Principales étapes de fabrication d’un autovaccin - La Semaine Vétérinaire n° 1523 du 18/01/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1523 du 18/01/2013

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/ANIMAUX DE RENTE

Auteur(s) : Karim Adjou

Fonctions : maître de conférences, service de pathologie médicale du bétail à l’ENV d’Alfort

La vaccination est fortement indiquée chez les espèces de rente, pour lesquelles la médecine de troupeau, la prévention et la lutte contre la dissémination des infections revêtent une dimension particulière, notamment en raison de la taille importante des effectifs et de la faible valeur individuelle des animaux (volailles, porcs, ovins, caprins, etc.). Cependant, certains vaccins ne sont pas disponibles, en particulier pour les espèces et les indications dites mineures.

Le concept de l’autovaccin est celui d’une préparation “sur mesure”, puisqu’il est obtenu à partir d’agents pathogènes isolés chez un animal malade, avant d’être administré à ce dernier et à ses congénères du même élevage. Il permet d’apporter une réponse personnalisée à une maladie spécifique d’un élevage, tout en limitant le recours aux anti-infectieux.

Même s’ils n’atteignent pas le niveau d’exigence des vaccins qui bénéficient d’une autorisation de mise sur le marché (AMM), leur encadrement réglementaire, la mise en place de bonnes pratiques de fabrication (BPF) et le développement de technologies de pointe permettent une caractérisation fine des souches bactériennes. Cela assure un certain niveau d’efficacité, d’innocuité et de sécurité aux autovaccins.

Pour en fabriquer un, deux conditions préalables sont nécessaires. Tout d’abord, l’isolement du germe impliqué et, dans un second temps, une ordonnance vétérinaire.

DIAGNOSTIC ET ISOLEMENT DE LA BACTÉRIE

L’efficacité d’un autovaccin repose en partie sur le choix du ou des agents pathogènes. La qualité du diagnostic clinique établi par le vétérinaire est donc primordiale, de même que celle du prélèvement à analyser effectué par le praticien chez un animal malade ou lors d’une autopsie. Ce prélèvement, qui ne doit pas être contaminé, est placé dans un conditionnement adapté et acheminé rapidement au laboratoire afin de compléter le diagnostic clinique par un diagnostic bactériologique. Le laboratoire isole l’agent pathogène et l’identifie.

PRESCRIPTION VÉTÉRINAIRE

Lorsque le ou les agents bactériens sont isolés, le vétérinaire qui a effectué le prélèvement rédige une ordonnance. Différents éléments doivent y figurer :

– le nom et l’adresse du détenteur de l’animal ou de l’élevage où l’agent pathogène a été prélevé ;

– le nom et l’adresse du vétérinaire prescripteur ;

– l’espèce animale ;

– la ou les souches bactériennes à incorporer et leurs références de laboratoire ;

– l’adjuvant ;

– la présentation demandée ;

– le nombre d’unités.

Ces éléments sont importants à prendre en compte car, s’agissant d’une prescription hors AMM et hormis lors d’un défaut de qualité du produit, la responsabilité du vétérinaire prescripteur peut être mise en cause par son client en cas de défaut de résultats.

La ou les souches isolées par le laboratoire de diagnostic sur une gélose (en tube ou en boîte de Pétri), accompagnées de l’ordonnance, sont envoyées au laboratoire qui fabriquera l’autovaccin (Vandaële, 2005).

FABRICATION

L’autovaccin souscrit à des règles de fabrication strictes qui visent à garantir sa qualité, son efficacité et son innocuité. Toutes ces règles sont décrites dans le guide de bonnes pratiques de préparation des autovaccins à usage vétérinaire, en annexe de l’arrêté du 6 mars 2008.

Les différentes étapes de son élaboration (production, mélange, répartition et lavage, stérilisation) se succèdent dans des zones spécifiques, totalement indépendantes, dans lesquelles les opérations s’effectuent sous une atmosphère contrôlée. La conception de ces zones assure le respect de la marche en avant des produits, des matériels et des personnes. De plus, tous les rejets sont stérilisés afin de protéger l’environnement.

Préparation des milieux

Les matières premières sont pesées, mélangées et autoclavées pour assurer leur stérilité. Les bouillons de culture et les milieux de culture sont préparés. Les milieux peuvent être solides (boîte de Roux) ou liquides (fermenteur). Le choix dépend tout d’abord de la bactérie. En effet, certaines possèdent un faible rendement et leur culture sera plus efficace en milieu liquide. De plus, le facteur économique entre en ligne de compte, le fermenteur étant beaucoup plus coûteux.

Stockage des bactéries et conservation des souches

Le stockage des bactéries est important pour éviter qu’elles ne mutent. Pour cela, leur métabolisme doit être le plus faible possible. L’utilisation d’azote liquide semble être la technique la plus adaptée. Mais elle génère de nombreuses contraintes techniques et matérielles. Les bactéries sont donc stockées à – 90 °C (surgélation). En général, les souches sont conservées deux ans environ pour pouvoir répondre à une nouvelle demande de l’éleveur.

