redon) sont plus efficaces, car aspiratifs. Ils peuvent être combinés afin d’irriguer également la plaie.

PANSEMENTS

Ils permettent de compléter la phase de détersion lorsque le parage et le lavage n’ont pas permis d’obtenir une plaie propre ou lorsque la plaie est évolutive. Les pansements humides et occlusifs servent à limiter la contamination exogène et favorisent la cicatrisation. Ils sont à changer dès qu’ils sont saturés. Différents types existent, adaptés à chaque phase d’évolution des plaies.

→ Les hydrocolloïdes agissent à tous les stades, de la détersion à la fin de la cicatrisation, sur des plaies légèrement à très exsudatives. La pâte peut combler les anfractuosités.

→ Les hydrogels sont utilisés sur les plaies sèches en phase de détersion et cavitaires, voire anfractueuses. Ils assurent une bonne détersion.

→ Les argentiques traitent les plaies infectées ou à fort ris­que d’infection grâce à leurs ions argent au large spectre antibactérien. Leurs indications sont aussi bien curatives que préventives. C’est un pansement très utilisé par les centres de grands brûlés humains.

→ Les alginates sont des hydrocolloïdes liés à des alginates de calcium : à l’action des hydrocolloïdes sont associés un effet antibactérien par l’adsorption des germes et un autre hémostatique, bénéfique sur les plaies qui saignent facilement. Ils sont contre-indiqués sur les lésions en phase de reconstruction.

→ Les lipidocolloïdes n’adhèrent pas à la plaie ni à son pourtour grâce à la présence de vaseline. Ils sont employés dans les phases de reconstruction lorsque l’épiderme est encore fragile. Une mousse peut y être adjointe pour absorber les excès de fluides des plaies exsudatives. Leur utilisation dans ce contexte est conseillée lorsque la plaie est propre, mais trop inflammatoire ou importante pour être reconstruite immédiatement. Le traitement médical est instauré jusqu’à ce que la reconstruction chirurgicale soit possible.

SOINS POSTOPÉRATOIRES

Les antalgiques sont indispensables en phase de détersion. Les anti-inflammatoires peuvent également jouer un rôle important.

Bandages et collerette protègent les plaies. Les sutures peuvent être recouvertes par un pansement liquide. Les pansements des membres sont maintenus en place grâce à l’utilisation de champs collants transparents qui permettent d’alléger le bandage et de surveiller l’évolution de la plaie sans induire de sensibilisation. Les mouvements doivent être limités lors de plaies articulaires et de fractures.

L’administration d’antibiotiques est inutile, sauf pour une plaie dont l’infection est avérée cliniquement, si des signes généraux sont présents, en cas de fracture ouverte ou de plaie articulaire. Cependant, dans ces deux derniers cas, le premier traitement de l’infection reste le parage, associé à une éventuelle antibiothérapie locale sur support (ciment ou compresses résorbables de gentamicine). L’administration d’antibiotiques lors de morsure est actuellement controversée en médecine humaine.

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