Le prolapsus utérin chez la jument - La Semaine Vétérinaire n° 1508 du 21/09/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1508 du 21/09/2012

Formation

ÉQUIDÉS

Auteur(s) : SOPHIE PAUL-JEANJEAN

POINTS FORTS

– Le prolapsus utérin est une véritable urgence qui peut mettre en jeu le pronostic vital de l’animal.

– La réduction est facilitée par la surélévation de l’utérus, idéalement posé sur une planche soulevée par deux aides.

– En présence d’un utérus trop détérioré, l’amputation peut être envisagée.

Le prolapsus utérin est l’une des nombreuses complications post-partum de la jument. Il présente une incidence relativement faible, mais constitue une véritable urgence qui peut mettre en jeu le pronostic vital.

Cette affection se définit comme une rétroversion totale ou partielle (l’extrémité d’une corne, par exemple) de l’utérus. Elle est décrite chez tous les équidés, sans distinction de taille (du poney shetland au percheron), ni de race ou d’espèce (ânesse, jument). Le prolapsus utérin apparaît généralement dès l’expulsion du fœtus, mais peut aussi être différé et survenir après la délivrance (naturelle ou assistée), voire quelques jours après le poulinage. Certains facteurs prédisposent à cette anomalie, tels qu’un avortement, des dystocies, une non-délivrance et le poids des enveloppes, une délivrance manuelle, l’utilisation de doses excessives d’ocytocine, etc.

DIAGNOSTIC

Lors de rétroversion totale de l’utérus, le diagnostic est évident et ne nécessite aucun examen complémentaire. En revanche, lors de prolapsus partiel (fréquent lors de non-délivrance), il y a intussusception d’une corne utérine sans extériorisation, dont le diagnostic est établi par palpation manuelle minutieuse de l’utérus par voies vaginale et rectale et par échographie transrectale. La jument présente alors un ténesme et des coliques d’intensité variable. Lors de prolapsus utérin, la survie de l’animal peut être rapidement compromise. En effet, l’utérus prolabé est exposé aux blessures multiples, à la nécrose et à l’ischémie. Une hémorragie importante, externe ou interne, à l’origine d’un choc parfois mortel est également possible.

La jument doit être gardée au calme en attendant l’intervention du vétérinaire et, éventuellement, recevoir un anti-spasmodique pour diminuer les coliques. Il convient également de surélever (à l’aide d’une planche, par exemple) et de protéger l’utérus avec des linges humides afin de limiter l’œdème, les lésions vasculaires, la tension sur cet organe et sur ses ligaments.

TRAITEMENT

Dès son arrivée, le praticien évalue l’état général de la jument. Le traitement doit, d’une part, gérer l’éventuel choc et, d’autre part, réduire le prolapsus utérin. La contention de la jument est obtenue par l’association d’α2-agonistes (xylazine à la dose de 0,3 mg/kg ou romifidine, 0,07 mg/kg) et d’un morphinique tel le tartrate de butorphanol à 0,02 mg/kg.

Dans de rares cas, une anesthésie générale peut être indiquée, mais, comme chez la vache, la position debout facilite la remise en place de l’utérus dans l’abdomen.

> Dans tous les cas, la réduction du prolapsus nécessite de contrôler les efforts expulsifs de la jument par le passage d’une sonde naso-œsophagienne en position orotrachéale ou par la réalisation d’une épidurale.

Un nettoyage doux et minutieux de la partie prolabée, de la vulve et du périnée est ensuite réalisé. Les éventuelles lésions de la muqueuse utérine sont évaluées et suturées si besoin.

Si elle n’est pas déjà détachée, la délivrance est séparée de l’utérus, à condition que cette procédure soit facile et atraumatique Sinon, la réduction est effectuée avec la délivrance en place. La nature de l’éventuel contenu de la masse prolabée (anses intestinales et/ou vessie) est déterminée. Au besoin, elle est vidangée, voire ponctionnée. La réduction est facilitée par la surélévation de l’utérus. Idéalement, celui-ci est posé sur une planche soulevée par deux aides. L’organe est manipulé avec le plat des mains et est refoulé progressivement. La manœuvre consiste à résister lors des efforts de la jument et à pousser pendant le relâchement qui suit.

> Une fois l’utérus repoussé dans la cavité abdominale, sa remise en place est indispensable. Il est nécessaire de le redéplier, plus particulièrement l’extrémité de chaque corne, soit avec la main, soit à l’aide d’une bouteille pour pouvoir refouler encore plus l’extrémité des cornes. Un repositionnement incomplet ou l’extrémité d’une corne insuffisamment dépliée entraîne un ténesme et un inconfort, et expose l’animal à une récidive. La remise en place peut également être facilitée par des irrigations utérines de solution saline à 0,9 % tiède (2 à 3 l pour une jument de taille moyenne, voire jusqu’à 15 l), suivies d’un siphonage. Ces lavages peuvent être répétés plusieurs fois par jour et quelques jours de suite, jusqu’à l’obtention d’un liquide de rinçage propre. Tous les auteurs s’accordent sur l’intérêt d’une administration d’une faible dose d’ocytocine (20 UI) dès le repositionnement de l’utérus, ce qui accélère l’involution, limite les hémorragies de la muqueuse et contribue à la prévention des rechutes. La procédure peut être complétée par une suture vulvaire.

> Un traitement général à base d’antibiotiques à large spectre, d’anti-inflammatoire et d’anti-endotoxinique(flunixine et fluidothérapie) est instauré en fonction de l’état clinique de la jument.

Comme cela se pratique assez fréquemment chez la vache, en présence d’un utérus trop détérioré (lacérations importantes, nécrose), l’amputation peut être envisagée. L’association d’un état de choc avancé et de graves lésions utérines doit conduire le praticien à conseiller l’euthanasie.

Le pronostic vital et reproducteur du prolapsus utérin chez la jument est favorable quand la prise en charge est rapide, avec 60 à 87 % de survie selon les auteurs.

  • Source : conférence de Jean-Jacques Roy lors du congrès SNGTV 2012.

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