Vérification de la souche

Après l’enregistrement des données de la commande, le laboratoire confirme l’identification de la souche reçue, par sérotypage généralement, et vérifie sa pureté.

Multiplication de la bactérie

Les bactéries sont ensemencées sur les milieux de culture les plus appropriés, où elles vont se multiplier et surtout exprimer les antigènes d’intérêt. Elles sont récoltées par les lavages successifs des boîtes de Roux avec une solution, puis les cultures bactériennes sont récupérées par la centrifugation. Le surnageant est mis au rebut, le culot est lavé puis remis en suspension pour être de nouveau centrifugé.

Vérification et titrage de la culture obtenue

Des contrôles de pureté des récoltes sont entrepris sur chaque lot de fabrication, afin de vérifier l’absence de contamination. Les cultures sont diluées à des concentrations désirées sur la base de densité optique. Lors de la production d’autovaccins, des numérations sont effectuées pour établir une base de données permettant d’estimer la concentration en bactéries selon les valeurs de densité optique obtenues par le spectrophotomètre. Ces éléments servent à définir un étalon pour une bactérie donnée, afin d’estimer la concentration en bactéries des cultures. Cependant, de temps en temps, il est nécessaire de refaire des numérations pour étalonner chaque lot de production, ce qui allonge la durée de fabrication des autovaccins d’environ une semaine. En effet, certaines bactéries, notamment celles isolées chez le poisson, pos­sèdent une forte variabilité de croissance, ce qui rend l’étalon non fiable.

Inactivation

L’inactivation des bactéries est une étape primordiale. Elle permet d’annuler leur action pathogène sans les dénaturer afin de conserver leur pouvoir immunogène. En effet, elles doivent rester, autant que possible, antigéniquement analogues aux bactéries vivantes.

L’inactivation est réalisée via un traitement chimique ou physique. Cette étape, plus ou moins longue selon les bactéries, explique en partie la variation des temps de fabrication des autovaccins. Des contrôles d’inactivation, de pureté et de stérilité sont pratiqués sur chaque lot de fabrication.

Assemblage des antigènes et répartition

L’adjuvant, s’il est nécessaire, est fabriqué puis mis en bouteille. Sont alors ajoutées différentes substances (agents de conservation et stabilisants) avant l’ajout des antigènes. La formulation des autovaccins est importante pour obtenir une efficacité optimale tout en assurant un bon équilibre activité-innocuité (vaccins concept). Ces opérations sont conduites en zone inscrite en classe ISO5 “salle blanche”. Cette zone adopte les prescriptions des BPF : la stérilité de l’ambiance et des produits, ainsi que l’hygiène des opérateurs sont absolues.

Libération du vaccin après contrôle final et conservation

Après la fabrication, les autovaccins sont stockés dans une chambre froide pendant les ultimes contrôles, puis libérés après l’examen du dossier du lot. Ce dernier est alors adressé au vétérinaire qui a fait procéder à l’isolement initial de la bactérie incorporée dans l’autovaccin, lequel le délivre à son client.

Un échantillon de référence est conservé pendant un an après la date de péremption, ce qui représente une durée d’environ deux ans après la fabrication. L’ensemble des opérations de fabrication et de contrôle s’inscrivent dans un délai compris entre quatre et cinq semaines en moyenne. Ce temps de fabrication est variable, surtout lorsque les bactéries sont difficiles à cultiver ou quand l’inactivation est longue.

Source : Lacroix A.-S. Place des autovaccins dans la lutte contre les maladies chez les espèces de rente. Thèse vétérinaire, ENV d’Alfort (2012).

LES MENTIONS PORTÉES SUR LES AUTOVACCINS

L’étiquetage des autovaccins doit comporter différentes informations (article R.5141-139 du Code de la santé publique) :

→ la mention « autovaccin à usage vétérinaire » ;

→ la dénomination de l’agent pathogène ;

→ la composition qualitative en substances actives et en adjuvants et constituants de l’excipient ;

→ le volume ou le nombre de doses par conditionnement ;

→ le numéro du lot de préparation ;

→ le nom du titulaire de l’autorisation et la dénomination de la société ;

→ les espèces de destination ;

→ le nom et l’adresse du détenteur de l’animal ou de l’élevage où l’agent pathogène a été prélevé ;

→ la date de péremption ;

→ les précautions de conservation.

Pour en savoir plus

→ Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Liste des établissements de préparation d’autovaccins autorisés par l’Anses-ANMV [en ligne]. Mise à jour le 11 mai 2012. [http://www.etavet.anmv.anses.fr:8080/doc/Liste_EPAV.pdf].

→ Thibault E. Les autovaccins chez les petits ruminants. In : Comptes rendus des Journées nationales des GTV. Tours. 26 au 28 mai 2004. Paris, SNGTV, 2004, 925-931.

→ Thibault E. Les autovaccins en aviculture. In: Colloque « Biosécurité et vaccination en pathologie aviaire ». Maisons-Alfort. 18 au 19 juin 2009. 199-200.

→ Vandaële E. Les autovaccins sont un recours en l’absence d’autres vaccins. Point Vet., 2005, n° 260, 14-15.

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